Il aura fallu une percée individuelle en toute fin de match pour que le Mexique vienne à bout de Panamá au terme d’une finale que le Tri n’a pas grandement maîtrisée. Qu’importe, le Mexique décroche sa neuvième Gold Cup et relance sa dynamique.

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La Gold Cup est à revivre sur Kick !

Première minute de jeu. Adalberto Carrasquilla est servi dans le rond central et ajuste une ouverture millimétrée de l’extérieur du pied pour Ismael Díaz. Le numéro 11 panaméen file seul au but mais ne parvient pas à bien contrôler son ballon et se fait reprendre par Montes. 89e minute, après un corner canalero, Orbelín Pineda sert Santi Gimémez dans le rond central. Entré en jeu quelques minutes auparavant, l’avant-centre parvient à enrouler son défenseur, file au but et ajuste Orlando Mosquera pour ouvrir la marque. S’il est possible de résumer un match en deux actions symboliques, ces deux moments sont parfaits. D’une immense occasion à une punition finale, Panamá a ainsi vu ses rêves d’histoire s’envoler dans les ultimes instants d’une rencontre qu’il a longtemps dominée.

Car entre ces deux moments, on aura surtout vu du blanc dans un SoFi Stadium plein à craquer. Plus cohérent, emmené par le meilleur joueur du tournoi, Adalberto Carrasquilla, les hommes de Thomas Christiansen ont souvent porté le danger sur les cages de Memo Ochoa, mais ont tout autant failli dans la justesse nécessaire à transformer danger en véritable occasion. Conséquence, Ochoa n’a pas eu à briller outre mesure même si à quelques reprises il a eu quelques frayeurs. De son côté, le Tri a su montrer qu’il savait être redoutable à défaut d’être clinique. Le premier avertissement est venu peu après la demi-heure, lorsque Henry Martín ouvrait la marque sur la première véritable occasion des hommes de Jaime Lozano, but ensuite refusé au VAR pour hors-jeu au tout début de l’action. La deuxième sur la double parade de Mosquera devant Pineda et Martín dix minutes plus tard. Deux avertissements non reçus. Car Panamá se créait des situations, mais ne cadrait jamais : Godoy en fin de premier acte, Quintero d’entrée de deuxième alors qu’il était seul au second poteau, Díaz à l’entrée du dernier quart d’heure ou encore Bárcenas deux minutes avant le but de Giménez. C’est ici que réside encore la différence entre ces deux formations. Le Mexique n’a pas véritablement contrôlé la rencontre mais a su la gérer dans son ensemble (à défaut de la maîtriser), laissant Panamá s’épuiser pour mieux finir. Il décroche ainsi sa neuvième Gold Cup (en dix-sept éditions) et peut enfin laisser derrière lui le dernier cycle pour commencer à se projeter sur 2026. Mais ne devra pas oublier que l’écart se resserre plus que jamais.

Le bilan

Nous l’évoquions hier lors du live organisé à cette occasion, il est difficile d’établir une image réelle de l’état de la zone CONCACAF en s’appuyant sur cette Gold Cup. Certes, le Mexique, toujours favori de l’épreuve, s’est tout de même rassuré en retrouvant une certaine cohérence à défaut d’une flamboyance, on ne peut en effet pas nier que les décisions des deux sélections les plus au nord ont eu un impact sur le déroulement de l’épreuve. Vainqueurs de la Nations League avec leur équipe A, les États-Unis ont fait le choix d’une équipe B voire C qui permet certes de poursuivre une vaste opération d’observation des joueurs, mais qui n’a finalement pas permis d’aller s’imposer ou au moins se hisser en finale. On tirera ainsi sans aucun doute un constat d’échec eu égard au contenu que les Stars and Stripes ont proposé, tout en rappelant aussi – et ce n’est pas faute de le dire depuis des mois voire des années – que la marge du top 2, désormais vu comme un top 3 avec l’arrivée du Canada, ne fait que se réduire. Un Canada, unique vainqueur de l’épreuve hors du duo USA – Mexique, qui a lui aussi fait le choix d’envoyer une équipe bis, la gestion de l’intersaison (vacances et transferts) passant ainsi au-dessus des ambitions d’écrire l’histoire de la sélection. Et sans surprise, le Canada a été puni, sortant en quarts – ironie du destin sur son meilleur match – en n’ayant finalement pas démontré grand-chose. Mais surtout, le Canada, dont la fédération est au bord de l’implosion, doit bien garder à l’esprit qu’autant il a été parachuté troisième puissance de la zone grâce notamment à sa campagne d’éliminatoires, autant sa marge sur le groupe des prétendants est plus que réduite.

Photo: RINGO CHIU/AFP via Getty Images

C’est finalement dans ce groupe que l’on peut tirer le plus de conclusion et avoir de réels motifs d’espoir. Finaliste, Panamá a démontré que le travail mené depuis 2018 portait ses fruits. Les Canaleros ont mis quelques mois à digérer la première expérience mondiale, à renouvelle en grande partie une génération considérée alors comme dorée et ont surtout mis en place une dynamique nationale qui fonctionne (victoire au Revello, finale de Gold Cup, première Coupe du Monde féminine). Panamá fait surtout figure de quatrième puissance de la zone – voire de troisième à terme si les dynamiques se poursuivent ainsi – notamment au moment où ce virage de la construction n’a pas été entamé au Costa Rica. Les Ticos ont parfois montré qu’ils pouvaient produire du jeu, s’appuyer sur une jeunesse plus qu’intéressante lors des derniers matchs des éliminatoires, depuis Luis Fernando Suárez n’a cessé de faire de sa sélection une simple équipe de contre totalement repliée sur elle et faite pour subir. Il suffirait aux Ticos de s’inspirer du modèle panaméen pour franchir un cap, reste à savoir si l’actuel sélectionneur colombien en est capable ou s’il ne faudrait pas le remplacer. D’autant que derrière, la reconstruction est véritablement entamée en Jamaïque. Sous la direction d’Heimir Hallgrímsson, les Reggae Boyz ont une véritable feuille de route, ils ont su s’y tenir à la lettre, même si on regrettera l’entame manquée face au Mexique en demi-finales et le manque de jus pour retourner la rencontre. Les mois à venir, notamment la prochaine Nations League qui se jouera d’abord sans USA, Mexique, Canada et Costa Rica, seront déterminants pour voir si cette feuille de route est toujours respectée, d’autant que la concurrence qui s’annonce dans le groupe n’est pas des plus relevée. Une présence en quarts de l’épreuve sera synonyme d’une réelle nouvelle dynamique.

