Week-end particulier en Colombie avec la journée des clásicos. Direction Cali où l’América recevait son voisin le Deportivo Cali pour le 294e clásico vallecaucano.

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Troisième ville du pays après Bogotá et Medellín, Cali se trouve au sud-ouest du pays à environ 400 kilomètres de la capitale. La capitale mondiale de la salsa et de la lulada, spécialité locale, trône à environ 1000 mètres d’altitude, a donc un climat chaud, autour des trente degrés, avec un soleil qui tape bien. Idéal pour passer un week-end où vous pourrez monter au Cristo Rey avec sa vue incroyable sur la ville ou manger à San Antonio, le quartier colonial de la ville qui offre aussi une belle vue sur la cité. Avec en prime un aéroport au milieu des champs de canne à sucre, le décor est assez dépaysant quand on vient d’une grande ville. Point négatif néanmoins, l’aéroport se trouve assez loin de la ville, rejoindre le centre vous demandant ainsi près de trois quart d’heure. Près de l’aéroport en plus des champs de canne à sucre, vous verrez également le stade du Deportivo Cali (c’est pour ça qu’on conseille d’aller voir ce match quand l’América reçoit).

Ce week-end se tenait donc la journée des clásicos, organisée par la DIMAYOR (l’entité qui gère le football professionnel en Colombie) pour offrir donc des affrontements entre clubs d’une même ville ou d’une même région (comme si en Ligue 1 on rajoutait une journée avec des Metz/Strasbourg, Lens/Lille, Lyon/Saint-Étienne, …). Pour Cali, c’était donc l’occasion de donner lieu au 294e clásico vallecaucano entre l’América et le Deportivo Cali, deux équipes qui ne passent pas par leur meilleur moment et qui luttent pour accrocher le bon wagon dans ce deuxième semestre. Pour le prix des places, comptez entre 23.000 pesos (environ 5€) avec les barras donc à faire seulement si vous avez un contact et 80.000 pesos (un peu moins de 20€) pour les plus chères, tarif abordable même pour un salaire colombien (le salaire minimum est de 908.000 pesos). Pourquoi ce match s’appelle « clásico vallecaucano » (du nom du département où se trouve Cali) et non « clásico caleño » ? Comme l’explique Mayra Meneses, journaliste pour Impacto Deportivo, « En réalité, on l’appelle aussi clásico caleño ou clásico del Occidente mais en général les personnes l’appellent clásico vallecaucano. Ce sont les deux équipes les plus fortes, traditionnelles, populaires du département pour leur histoire, leurs luttes pour les titres, pour les supporters et leurs chants provocateurs pour le voisin. » Niveau sanitaire, l’América a annoncé que les tests PCR n’étaient pas acceptés et que seul le carnet de vaccination à jour permettait l’entrée. Direction donc le Pascual Guerrero, situé en pleine ville, avec, comme accès le plus simple, la Calle 5, la colonne vertébrale de la ville. Privilégiez le taxi, ou autres applications, moyen simple et pas très cher pour se déplacer. Évidemment un peu de trafic en début d’après-midi aux alentours du stade, mais rien ne fasse arriver en retard pour le coup d’envoi. Paradoxalement autour du stade l’ambiance est assez calme avec une présence policière importante. Peut-être à cause de l’heure peu habituelle, avec un coup d’envoi à 16 heures. À noter que la présence des supporters du Deportivo Cali n’était pas autorisée et que seulement 75% de la capacité du stade était ouverte au public en raison de la pandémie.

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Mais l’ambiance est là. Dès l’échauffement Teófilo Gutiérrez, capitaine du Deportivo Cali, s’est fait insulter de tous les noms. Un échauffement au cours duquel les supporters ont sorti une immense bâche en hommage à Antony de Ávila, légende du club avec près de cinq cents matchs entre 1982 et 2009, année où il est revenu à plus de quarante-cinq ans. « El Pitufo » avait d’ailleurs marqué dans un clásico vallecaucano après son retour et est devenu le plus vieux joueur à marquer dans un match entre les deux tout en étant le meilleur buteur de l’histoire de ce clásico. Mais si la bâche était de sortie c’était surtout pour apporter un soutien au joueur actuellement détenu en Italie pour trafic de drogue. Assez vide, la tribune sud, celle de la barra, s’est remplie au tout dernier moment, en même temps que l’entrée des joueurs. Point particulier, si à Bogotá et à Medellín les hymnes locaux sont plus chantés que l’hymne national, au Pascual ni l’un ni l’autre ne sont repris. Pour Mayra Meneses pas de raison particulière « c’est une des choses qu’on n’explique pas, mais c’est la réalité. Il n’y a pas de régionalisme aussi fort autant au Pascual qu’au stade du Deportivo Cali. Si on devait le chanter ce serait dans les tribunes orientales et occidentales et dans ces tribunes s'ils le chantent, c’est tout bas. Ils se mettent debout pour le respecter, mais ça ne va pas plus loin. Et pour les supporters du Barón Sur Rojo ce qu’on voit et ce qu’on entend ce sont des chants et ils veulent mettre la pression sur le rival. »  

Voilà pour le contexte. Sur le terrain comme on peut s’attendre pour ce genre de match, le choc est très engagé avec peu d’occasions. Quelques frappes de loin côté Deportivo Cali mais pas de quoi inquiéter Diego Novoa, le portier de l’América. À huit minutes de la pause, le volcan représenté par la tribune sud explose quand le coup-franc de Deinner Quiñones a trouvé la tête de Larry Angulo pour l’ouverture du score. Après la pause Teófilo Gutiérrez pense avoir remis les deux équipes à égalité mais le VAR indique à l’arbitre central qu’une faute avait été commise au préalable. Une action fêtée comme un but au sein d’un Pascual en feu. Mieux dans cette seconde période, le Deportivo Cali revient à dix minutes de la fin grâce à un pénalty transformé par Harold Preciado, enfant du club « azucarero ». La veille du match, Bastien Rodriguez, analyste vidéo pour l'América m'a raconté que lors de ses déplacements au stade du Deportivo Cali, il demandait toujours une escorte policière. Un peu surpris, j'ai compris pourquoi. Après le but d'Harold Preciado, certains membres du staff du Deportivo Cali, placés dans une cabine juste derrière ma tribune, ont laissé éclater leur joie de manière véhémente. Joie qui a profondément déplu quelques supporters qui ont voulu en découdre directement avec eux. Suffisant en tout cas pour que la police intervienne et fasse le ménage dans la tribune. 

Au final score assez logique et match assez décevant. Ce résultat au passage ne sert aucune des deux équipes qui ne sont pas dans les places qualificatives à six journées de la fin. Pari risqué notamment pour le Deportivo Cali qui a décidé de tout miser sur la Coupe où ils joueront leur demi-finale retour dans la semaine sur la pelouse de l’Atlético Nacional (2/2 à l’aller). Un Atlético Nacional qui sera le prochain adversaire de l’América en championnat pour un clásico bien plus important que celui contre le voisin comme l’explique Mayra Meneses : « Contre Cali c’est le clásico le plus important de la région. Mais au niveau national le clásico le plus important pour les supporters c’est contre l’Atlético Nacional pour la rivalité entre « verdolagas » et « americanos ». La popularité générée par ces deux équipes marque beaucoup, encore plus aujourd’hui avec les succès de l’Atlético Nacional qui génèrent beaucoup de tension ».  Un clásico qui sera certainement cher à Juan Carlos Osorio, l’entraineur de l’América et passé par l’Atlético Nacional

 

Pierre Gerbeaud
Pierre Gerbeaud
Rédacteur Colombie pour Lucarne Opposée