L’année 2019 s’est terminée sur un calendrier totalement fou, conséquence d’un contexte social particulier, 2020 a repris sur un rythme tout aussi effréné. Présentation de l’Apertura et premiers enseignements.

bankkbb

Après un Clausura 2019 qui s’était terminé sur un rythme totalement fou, notamment en raison de la contrainte imposée de terminer le tournoi avant la fin de l’année civile, le mois de janvier a été d’abord celui des luttes en coulisse, entre décision quant à la relégation ou l’avenir de certains clubs, conflits avec d’autres et reprise du championnat retardée.

Conflits en coulisse

On se souvient de la fin d’année 2019 très animée dans les bureaux de la fédération. Il y a eu les affaires, Aurora, Sport Boys, puis la question de la relégation, qui a abouti au choix de faire descendre directement Destroyers. Cette affaire a été au centre de nouveaux conflits entre plusieurs clubs et le comité exécutif de la fédération qui a animé une partie du mois de janvier et provoqué le retard de la reprise du championnat. Six clubs, Bolívar, Wilstermann, Oriente Petrolero, Blooming, Guabirá et Royal Pari avaient décidé de menacer de ne pas se présenter à la reprise. Le tout dans un contexte de lutte entre les différentes régions footballistiques du pays, d’accusations de corruption au sein des instances fédérales après la publication d’une lettre signée par huit clubs de l’élite dénonçant ces actes, et la décision de la FABOL, le syndicat des joueurs, qui avait annoncé ne pas vouloir reprendre le championnat tant que les dettes des clubs envers leurs joueurs ne seraient pas réglées. L’ensemble de ces différentes affaires ainsi animé le mois de janvier avant que tout ce petit monde finisse par tomber d’accord. Destroyers a donc accepté sa relégation en 2020 avec la garantie de revenir dès 2021 à l’occasion d’un tournoi remodelé. On en reparlera en temps et en heure tant les choses peuvent rapidement changer au pays de la Verde.

Nouveaux ambitieux et french touch

Sur le terrain, cet Apertura pourrait bien signifier le début d’une nouvelle ère au pays. Car si les géants restent des géants, certaines équipes semblent d’une part suffisamment solides pour construire, mais surtout savoir se donner les moyens de leurs ambitions. C’est ainsi le cas d’Always Ready. Qualifiés pour la première fois de son histoire à la Copa Sudamericana, les Millonarios d’El Alto font partie de ceux qui ont le plus voire le mieux recruté. Eduardo Villegas s’installe sur le banc, dans ses pas, Carlos Lampe le rejoint avec d’autres anciens de San José, Javier Sanguinetti, Rodrigo Ramallo et Jair Torrico, et l’ancien Tigre Fernando Saucedo. Du très solide sur le papier qui symbolise les ambitions d’un club qui devrait compter dans les candidats aux premiers rôles cette saison. Un statut auquel aspire aussi Royal Pari. Solidement soutenu par le Groupe Sion, la bande désormais dirigée par Miguel Ángel Portugal, champion avec Bolívar en 2013, s’offre une légende, Carlos Saucedo, meilleur buteur de la dernière décennie bolivienne, qui lui aussi quitte San José (on va y revenir) et rapatrie Damián Lizio. C’est certes moins clinquant ou impressionnant sur le papier que l’armada d’Always Ready, mais Portugal dispose d’un groupe homogène qui espère bien rebondir après une année 2019 assez décevante.

