Les deux mastodontes du football tunisien ont souvent profité des joutes continentales pour régler leurs comptes et donner un cadre plus prestigieux à leurs rivalités. A 8 reprises (Coupe de la CAF 2006 et 2008, Ligue des Champions 2005 et 2012) l’Etoile et l’Espérance se sont écharpés hors du contexte domestique, pour se disputer une suprématie sur l’Afrique. Retour sur les 8 premiers rounds et présentation du 9ème, d’ores et déjà décisif pour la qualification.

Ligue des Champions 2005 Phase de Poules (0-0, 1-1)

Les deux clubs sortent d’une saison compliquée. Après 7 titres consécutifs, l’Espérance de Tunis finit à la 4ème place et vit les balbutiements d’un nouveau cycle après le départ du président Slim Chiboub quelques mois plus tôt. L’Etoile perd le championnat à la différence de buts particulière contre Sfax, et s’est cruellement offert quelques jours d’espoir suite à une réserve. En effet, les sahéliens demandent à rejouer le match perdu contre le CA (contrat jeune non conforme) et après avoir été déboutés par la fédération tunisienne, voient leur requête acceptée, avec une ultime occasion de prendre des points et gagner le championnat. La FIFA finit par refuser que le match soit rejoué, et le CSS est sacré. Encore raté…

En reconstruction, les 2 clubs se retrouvent dans la même poule en Ligue des Champions avec Zamalek et l’ASEC Abidjan. Solide derrière grâce à ses étrangers (Tizié aux cages, le nigérian Obina et le camerounais Franck Olivier) l’Espérance galère en attaque et pâtit du départ d’Issam Jemaa. L’Etoile, reprise par Mécha Bazdarevic, présente à peu-près les mêmes caractéristiques, avec un secteur offensif tributaire d’Emeka et Jedidi. Ce qui donne 2 confrontations estivales fermées (1-1 et 0-0). L’ESS en venant à bout de l’ASEC à Sousse (2-1) se met sur les bons rails et ne sortira plus des 2 premières places, l’Espérance finira en dernière position. En finale, la bande de Bazdarevic ne pèsera pas lourd face à El Ahly.

Coupe de la CAF 2006 Phase de poules (3-1 et 1-0 pour l’Etoile)

Portée par la saison-canon d’Amine Ltaief, l’Espérance remporte le doublé. Vice-champion pour la énième fois, l’Etoile construit patiemment avec Faouzi Benzarti l’équipe qui détruira tout sur son passage en 2007. Nafkha succède à Hammi comme plaque tournante du milieu et l’équipe devient nettement plus joueuse grâce à Chikhaoui et Gelson Silva. L’été 2006 sera un prélude au triomphe de l’année suivante, avec une phase de poules de la CAF parfaitement maîtrisée (6 victoires en 6 matchs). Face à l’EST, les étoilés s’imposent à l’arraché à l’aller (1-0, pénalty puis célébration pas top fair-play de Saber Ben Frej) et se baladent au retour (1-3) avec ce qui sera le meilleur match de la carrière de Nafkha. Comme l’année précédente, l’ESS atteint la finale de la compétition après avoir éliminé son rival, avec cette fois une issue victorieuse face à l’AS FAR.

Coupe de la CAF 2008, huitièmes de finale (2-0 pour l’Etoile, 0-0)

Le contexte est hautement houleux. Une semaine avant le match aller, l’Espérance bat l’Etoile en finale de Coupe de Tunisie au stade de Radès (2-1) grâce à deux buts magnifiques du marocain Aboucherouane. Journée cauchemardesque pour les étoilés, qui s’estimeront lésés par l’arbitrage, et voient leurs supporters subir la brutalité policière avec des coups de matraque qui pleuvent de partout. Retrouvailles au stade Olympique de Sousse 6 jours plus tard, avec un dispositif de sécurité renforcé pour éviter les échauffourées entre Ultras (vol de bâche, représailles et tutti quanti). L’EST cède face à une étoile revancharde (2-0, buts de Chermiti et Ogunbiyi) et n’arrivera pas à renverser la vapeur au match retour. L’ESS accède aux Poules, et ira croiser le fer avec Sfax en finale.