Derrière ce groupe de trois équipes qui semble se dessiner, quelle place pour les autres membres de la zone. Du côté du Honduras, le constat d’échec est là, il aura au moins permis de remettre les choses à plat. Les Catrachos ont certes réussi un coup, celui de sortir Haïti de l’épreuve en s’imposant lors de l’ultime journée, mais pour le reste, entre les conflits internes d’avant compétition et de grand ménage annoncé, cela ne s’est pas véritablement traduit dans le jeu même si la H a eu ses moments, notamment portée par un Alberth Elis quelque peu retrouvé, ou tout du moins très concerné. Il faut donc de nouveau tout reconstruire, chose qui semble désormais promise puisque Reinaldo Rueda revient à la tête d’une sélection qu’il fait briller entre 2007 et 2010, la ramenant notamment à la Coupe du Monde. Reste désormais à voir si les écartés de la Gold Cup retrouveront une place. Autre déception, Haïti. Les Grenadiers avaient parfaitement entamé leur compétition, s’imposant sur le fil mais de manière logique face au Qatar, ils ont ensuite tout perdu lors du dernier match face au Honduras, terminant même derniers de leur groupe. On attendait évidemment plus et Gabriel Calderón ne sort pas renforcé de cette Gold Cup.

Photo : Erik Williams-USA TODAY Sports/Sipa USA - Photo by Icon sport

Du côté de l’Amérique centrale, si le Salvador n’avait rien promis avant cette Gold Cup, il a tenu parole, continuant d’errer sans véritable objectif dans cette zone, le coup de fraîcheur est donc venu du Guatemala. Exclue de toute compétition internationale pendant sa suspension par la FIFA, la Bicolor était déjà revenue en 2021, la version 2023 de Luis Fernando Tena a confirmé qu’elle était sur le bon chemin, portée par une magnifique foule. On imaginait les Chapines venir jouer le rôle de la surprise de leur groupe, ils ont répondu en offrant notamment le match le plus fou de l’édition 2023 face à la Guadeloupe qui a permis aux coéquipiers de l’excellent Nicholas Hagen, l’un des meilleurs gardiens de cette Gold Cup, et de l’indispensable Rubio Rubin de se hisser en quarts, perdant d’un rien face à la Jamaïque. Là encore, la prochaine Nations League s’annonce porteuse d’espoirs pour ce Guatemala que Tena a remis sur les bons rails.

Du côté de l’outremer, le bilan de la Martinique et de la Guadeloupe est assez similaire et peut aussi être teinté par la fatigue avançant au fil des matchs pour deux sélections qui avaient dû passer par des barrages une semaine avant l’épreuve. Les deux formations ont ainsi quitté la compétition sur deux matchs totalement dingues alors qu’il leur suffisait d’un nul pour se hisser en quarts (défaite 4-6 pour les Matinino face au Costa Rica, défaite 3-2 pour les Gwada Boys face au Guatemala). Toutes deux ont tout de même montré leurs qualités, surtout sur le plan offensif et si les Matinino peuvent espérer refaire un coup en Nations League, la Guadeloupe devra quant à elle aller chercher une promotion en Ligue A qui semble loin d’être inaccessible étant donné son groupe.

Laissons enfin de côté Trinidad y Tobago et Saint Kitts and Nevis, véritablement pas au niveau, écartons aussi une sélection cubaine qui a beau chercher à s’ouvrir mais continue d’être plombée par les désertions, pour nous pencher sur le cas du Qatar, l’invité sponsor de l’épreuve. On avait déjà quelques doutes sur la profondeur du projet, désormais porté par Carlos Queiroz. Ils sont confirmés par le « jeu » produit par cette sélection qui s’est retrouvée en quarts sur un miracle et n’a pas montré grand-chose d’intéressant. La prochaine Coupe d’Asie devrait permettre d’en savoir plus sur la volonté du pays de poursuivre la croissance de sa sélection, mais les signaux sont pour l’instant loin d’être au vert.

Enfin, pour clore ce bilan et cette Gold Cup 2023, rappelons que Memo Ochoa, recordman des titres dans cette épreuve (cinq) et nommé meilleur gardien du tournoi alors qu’il n’a même pas fait dix arrêts sur l’ensemble du tournoi (huit en six matchs pour être précis), Jesús Ferreira en est le meilleur buteur, l’immense Adalberto Carrasquilla est cependant logiquement élu meilleur joueur. Du côté des sélections, notons que les USA décrochent tout de même un titre : celui du fairplay. Sans doute un hommage à Matt Miazga. Autre décision amusante : le joueur de la finale est Santiago Giménez, qui n'a joué qu’une dizaine de minutes (en comptant le temps additionnel). Les charmes de la CONCACAF…

 

 

 

Photo une : Ronald Martinez/Getty Images

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.