S'engager pour vaincre. Né un 16 mars 1882, Carlos Mutti s'en va en Europe en 1912 pour continuer ses études tout en jouant au football avant de s'engager pour la France et de ne pas abandonner l'armée, même pour une finale de Coupe de France. Il meurt quelques mois avant la fin de la guerre, si loin de Montevideo, si loin, mais auprès de ses compagnons d'arme.

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L'histoire n'est pas très connue mais nous est contée par Pierre Cazal, historien spécialiste de la sélection française, notamment à travers un article publié par le quotidien La Diaria. Carlos Mutti naît en 1892 à Montevideo. Parent de Cayetano Saporiti, grand gardien de l'Uruguay des années 1910, Mutti est lui aussi gardien, notamment au sein des Montevideo Wanderers, mais privilégie les études. C’est la raison qui le pousse à rejoindre la France en 1912. fclyonArrivé dans l’Hexagone, il continue de jouer au football au sein d'un club universitaire parisien. En 1914, au début de la guerre, il décide de s'engager au sein de la légion étrangère pour défendre la France. Blessé au front et il est renvoyé à l'arrière des combats, à Lyon, où il récupère de sa blessure. Il joue alors quelques matchs avec le FC Lyon, toujours en tant que gardien, et participe à la Coupe de France organisée en 1918, où il atteint la finale. Ayant pleinement récupéré de sa blessure, il reçoit cependant peu avant le match, prévu le 5 mai, la convocation pour retourner au front. 

Le reste est raconté par l'Ambassade de France en Uruguay lors d'un hommage rendu au joueur : malgré la convocation, le club obtient de l'armée que le joueur joue la finale avant de retourner sous les drapeaux. Le club pense donc retrouver son joueur à Paris pour la finale, mais un simple courrier du joueur attend les dirigeants : il y explique savoir qu'il aurait pu jouer ce match, mais il sait que son régiment sera déjà parti pour la bataille à ce moment-là. Il ne souhaite pas les abandonner ainsi et renonce donc à jouer la finale. Le 26 août, quatre ans après son engagement, le joueur décède lors d'une offensive dans la Somme.

Dans une revue publiée par le FC Lyon en 1930, Alexis Soulignac décrit Carlos Mutti comme « un gardien de grande classe, peut-être comme jamais nous n'avons eu à Lyon, ou même en France. Il nous éblouissait par son talent, et les révélations qu'il nous faisait du sport en Amérique du Sud. Les sceptiques qui écoutaient ses récits grandioses doivent aujourd'hui se rendre compte, maintenant que l'on connaît le football sud-américain, qu'il disait la vérité ». L’année du centenaire de sa mort, une plaque commémorative est déposée au Musée du Football de Montevideo.

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Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba