La fédération australienne de football a livré son compte rendu annuel du Conseil d’administration (CA). Lucarne Opposée a décrypté les grandes lignes d’un programme prévu pour animer les quinze prochaines années.
Le compte-rendu du Conseil d’administration 2020 développe les projets du football australien sur près de quatre-vingt-dix pages et dévoile de très grandes nouveautés. Il faut ainsi se préparer à la mise en place d’une seconde division, faisant le pont entre la A-League et les championnats de fédérations de National Premiers League. Un projet évoqué à deux reprises par Chris Nikou (directeur de la fédération) et James Johnson (Président-directeur général de la fédération), mais pour lequel il faudra tout de même patienter : « Le développement d'un cadre national de deuxième niveau, y compris toute future deuxième division nationale, reste une priorité pour la fédération et est reconnu dans nos « XI Principes » pour l'avenir du football australien. La fédération est enthousiaste à l'idée de faire passer la discussion du concept à la mise en œuvre pratique » a ainsi écrit Chris Nikou. Le lobby grandissant de cette D2 sera ravi, mais dans l’immédiat la priorité de l’instance gouvernant le football en Australie reste la marchandisation des compétitions et leur pérennisation.
Car le bilan financier est dans le rouge. La fédération accuse une perte avoisinant les deux millions de dollars. Le reste du monde est tout aussi impacté, on retrouve dans le bilan financier des pertes suites au confinement, la perte de sponsor, etc. Cependant, la fédération s’y retrouve en versant moins d’argent à ses équipes nationales privées elles aussi de compétition (surtout pour les Socceroos n’ayant pas pu disputer la Copa America 2020). Arrêté au 30 juin 2020, le bilan du CA ne prend pas en compte la reprise du championnat de A-League en juillet 2020. En comparaison avec les années 2018 et 2019, où la fédération a tenu ses revenus à hauteur de plus de 130 millions de dollars, cette année voit ainsi une baisse avec uniquement 108 millions de dollars perçus. Côté versement, la fédération a resserré ses comptes avec environ 20% d’argent dépensé en moins. On se rappelle qu’elle a dû procéder à un licenciement massif durant la période de pandémie de mars avec 70% de licenciement économique de son effectif.
Sur Internet, James Johnson s’est félicité de l’augmentation de la fréquentation des diffuseurs de contenus de football en Australie en partageant quelques chiffres : +244% de vues via les vidéos web, +355% heures visionnées et +14% d’engagement total. Une aubaine récompensée par le travail des clubs et de la ligue à créer de l’attrait autour des comptes officiels hébergés sur les réseaux sociaux. Non-mentionné particulièrement sur la réussite de ces chiffres, la National Premier League s’est muée en contre-pouvoir de la dominance de la A-League en partageant les prouesses des joueurs des différents championnats mineurs en Australie. Par ailleurs, cette forte diffusion a été impulsée par un homme, Peter Filopoulos, ancien directeur de Perth Glory FC et de la Fédération de football du Victoria. Voulant promouvoir le football de l’État de Melbourne (Victoria), il avait autorisé la diffusion des matchs. Une réussite entraînant son recrutement par la fédération au poste de chef du marketing et de la communication afin qu’il réédite l’exploit au niveau national.
Côté terrain, dans un plus court terme, la fédération veut pérenniser la santé financière de ces clubs (rappelons qu’à l’heure actuelle deux sont toujours en vente : les Central Coast Mariners et leur rival Newcastle Jets). L’idée, impulsée par Nikou et surtout Johnson, est d’incrémenter un système de transfert tel qu’il est connu en Europe : « Le développement des acteurs sera également renforcé par l'élaboration et la mise en œuvre d'un système de transfert national moderne. Fin 2020, la fédération a pu organiser une série de webinars auxquels ont participé certaines des plus grandes organisations de football du monde dont Manchester United, l’Olympiakos et la FIFA, qui ont permis de mieux comprendre le fonctionnement des marchés européen et mondial des transferts de joueurs et de tirer des enseignements pour le football australien ». Dans l’esprit de Johnson, les clubs doivent former des joueurs et les vendre afin de se créer suffisamment de ressources pour faire évoluer le niveau de jeu des équipes nationales masculines ou féminines. Un modèle largement reconnu en Europe. Un modèle notamment mis en place par le City Football Group au sein duquel James Johnson a travaillé.
Le conseil d’administration a également annoncé la restructuration et modernisation de la coupe nationale de Federation Cup (qui sera détaillé plus tard) avant de conclure sur les XI Principles, le chemin à suivre :
- I. Construire une identité cohérente et forte pour le football australien qui inspire tous les Australiens
- II. Développer un nouveau récit pour le football qui signifie un nouveau départ pour le jeu en Australie, qui lie avec succès toutes les nouvelles initiatives et qui le distingue des autres codes sportifs du pays.
- III. Évoluer et développer un écosystème footballistique intégré et prospère dirigé par un système de transfert national moderne.
- IV. Veiller à ce que la pyramide du football australien soit alignée et connectée grâce à des structures de compétition optimisées.
- V. Créer un environnement de classe mondiale pour le développement/la production des jeunes en augmentant le nombre de minutes de match pour les jeunes joueurs et en rationalisant le parcours des joueurs.
- VI. Créer une culture forte autour du développement des entraîneurs et des arbitres en soulignant l'importance de leur rôle en tant que poste qualifié et lien vital dans le développement des joueurs.
- VII. Transition vers un cadre de gouvernance moderne et adapté au football en Australie, conforme aux normes mondiales et aux meilleures pratiques de gouvernance du sport en Australie.
- VIII. Créer un modèle de fonctionnement et de gouvernance pour la A-League, la W-League et la Y-League qui soit adapté aux circonstances actuelles.
- IX. Veiller à ce que le football devienne plus ouvert et plus accessible à la communauté australienne et que le coût ne reste pas un obstacle à la participation.
- X. Accélérer et renforcer la croissance du jeu en encourageant la participation des femmes et des jeunes filles et en améliorant les structures de compétition existantes pour promouvoir le développement des joueurs.
- XI. Élever encore davantage les Matildas et les Socceroos au rang de symboles unificateurs du jeu et de héros qui incarnent l'identité du football australien afin d'inspirer chaque jeune australien, quelles que soient ses capacités ou son passé
Johnson met en place ce qu’il avait promis. Ancien joueur de football, il veut donner à cette fédération un engagement proche du football, coupant ainsi une ancienne direction de rugbymen placés dans un sport qu’ils ne connaissaient pas. L’Australie est une terre de football, ce sport est le plus pratiqué par les jeunes australiens de huit à dix ans et ce plan étalé sur quinze ans est clairement mis en place pour cette prochaine génération de Soccerros ou Matildas.