Eliminés en huitièmes mais repêchés grâce à la disqualification de l’AS Vita, les sud-africains de Mamelodi Sundowns sont inarrêtables depuis. L’euphorie les a menés à la seconde finale de C1 de leur histoire après celle perdue contre Al Ahly en 2001. Ils sont confrontés cette fois-ci à l’autre club du Caire, le Zamalek, plus habitué aux cimes continentales mais secoué par une demi-finale qu’il pensait avoir gagné un peu trop vite. Présentation du duel de clôture de l’épreuve-reine en Afrique, dont le cru 2016 ne laissera pas un souvenir impérissable.

L’élimination, ça vous gagne

C’est connu, les équipes repêchées sont les plus dangereuses. La décontraction dans votre jeu, quand vous n’êtes plus censés être dans la compétition, vous rend beaucoup plus redoutable. Deux exemples à l’échelle Africaine font écho à l’exploit inattendu du Danemark à l’Euro 92 : Le Wydad Casablanca en 2011, qui s’est hissé en finale de la C1 après avoir été sortis avant la phase de poules puis repêchés (exclusion du TP Mazembe) ; et le CS Sfaxien en 2013, vainqueur de la C3 après avoir été éliminés par les nigérians d’Enugu Rangers, coupables d’avoir aligné un joueur inéligible.

Il en a été de même pour les Mamelodi Sundowns. Les RD Congolais de l’AS Vita leur ont barré la route de la phase de poules, mais ceux-ci avaient aligné un joueur suspendu au tour préliminaire… Ressuscités et débarrassés de toute forme de pression (le coach sudaf Mosimane avait alors dit « c’est du bonus, nous allons préparer la Ligue des Champions 2017 ») les Sundowns ont dominé leur poule. Les algériens de Sétif, poussés à bout à domicile et trahis par les débordements de leur public, ont été exclus d’entrée, et le Zamalek s’est montré impuissant en s’inclinant à deux reprises (1-0 et 2-1). Les retrouvailles s’annoncent savoureuses.

Deux finalistes capables de prendre des raclées, est-ce bien sérieux ?

Tout n’a pas été rose pour les « brésiliens de l’Afrique du Sud » (référence à leur maillot auriverde) efficaces en attaque mais qui ont montré des faiblesses inattendues. En Zambie, lors de la demi-finale aller, les Downs passent à un cheveu d’être menés 3-0 par Zesco United en ayant été ballottés 85 minutes durant. Le football étant destiné à être capricieux pour l’éternité, l’attaquant sud-africain Billiat a réduit le score à  2-1 trente secondes après la balle de 3-0…

A ce même stade de la compétition, à Alexandrie, les zamalkaouis ont exploité les largesses défensives du Wydad au match aller (4-0) tout en trahissant eux-mêmes une perméabilité effrayante au niveau de leur arrière-garde. Cette perméabilité sera révélée au grand jour une semaine plus tard au retour : Etrillés (5-2) au Maroc, les cairotes sont passés à un but de la catastrophe en étant menés 5-1, avant que le nigérian Stanley n’inscrive le but du soulagement.

Sans vouloir enlever du mérite aux deux équipes, accéder à la dernière marche menant au trône africain en affichant de telles limites défensives est un indicateur de régression globale, et une mauvaise nouvelle pour le continent, en particulier dans l’optique de la Coupe du Monde des Clubs en décembre. Le champion d’Afrique rencontrera le vainqueur de la confrontation entre les japonais de Sanfrecce et les néo-Z d’Auckland City. Deux clubs qui ont martyrisé les représentants de l’Afrique lors des deux dernières éditions. Une troisième année de honte en mondiovision serait l’année de trop.

Le pari de la rédaction de Lucarne Opposée

Côté Zamalek, les atouts ne manquent pas : la vision de Shikabala, les talents de finisseur de Morsy, la pointe de vitesse affolante de Stanley. Mais pour cette finale, nous avons choisi de miser sur Aymen Hefny. Buteur en demi-finale aller et passeur décisif au retour, l’ailier de 30 ans compense les désavantages liés à son physique de crevette grâce à sa patte gauche soyeuse. Hefny avait déjà montré sa capacité à élever son niveau de jeu lors de la campagne de C3 en 2015, c’est peut-être la bonne année pour lui pour passer un cap. Il y a de grandes chances pour que la défense  des Sundowns se focalise sur Morsy et Stanley.Il suffit qu’une ouverture se présente pour qu’il en profite, notamment en repiquant dans l’axe. Autant se mouiller, nous parions sur lui pour être l’homme décisif de cette finale.

La stat : Castro, premier joueur sudam vainqueur d’une C1 africaine ?

Des coachs sud-américains vainqueurs d’une C1 africaine, ça existe. Le brésilien Carlos Roberto Cabral a gagné celle de 2002 avec le Zamalek, et l’argentin Oscar Fulloné en a même remporté deux d’affilée, avec l’ASEC Abidjan et le Raja Casablanca. Des joueurs sud-américains finalistes d’une C1, ça existe aussi (les brésiliens Reinaldo et Adailton avec l’Espérance de Tunis en 2000). Des joueurs sud-américains vainqueurs d’une C1, ça n’existe pas.

Le colombien Leonardo Castro pourrait bien être le premier joueur de son continent à briser cette barrière. Il n’a pas un CV affolant, affiche une obscure carrière dans son pays et quelques matchs de Libertadores avec les boliviens de l’Universitario. Mais en Afrique, Castro est comme chez lui. Avec les Mamelodi Sundowns son profil de pivot musculeux complète parfaitement la ligne d’attaque, en ouvrant des brèches pour la fusée Billiat. Avec 10 buts en Premier Soccer League sud-africaine et 2 en Ligue des Champions, il a montré qu’il n’est pas un manchot non plus. Cette finale lui donne l’occasion d’entrer dans l’histoire, en créant un pont éternel entre deux continents fous de foot qui ne se côtoient décidément pas assez.

Farouk Abdou
Farouk Abdou
Actuellement à E-management, passé par Echosciences Grenoble, Le Dauphiné Libéré, Sport Translations et Tunisie foot, Africain volant pour Lucarne Opposee