L’heure des choses sérieuses a sonné en Amérique Latine avec l’ouverture de la phase de groupe de la 57ème édition de la plus belle des compétitions de club. Radioscopie, groupe par groupe. Première partie, les groupes 1 à 4.

Ils sont désormais 32 à se lancer à l’assaut du plus grand défi du continent, décrocher la 57e Copa Libertadores de l’histoire et ainsi succéder à River Plate (lire Copa Libertadores 2015 : la resurrección del mas grande). 32 équipes réparties ainsi eh huit groupes de quatre dont les deux premiers auront l’honneur de se lancer dans le sprint final des huitièmes de finale. A l’heure du grand départ, il est temps de présenter chaque groupe.

Qui dit groupe 1, dit groupe du tenant du titre (aucun lien en fait au cas où vous auriez eu le moindre doute). River Plate, vainqueur de la Sudamericana 2014 et de la Libertadores 2015 se lance donc à l’assaut d’une nouvelle compétition continentale, poursuivant le rêve fou d’un doublé que le club n’a jamais réalisé. Après l’échec en Sudamericana 2015, la première élimination continentale de l’ère Marcelo Gallardo, c’est donc un nouveau River Plate qui se présente pour cette épreuve. Enfin presque. Car si les départs de joueurs comme Matías Kranevitter ou  Carlos Sánchez, tellement décisif dans les moments clés, seront de vraies pertes, le Millo a fait appel à l’expérience avec notamment le retour d’Andres D’Alessandro ou l’arrivée d’Iván Alonso mais s’appuiera aussi sur le talent d’un Nico Domingo ou d’un Nacho Fernández pour combler le vide laissé au milieu. Le tenant du titre reste donc un prétendant à la victoire finale.

Il faudra cependant se défaire d’un adversaire redoutable, son principal rival du groupe, São Paulo. Auteur d’un premier tour des plus sérieux et convaincant, le Tricolor est désormais dirigé par un homme habitué aux succès continentaux, Edgardo Bauza. Certes la légende Rogerio Ceni s’en est allée, certes le buteur Luis Fabiano est parti faire trembler les filets asiatiques, mais le club brésilien a rappelé une autre idole pour guider ses ouailles, Diego Lugano. L’uruguayen n’est pas la seule arrivée notable. Car entre Eugenio Mena et surtout la pépite Jonathan Calleri, le groupe pauliste reste l’un des plus solides du continent. Le tout entre les mains d’un coach déjà doublement titré avec deux équipes différentes, l’association s’annonce des plus menaçantes.

D’autant que le groupe 1 semble promis aux deux géants. Car face aux monstres brésiliens et argentins, on imagine mal voir The Strongest et Trujillanos, représentants de deux pays dont le football est en crise, venir véritablement jouer les empêcheurs de tourner en rond. Reste que la présence des Tigres permettra de suivre les légendes Daniel Vaca et Pablo Escobar, le talentueux international Alejandro Chumacero ou encore la machine à but Carlos Neumann. Elle sera aussi l’occasion pour Iván de retrouver son petit frère Matías Alonso, tout juste arrivé d’Uruguay. Côté vénézuéliens, après un Apertura 2014 soufflé au nez et à la barbe de La Guaira, les lendemains ont été des plus difficiles. 11e du Clausura, perdant la finale du championnat d’un but, les Guerreros de la Montaña n’ont même pas accédé à la dernière Liguilla et semblent toujours à la peine, leur début de championnat restant encore des plus mitigés.

Le groupe 2 s’annonce en revanche des plus musclés, composé d’anciens vainqueurs toujours ambitieux comme le Nacional et Palmeiras et d’outsiders qui s’annoncent plus redoutables que prévu Central et River Plate. Côté Bolso, le titre uruguayen décroché l’an passé a permis de sauver deux derniers tournois perdus face à l’éternel rival Peñarol. Le départ d’Iván Alonso comblé par le retour de l’enfant prodige Nicolás López (même si on surveillera aussi avec attention le jeune Kevin Ramírez), l’arrière garde renforcée par l’excellent Erick Cabaco et le retour au pays de « l’ancien » Mauricio Victorino, le Nacional a les armes suffisantes pour prétendre aux huitièmes de finale. Malheureusement pour le Bolso, la concurrence est rude. Face à eux donc, se dresse notamment Palmeiras. Arrachant sa place au prix d’une victoire en Coupe du Brésil, le Verdão s’appuie sur un groupe solide au sein duquel Lucas Barrios continue d’apporter ses talents de buteur et surtout est entre les mains d’un Marcelo Oliveira qui avait fait de Cruzeiro une machine à victoire et qui, lors de sa carrière de joueur était passé par le Nacional. Reste que le danger pourrait à nouveau venir d’Argentine. Car avec le retour de Central en Libertadores après 10 ans d’absence, le peuple Canallas veut croire à un nouveau chapitre glorieux de l’histoire du club de Rosario. Revitalisé par Eduardo Coudet, qui a transformé le jeu de Central, emmené par un Marco Ruben redevenu le buteur létal qu’il était, poussé par l’un des public les plus chauds d’Argentine, Central a en effet tout du parfait outsider et s’annonce des plus compliqué à bouger, Coudet n’ayant perdu que 4 des 36 parties qu’il a dirigé depuis le banc Canallas. De quoi rendre le groupe des plus difficiles donc.

Surtout que le quatrième larron n’a rien d’une victime expiatoire. Certes le River Plate uruguayen découvre la Libertadores pour la première fois de son histoire mais les Darseneros du aussi fou que génial JR Carrasco ont déjà montré lors du premier tour que le déficit d’expérience de ce niveau n’était que théorique en donnant une leçon tactique à l’ambitieuse Universidad de Chile. Deuxième meilleure attaque de dernier tournoi uruguayen (à un but du…Nacional), emmené par les magnifiques Michael Santos et Nicolás Schiappacasse a le profil idéal de la surprise (à l’image d’un Guaraní 2015).

Si la mission de The Strongest s’annonce délicate dans le groupe 1, que dire de celle de Bolívar dans le groupe 3 ? Demi-finaliste 2014, La Academia de Juanmi Callejón s’apprête à énormément souffrir dans un groupe composé de deux géants argentins et d’une nouvelle génération colombienne. Car face aux boliviens se dressent deux monstres, le Racing et Boca. Alors certes le début d’année est des plus compliqué pour les Xeneizes mais la simple présence de Boca en Libertadores suffit à en faire un favori légitime de l’épreuve. Nul besoin de passer en revue un effectif d’une qualité rare, mélange de pépites comme Marcelo Meli, de talents comme Nico Lodeiro ou Franck Fabra, d’expérience comme celle d’Agustín Orion ou de Fernando Gago et de menaces permanente que sont des Carlos Tevez et autres Dani Osvaldo, Boca reste un ogre capable de tout dévorer sur le plan continental surtout quand l’objectif du club est de rejoindre Independiente en tête du palmarès de l’épreuve.

Si le Rojo est absent côté argentin, son meilleur ennemi revient pour une deuxième saison (il est d’ailleurs présent après avoir éliminé Independiente en Liguilla argentine – lire Argentine – Primera Division 2015 : derniers billets continentaux). Eliminé par la surprise Guaraní en quart de finale l’an passé (lire Racing 0 - 0 Guaraní), le Racing a certes changé d’entraîneur, il n’a rien perdu en qualité. Le duo Milito – Bou est toujours présent devant, désormais appuyé par un Óscar Romero qui a trouvé sa vitesse de croisière et renforcé par le retour de prêt de l’excellent Roger Martínez et les retours à la maison du duo Lisandro López – Rodrigo de Paul. Autant dire que La Academia dispose d’une puissance offensive qui en fait un prétendant naturel. Mais avant d’envisager offrir le groupe 3 au duo argentin, il faudra d’abord se méfier du Deportivo Cali. El Verde n’a bien évidemment pas l’expérience des autres membres du groupe mais dispose dans ses rangs d’une multitude de jeunes pépites colombiennes, que le duo Harold Preciado – Rafael Santos Borré symbolise à a perfection, qui pourrait faire du club colombien un belle surprise. Reste à savoir comment ce groupe plutôt jeune parviendra à gérer le stress d’une telle compétition mais le danger est réel pour le duo argentin.

Autre « verts » colombiens, les Verdolagas de l’Atlético Nacional ont quant à eux bien plus d’ambition que le Deportivo Cali. Propulsés dans le groupe 4, les hommes de Reinaldo Rueda ont survolé le dernier tournoi colombien et s’annoncent comme l’un des grands outsiders de l’épreuve (pour tout dire, on les voit bien si hisser au minimum dans le dernier carré). Vainqueur de leur groupe l’an passé après avoir atteint notamment la finale de la Sudamericana 2014 (lire Sudamericana : River écrase la finale), le vainqueur de l’édition 1989 s’annonce des plus compliqués à jouer tant il s’appuie sur une défense quasi imperméable et sait faire preuve d’une efficacité redoutable. Quand vous comptez dans votre effectif un trio Alexander Mejía – Macnelly Torres – Victor Ibarbo, vous partez tout de même avec quelques certitudes.

Au palmarès des ultra-ambitieux s’il en est un qui a un place toute particulière cette année, c’est bien Peñarol. Pour le retour de Diego Forlán en Libertadores, les Carboneros n’ont qu’un rêve, que leur nouveau stade (qui ouvrira en mars prochain) soit le théâtre d’une épopée digne de celle de 2011 qui les avait vus tomber en finale face au Santos d’un intouchable Neymar (lire Les dignes héritiers). Toute la question sera de savoir comment le groupe aurinegro aura digéré une intersaison des plus animées. Surtout que les deux autres membres du groupe 4 vont être autant de pièges potentiels. Vice-champion du Pérou, le Sporting Cristal de la légende Carlos Lobatón court après ses rêves de gloire d’une finale disputée il y a près de 20 ans époque de la bande à Nolberto Solano. Si on peut regretter de ne plus voir la pépite Beto da Silva, parti (trop tôt) en Europe, on suivra avec une attention particulière la formation du jeune Mariano Soso, élevé à l’école Bielsa au sein des équipes de jeune de Newell’s puis aux côtés de Claudio Vivas et de Javier Torrente. Reste enfin le champion du monde des imprévisibles, Huracán. Après une année 2015 à jouer aux montagnes russes, entre un sauvetage sur le fil en championnat et une finale de Sudamericana perdue aux tirs au but (lire Copa Sudamericana 2015 : Santa Fe, el primer campeón), le Globo sera une fois encore le plus imprévisible et s’annonce comme un véritable cadeau empoisonné pour les autres membres du groupe qui vont une fois encore devoir bloquer l’unique Wanchope Ábila. On leur souhaite bien du courage. 

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.