Mais il ne faut donc pas enterrer trop rapidement les géants. Ceux-ci sont encore et toujours les plus solides, les plus attractifs. En témoigne s’il le fallait l’arrivée de l’excellent Victor Abrego, impressionnant avec la sélection olympique, du côté de Bolívar. Un Bolívar qui change de coach, César Vigevani ayant rompu ses liens avec ses dirigeants et certains joueurs, attire un bielsista Claudio Vivas mais perd une idole après le départ de Juanmi Callejón. Un départ qui n’est semble-t-il pas véritablement compensé (en même temps, c’était assez difficile à envisager) même si devant, le retour de Marcos Riquelme, en échec au Chili, pourrait/devrait faire un bien fou. Chez les rivaux de La Paz, on a longtemps cherché à densifier l’effectif. Rolando Blackburn revient pour animer la pointe de l’attaque, il est la grande incorporation mais loin d’être la seule. Pour compenser les absences de Fernando Marteli et Meximiliano Ortiz, les Tigres ont attiré un duo uruguayen pour la défense centrale, Gonzalo Castillo et Gonzalo Godoy, Ricky Áñez, vient se placer à la récupération pour compenser Diego Wayar, Willie, un offensif brésilien vient pour apporter sa vitesse sur les côtés au sein d’un milieu déjà bien riche. Deuxième du dernier tournoi, le Strongest de Mauricio Soria est certes perturbé par les blessures pour débuter son championnat, mais dispose de suffisamment d’armes pour y pallier. Reste le cas du champion sortant, Jorge Wilstermann, qui a certes perdu deux atouts au milieu, mais s’offre un défenseur expérimenté, Marco Torsiglieri, et surtout ne bouge pas grand-chose (même si le club cherche encore et toujours, notamment en pointe). L’Aviador dispose toujours de bien des certitudes pour débuter sa saison, même si l’arrivée de la Libertadores pourrait coûter quelques points à une équipe qui a fini l’année dernière sur les rotules.

Impossible enfin de ne pas évoquer le cas de San José. Quatrièmes du dernier Clausura, les Orureños traversent une crise économique et institutionnelle si grave qu’elle a entraîné une incroyable vague de départs. Carlos Lampe, Jair Torrico, Ronald Eguino, Iker, Javier Sanguinetti, Carlos Saucedo, Rodrigo Ramallo et le coach Miguel Ponce sont quelques-uns des treize départs essuyés par le club. Pire, pris dans une tourmente depuis le départ du président Wilson Martínez, San José ne peut recruter, cumule une dette de plus de 2.5M USD, et doit donc gérer comme il peut en attendant que ses affaires soient résolues. Une fois celles-ci réglées, Omar Asad, qui vient de prendre les commandes de l’équipe, pourra compter sur ses nouveaux venus, dont le Français Julien Benhaim. Il se dit que le dénouement est proche.

Départ à fond

Sept journées en vingt-huit jours. Si vous aviez aimé le rythme intense de la fin du Clausura 2019, vous allez aimer celui de l’Apertura 2020. Avec un match tous les quatre jours en moyenne, des clubs engagés dans les tours préliminaires des compétitions continentales, le football ne semble plus vouloir s’arrêter en Bolivie. Et à ce petit jeu, ce sont les géants qui en font les frais. The Strongest ne décolle pas, ayant déjà perdu trois de ses cinq matchs disputés (dont deux qui font mal face à des concurrents directs, un à domicile face à Wilstermann qui suivait un carton pris à El Alto), Bolívar alterne à merveille larges victoires et courtes défaites, l’Aviador semble pas plus fringant, la déroute subie à Potosí face au Real lors de la septième journée pointant la grande fatigue de ce groupe. Cela profite donc aux ambitieux. Royal Pari a connu un accident de parcours face au promo Atlético Palmaflor, mais a depuis rebondi, enchaînant quatre victoires et un nul, pour occuper désormais seul la tête du classement. Une tête ravie à Always Ready, qui avait jusqu’ici cartonné tout le monde chez lui (The Strongest et Real Potosí en ont pris quatre, le Real Santa Cruz en a encaissé six) avant de tomber ce week-end face à San José. C’est le premier gros coup de la bande à Omar Asad, que l’on avait vu intéressante mais trop naïve en Libertadores, et qui avait débuté de la pire des manière son tournoi. Malgré ce premier succès, San José est pour l’instant bon dernier.

Classement

bolj7c

 

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.