Ligue des Champions 2012 Phase de Poules (1-0, 2-0 -match arrêté- pour l’Espérance)

L’Espérance de Maaloul est bâtie pour aller loin dans la compétition. Minimaliste, pas spectaculaire, mais avec la solidité et le réalisme qu’il faut. Le trio Aouadhi-Ragued-Mouelhi est au top niveau coordination et forme physique, et devant Msakni et Yannick Ndjeng même à 60% de leurs capacités ont les moyens de faire mal à n’importe quelle équipe.

L’Etoile s’incline à Radès sur un pénalty évitable suite à une erreur de Mosaab Sassi. Cette défaite, associée au match nul (0-0) concédé face à Sunshine Stars, met l’équipe de Mondher Kebaier dos au mur. Quand l’EST débarque au stade Olympique, un simple coup d’œil au onze de départ des locaux fait craindre le pire : le tandem offensif le plus désespérant de l’histoire du club est aligné, et ne touchera pas un ballon. Moussa Maazou et Justin Mengolo commettront un match innommable, qui mâche le travail de l’Espérance.

Sans Franck Kom, l’entrejeu galère face à Ragued et Aouadhi, qui savent quand accélérer et quand casser le rythme. L’ouverture du score d’Aouadhi suite à un bon travail de Msakni entraîne une première réaction négative du public et l’interruption du match pendant 10 minutes. La situation dégénère définitivement suite au deuxième but de Ndjeng : Envahissement de terrain, gaz lacrymogène, match gagné pour l’Espérance, l’ESS exclue de la Ligue des Champions. Et pour la quatrième fois, quand les deux rivaux se rencontrent dans une compétition, l’un d’eux atteint la finale (l’EST perdra face à El Ahly).

 

Coupe de la CAF 2015 Phases de Poules

Ça n’a pas beaucoup bougé à Sousse. Faouzi Benzarti est resté, pour le moment tous les cadres sont là, et l’attaquant algérien Bounedjah est revenu en prêt pour six mois après avoir été vendu aux qataris d’Al Sadd. La victoire inaugurale face au Stade Malien (1-0) permet aux sahéliens d’aborder sereinement le choc de ce soir.

On ne peut pas en dire autant de l’EST. José Anigo ne sait pas encore ou se situer dans un club en plein nettoyage de printemps (exit Cruz, Darragi, Ndjeng, Akaichi, Afful, et 10 recrutements dont Fakhreddine Ben Youssef de retour au pays en provenance du FC Metz. L’ex-coach de l’OM a dû faire avec les moyens du bord pour le premier match au Caire, entre les absents, les fins de contrat et l’impossibilité d’utiliser les recrues et s’est pris une gifle (3-0) logique 6 jours après son arrivée en Tunisie.

La déclaration d’Anigo concernant la Coupe de la CAF « c’est une compétition qui me gêne un peu. Pour le moment, je suis concentré sur la coupe et le championnat de Tunisie. » est extrêmement malvenue. Quel que soit le degré de préparation, de fraîcheur, peu importe que l’effectif soit en pleine mutation, l’Espérance est dans le top 8 d’une compétition que les clubs tunisiens ont toujours considérée comme un objectif, et l’Espérance se trouve dans la même poule qu’un rival historique et un octuple champion d’Afrique. Rien qu’évoquer l’éventualité de faire l’impasse est une hérésie, et ça les espérantistes vont rapidement lui faire comprendre si ça tourne mal.

Farouk Abdou
Farouk Abdou
Actuellement à E-management, passé par Echosciences Grenoble, Le Dauphiné Libéré, Sport Translations et Tunisie foot, Africain volant pour Lucarne Opposee