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Comme pratiquement tous les week-ends LO vous fait vivre un match en inside depuis le continent sud-américain. Ce week-end nous ne sommes pas allés voir n'importe quel club, pas dans n'importe quel stade, pas dans n'importe quelle tribune... Nous étions au Nuevo Gasometro de San Lorenzo dans la Popular

San Lorenzo, l’une des meilleures hinchada du pays voire du Monde, l'institution si chère au Pape François, le dernier vainqueur de la Copa Libertadores (voir Enfin parmi les grands), recevait Estudiantes de La Plata en guise d'au revoir avant de s'envoler vers le Maroc pour la Coupe du Monde des clubs. Tel était notre programme du week-end.

C'est deux heures avant le match, sur la Place Constitution, que l'on embarque dans un bus direction le quartier mal famé de Bajo Flores où se trouve le stade Pedro Bidegain de San Lorenzo. De nombreux hinchas de San Lorenzo se sont entassés dans le bus et les discussions aussi folkloriques que chauvines vont bon train. « On s'en cogne du match d'aujourd'hui, moi je pense juste à comment on va baiser le Real Madrid le 20 Décembre prochain au Maroc » lance tout d'abord un Cuervo (Corbeau, surnom des fans de San Lorenzo) avant qu'un autre ne surenchérisse « T'as raison, mais si on pouvait leur mettre une branlée à Estudiantes pour notre dernier match à domicile et leur faire payer le fait qu'on a pas pu fêter notre titre chez nous l'année dernière ça m'ira très bien » (San Lorenzo avait été sacré Champion sur le terrain de Velez lors de la dernière journée du Tournoi de Clôture 2013 après le nul 0-0 face à l'Estudiantes à domicile lors de l'avant dernière journée (voir Argentine : San Lorenzo dans la douleur). Bref, vous l'avez compris, toutes les têtes sont déjà à la Coupe du Monde des clubs et à l'hypothétique finale face au Real Madrid. Il faut dire qu'avant la rencontre, l'affiche est loin d'être sexy et d'attiser toute les passions, San Lorenzo pointe à la quinzième place alors qu'Estudiantes est quant à lui sixième mais écarté de la course au titre. Mais comme l'a dit si poétiquement notre compère désormais gentiment installé au fond du bus avec une bière à la main « On s'en cogne » l'important n'est pas vraiment la rencontre en elle-même, mais plutôt de savoir comment va se comporter l'équipe d'Edgardo Bauza pour la dernière devant son public et d'admirer l'ambiance que nous réserve la hinchada de San Lorenzo pour cette occasion. Durant le trajet, nous passons dans Parque Patricios, le quartier du plus grand rival Huracan récent vainqueur de la Coupe d'Argentine et donc qualifié en Copa Libertadores, cela redonne de l'inspiration à notre collègue du fond du bus qui vient de terminer sa Quilmes (Bière argentine) pour quelques vers de poésie supplémentaire « Globo Boton! Me dicen el matador, naci en boedo y todo parque patricios me chupa un huevo, cada vez te falta menos al bajo vas a venir, cada vez te falta menos para morir » (On vous épargne la traduction) repris volontiers en cœur par tous les fans Azulgranas.

