La confrontation pour la 5ème journée des Poules de la Coupe de la Confédération entre l’ES Sahel et le Kawkab Marrakech rappelle inévitablement la finale 1996 de l’ancienne version de la compétition : la coupe de la CAF. Tenant du titre, l’ESS pense avoir fait le plus dur à Sousse (3-1) mais se fait surprendre au stade El Harti deux semaines plus tard (2-0) avec l’amer apprentissage de cette règle cruelle mais indissociable des confrontations aller-retour : ce damné but à l’extérieur.

Un but sensé jeter un froid, en ce 17 novembre assez doux, mais qui n’entraîne aucun bouleversement particulier dans le public. La finale aller de la Coupe de la CAF 96 au Stade Olympique n’a pas débuté depuis 5 minutes que Zebdi ouvre le score pour le Kawkab Marrakech. A cette époque, des années avant que les Groupes Ultras ne soient fondés (le premier, la Brigade Rouge, verra le jour en 2001) les encouragements sont bon enfant, avec une ou deux chansons qui tournent en boucle. Tandis qu’Imed Ben Younès et Riadh Jelassi jouent l’engagement, les gens continuent à taper dans les mains, les gamins continuent de pulvériser les sachets de pop-corn. L’ESS va remonter en deux temps-trois mouvements, ils en sont persuadés.

Cette conviction est due à la force et l’expérience de l’Etoile en 1996, forgée par l’entraîneur brésilien Dos Santos et transformée en machine infernale. Vainqueurs de leur première Coupe de la CAF un an plus tôt face à l’AS Kaloum (0-0,2-0) les sahéliens caracolent en tête du championnat, qu’ils remporteront quelques mois plus tard, en mai 1997. Aucune faille ne semble perceptible : la défense imperméable cornaquée par Boukadida couvre le roc Salhi dans les cages, le milieu de terrain constitué d’internationaux Beya-Bouazizi-Ghodhbane est l’un des plus complémentaires que la Tunisie n’ait jamais connu, Clayton vole dans son couloir, et le duo d’attaque fait des ravages.

La suite du match sera somme toute logique : comme dans les tours précédents, l’Etoile, intraitable à domicile, accélère et met les visiteurs sous pression. L’affaire est (quasi) pliée suite à trois buts en 12 minutes- Ghodhbane 24’, Baccouche 30’ et Bouazizi 36’-qui mettent les marrakchis au pied du mur. Mais comme dans les tours précédents, l’Etoile desserre son étreinte et s’offre une petite vingtaine de minutes de flottement au stade Olympique. Ca n’a pas été dommageable en quart et en demie : Surclassé à Sousse (4-1) l’Unisport Bafang ne remontera pas son retard au Cameroun malgré sa victoire (1-0). De même pour le Vita Club, battu en Tunisie (2-0) et inutile vainqueur à Kinshasa (2-1).

Le KACM repart ainsi au Maroc avec un retard (3-1) qui en Tunisie sera perçu comme suffisant. Et deux semaines plus tard à Marrakech, le Kawkab donne du relief à ce but à l’extérieur que le public tunisien avait estimé anodin. Ce but qui au final, change tout. A 2-0, l’ESS n’arrivera pas à inverser la tendance et perd son titre acquis en 1995. La bande à Badraoui et Dmii remporte le trophée le plus prestigieux de l’histoire du Kawkab.

Ce fut le premier échec des Rouges en finale africaine. Dans les 20 ans qui suivent, l’Etoile remporte 9 titres continentaux (C1, C2, C3 et Supercoupes) et signe une série peu commune avec 6 finales consécutives entre 2003 et 2008. Cette histoire particulière avec l’Afrique a eu pour point de départ les deux années charnières 95 et 96 de l’une des générations les plus glorieuses de l’histoire du club : le triomphe face à Kaloum et l’échec de Marrakech.

Farouk Abdou
Farouk Abdou
Actuellement à E-management, passé par Echosciences Grenoble, Le Dauphiné Libéré, Sport Translations et Tunisie foot, Africain volant pour Lucarne Opposee