La Coupe du Monde des clubs dans tous les esprits

Après cette déclaration d'amour envers le club formateur de Javier Pastore, nous arrivons au Nuevo Gasometro « Regarde comment c'est beau. Il n'y a aucun enjeu mais tout le peuple de Boedo est là pour encourager nos joueurs avant d'écrire une nouvelle page de notre histoire au Maroc. Oui, moi j'y crois, quand tu vois d'où on revient on peut ramener la Coupe du Monde ici. » dit un vendeur de Choripan à l'entrée du stade. Difficile de lui donner tort quand on sait qu'il y a seulement 3 ans El Ciclon luttait pour son maintien. Depuis tout va mieux à Boedo (Quartier du club de San Lorenzo), en marchant vers la Popular, Juan, bob azulgrana sur la tête, chemisette et un peu trapu, se remémore ces années de galère « On s'est maintenu de peu en match de barrages face à Instituto de Cordoba en 2011 sous les ordres de l’auto-proclamé « Mourinho argentin », Ricardo Caruso Lombardi. Et à partir de ce moment précis tout s'est s’enchaîné pour nous. Juan Antonio Pizzi, qui est actuellement entraîneur de Valence, a entamé un gros chantier au sein de notre effectif en lançant de jeunes talents comme Correa ou encore Buffarini en combinant avec l’expérience de Piatti et de Mauro Cetto entre autres. On a ensuite vécu une saison historique que les plus superstitieux attribueront à la nomination à la tête du Vatican de notre socio le plus célèbre, le pape François. Après le retour officiel dans notre stade et notre quartier originel du Bodeo, on va chuter en finale de Coupe d’Argentine face à Arsenal de Sarandi, seul point noir de cette année 2013 qui se conclut par un titre de champion d’Argentine et qui nous ouvre donc les portes de cette Copa Libertadores 2014 que nous avons remportée. Aujourd'hui on va certainement jouer le Real Madrid en finale de la Coupe du Monde des clubs, tu imagines ça ? ». Après ce moment de nostalgie, nous entrons dans ce virage si mythique pour prendre place. Les premiers chants commencent à résonner quand toutes les sections du club, natation, boxe, handball etc... (San Lorenzo étant un club omnisports) se permettent un tour d'honneur pour soutenir les joueurs avant le départ au Maroc. Ne manquait plus que le soutien de la Barra Brava du club, La Gloriosa, qui entre dans un énorme chaos, tambours, pots de fumées et chant détonnant sont de sortis. Les 22 acteurs peuvent faire leur entrée sur le terrain…

« Vamos a volver a Boedo » (Nous allons revenir à Boedo)

Les joueurs de San Lorenzo apparaissent avec un t-shirt et une banderole concernant la « Vuelta a Boedo » (voir L'héroïque combat de San Lorenzo contre Carrefour et la dictature) et donnent le coup d'envoi de la rencontre. Pour tout vous dire, on s'ennuie ferme en ce début de rencontre et même si Buffarini et Veron combinent bien sur le côté droit de San Lorenzo posant beaucoup de problème à la défense d'Estudiantes, aucune occasion franche n'est à se mettre sous la dent. De son côté le club de La Plata est méconnaissable et est bien loin de son niveau de jeu habituel qui a notamment empêché le River Plate de Gallardo de battre le record historique du club du nombre de matchs sans défaites (voir Argentine : Olimpo relance tout).  Heureusement la hinchada de San Lorenzo nous assure un superbe spectacle en tribune. Le très riche répertoire des fans Azulgranas est de sortie et les chants comme « Soy de San Lorenzo si senor » (Je suis de San Lorenzo, oui Monsieur) ou encore « Dicen que estamos todos de la cabeza » (Ils disent qu'on est tous cinglés) nous rappellent qu'ils proviennent des esprits musicaux venant de Boedo inspiré des plus grands comme José Betinoti, Homero Manzi (La légende prétend que le tanguero Homero Manzi aurait composé le fameux morceau “Sur” dans l’ancien “Café del Aeroplano”, situé à l’angle de San Juan et de l’avenue Boedo), Jose Gonzalez, Castillo, Catulo mais aussi de Piana. On trouve aussi dans les paroles la touche poétique de nombreux littéraires du « Grupo de Boedo » (entre politique et littérature sociale, le Groupe Boedo était composé de jeunes écrivains prolétaires dirigés par Antonio Zamora dans les années 1920). Une inspiration que tous ces artistes, puis ces supporters ont été cherchés dans les rues de ce quartier si typique. Même un certain Diego Armando Maradona avait déclaré à l'époque à quelques journalistes dans la Bombonera après un Boca Juniors – San Lorenzo « San Lorenzo possède la hinchada la plus créative et ingénieuse » et cela se vérifie encore aujourd'hui. Nous sommes désormais à la 35ème et toujours rien d'excitant sur le terrain, c'est le moment que choisi La Gloriosa pour passer la seconde et entonner un air sur leur combat et le retour de leur stade à Boedo d'une puissance incroyable.

Cela donne des ailes au Ciclon, mais la défense d'Estudiantes tient le coup jusqu'à la pause dans une ambiance qui ne retombera pas.

« Queremos la Copa del Mundo » (On veut la Coupe du Monde)

Début du deuxième acte et Los Azulgranas, qui n’avaient pas réussi à transpercer la défense platense, se voient bénéficier d'un pénalty dès la 49ème minute suite à une erreur de l'arbitre assistant Ariel Scime, qui indique à l'arbitre Juan Paul Pompei, qui avait indiqué coup-franc dans un premier temps, que la faute de Leandro Desábato sur Enzo Kalinski est à l'intérieur de la surface. Il n'en fallait pas moins pour que la folie se ré-empare des fans de San Lorenzo. Et quand on parle de penalty à San Lorenzo, on parle forcément de Nestor Ortigoza, un spécialiste en la matière, qui gamin misait son argent lors des concours de penaltys dans les quartiers populaire de Buenos Aires. « El Gordo » (Le gros) exécute la sentence d'un ballon à ras de terre côté droit d'Agustín Silva. 1-0, et l'on se dit qu'il fallait bien cela pour lancer cette rencontre. L'unique situation dangereuse d'Estudiantes vient cinq minutes plus tard quand Sebastián Prediger s'impose de la tête mais Sebastián Torrico, portier de San Lorenzo, veille. Vient alors l'entrée de Mauro Matos à la place de Cauteruccio, ce dernier est ovationné et mettra dix petites minutes à se mettre en évidence pour doubler la mise d'une belle frappe en dehors de la surface à ras du sol. On vous laisse profiter de l'ambiance…

Plus rien ne semble pouvoir arrêter El Ciclon, surtout quand huit minutes plus tard Monsieur Pompei accorde un nouveau penalty, cette fois ci sans contestation possible, suite à une faute de Matías Aguirregaray sur Pablo Barrientos. Comme d'habitude, Ortigoza est de nouveau le premier à demander le ballon pour le mettre cette fois-ci côté gauche en force alors que Silva était parti sur la droite. « On lui fait pas à Gordo » s'amuse un hincha sourire jusqu'aux oreilles. 3-0 et les « olé olé olé olé Gordo, Gordo » résonnent dans le Nuevo Gasometro. D'un seul coup, le ciel de Buenos Aires noircit et en devient inquiétant. On pourrait se croire en pleine éclipse solaire « 3-0, c'est le retour du Ciclon ! » s'exclame un fan. Ce dernier ne pensait pas si bien dire, un orage et des pluies torrentielles s’abattent sur le stade où l'on n’y voit désormais pratiquement plus rien. La réaction de la hinchada de San Lorenzo ? Tout le monde enlève son t-shirt et saute sur place « Que no salta es de Huracan » (Qui ne saute pas est d'Huracan) avant un surpuissant « Queremos la Copa del Mundo » (On veut la Coupe du Monde). L'ambiance devient complètement dingue et le quatrième but de Buffarini, auteur d'une très bonne rencontre, passe quasiment inaperçu.

« Il n'y a seulement qu'à San Lorenzo qu'on peut voir cela, on va la ramener la Coupe du Monde regardes cette hinchada putain ! On le mérite tellement... » nous lâche un fan de San Lorenzo autant trempé par les larmes qui lui coulent des yeux que par la pluie. Monsieur Pompei siffle la fin de la rencontre, malgré le déluge la hinchada reste en place avant de lancer un dernier chant « Ponga huevos, huevos San Lorenzo... ponga huevos, huevos sin cesar.....que en Marruecos cueste lo que cueste.... en Marruecos tenemos que ganar » (Pose tes couilles San Lorenzo, au Maroc nous devons gagner). Des chants qui se poursuivront dans toutes les rues adjacentes après la rencontre.

Pour San Lorenzo, qui jouera sa dernière journée à Vélez, cette goleada face à Estudiantes a été un au revoir idéal devant sa magnifique hinchada avant de voyager au Maroc pour disputer la compétition qu’il rêve de remporter depuis toujours. Certes, pas avec le même budget que le Real Madrid mais avec le cœur et la passion. Comme toujours en Argentine…