Mardi 12 février 2013

Nigéria

La CAN 2013 a pris fin ce dimanche avec le sacre du Nigéria. Si le pari osé de Stephen Keshi et la révélation des Etalons burkinabés sont autant d’éléments positifs, cette 29e édition laissera surtout de nombreux regrets.

Au moment d’entrer sur la pelouse du FNB Stadium de Johannesburg, les Super Eagles étaient passés du rang d’outsider à celui de grandissime favori. Ayant d’ores et déjà remporté son pari avant même la finale, Stephen Keshi avait fait de ses Super Eagles une véritable machine à succès mélange parfait de maîtrise collective et de créativité offensive. Les Etalons auront ainsi rapidement paru débordés. Privés de ballon, les hommes de Paul Put subissaient une énorme pression dès le coup d’envoi avant enfin de réagir par Bancé et Kaboré. Mais le Nigéria ne tremblait guère et allait frapper. Accélération de Moses, service pour Mba et le Nigéria ouvrait le score à quelques minutes de la pause. La seconde période allait permettre au Nigéria de contrôler tranquillement un Burkina peu inspiré et se procurer les meilleures occasions. Le duo Moses – Musa faisait souffrir l’arrière garde burkinabaise pendant que la défense nigériane s’évertuait à repousser les timides assauts des Etalons. Le Nigéria décroche son troisième titre au terme d’une finale où tout semblait joué d’avance et lors de laquelle le Burkina n’aura jamais réussi à installer ce brin de folie comme il l’avait si bien fait en demie. L’enjeu était sans doute trop fort.

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La veille, le Mali et le Ghana se retrouvaient pour la « petite » finale, remake de l’an passé. Et comme l’an passé, les Aigles auront pris le dessus sur les Black Stars. Une victoire 3-1 qui permet aux coéquipiers de Seydou Keita de conserver leur troisième place sur le continent.

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Ces deux dernières rencontres viennent ainsi conclure une CAN 2013 qui aura surtout déçu en tribunes et lors trop rares occasions surpris ou enchanté sur le terrain. Déçue car entre des stades quasi-vides (bien que d’après la CAF le record d’affluence soit battu avec plus de 25 000 spectateurs en moyenne – paradoxe africain sans doute) et des pelouses scandaleuses (voir par exemple l’indigne pelouse de Nelspruit pour la demi-finale Ghana – Burkina Faso) et les rencontres fermées, il aura souvent été difficile de s’enflammer. Certes les sensations que furent le Cap-Vert et le Burkina Faso auront égayé la compétition et, pour ces derniers, redonné une certaine noblesse au football africain notamment lors de cette demi-finale de légende face au Ghana, mais dans l’ensemble, on aura vu peu de jeu, peu de folie sur et autour des terrains.

Domination de l’Ouest, crise au Nord.

Reste que sur le terrain, le grand enseignement de cette édition 2013 aura été l’outrageante domination des pays de l’Ouest. Burkina Faso, Cap-Vert, Côte d’Ivoire, Ghana, Mali, Nigeria, Togo : sept des huit quart de finalistes venaient de l’Ouest pendant que le Nord s’enlisait. Alors que l’Egypte, pourtant grande nation du paysage africain (record de victoires), manquait sa deuxième CAN consécutive après 3 titres consécutifs, Algérie, Maroc et Tunisie n’auront jamais pu sauver l’honneur d’un football du Nord qui bénéficie pourtant de résultats plus que positifs au niveau de ses clubs (les deux dernières finales opposant des clubs du Nord, seul Mazembe est parvenu en inscrivant son nom au palmarès à interrompre quelque peu l’hégémonie du nord lors des huit dernières finales). L’heure est venue de trouver les raisons d’un tel naufrage : certains accuseront l’arrivée de coachs européens (polémique qu’alimentera Stephen Keshi), d’autre, le manque de discipline des joueurs. Reste qu’alors que la prochaine édition se tiendra au Maroc, l’Afrique du Nord doit surtout se mettre sérieusement au travail pour ne pas se laisser distancer par l’Ouest.

A l’Ouest, si le Nigéria retrouve son lustre d’antan, si le Mali et le Ghana confirment les espoirs placés en eux, la Côte d’Ivoire aura grandement déçu. Pour ce qui semble être la dernière CAN de sa génération dorée, les Eléphants ont pourtant généré de nombreux espoirs après avoir dominé un groupe annoncé « de la mort ». Sauf qu’une fois de plus, les ivoiriens ont pêché face à un collectif bien rodé que fut celui du Nigéria, prouvant sans aucun doute les limites de la génération Drogba. Reste que la fraîcheur, qui fut zambienne l’an passé, sera occidentale cette année avec les réjouissants parcours du Cap-Vert et du Burkina Faso. Le premier, plus petit pays à participer à la CAN, était arrivé tout auréolé d’une victoire face au Cameroun. Il aura finalement tenu ses promesses. Même son de cloche pour les Etalons qui avaient à cœur de se racheter d’un parcours 2012 raté. Et pour tous deux un point commun : du football typiquement africain. Engagement total, solidarité, générosité et surtout talent, technique et créativité, les deux bouffées d’oxygène de cette CAN auront offert les plus belles émotions de l’édition 2013.

Le champion 2013 quant à lui apparaît comme la parfaite synthèse de football africain et de rigueur à l’européenne. Un bloc défensif solide, mature, discipliné, un trio offensif aussi puissant que virevoltant, le Nigéria de Stephen Keshi n’aura eu de cesse d’imposer sa maîtrise. Avec la marge de progression qui lui reste, il pourrait être l’une des belles surprises africaines de la prochaine Coupe du Monde s’il parvient à se défaire de la redoutable campagne de qualification. Reste que la démission de son sélectionneur dans les heures qui ont suivi le succès en Afrique du Sud, laisse désormais place à l’incertitude.

Les joueurs : Pitroipa, Moses et les autres.

Que retenir des performances individuelles ? Les promesses d’Alain Traoré, absent de marque d’un Burkina finaliste, porté notamment par son capitaine Kaboré et qui aura vu l’éclosion d’Aristide Bancé ou de Mohamed Koffi mais surtout aura vu briller un Jonathan Pitroipa enfin régulier (élu meilleur joueur de la CAN). Retenir également l’idée géniale de Keshi de positionner Victor Moses en électron libre derrière deux fusées (Ideye, Emenike et parfois Musa), la révélation Mba, qui ne devrait pas rester longtemps hors d’Europe, l’énorme performance d’un Seydou Keita qui aura porté à lui seul son Mali.

Rendez-vous désormais en 2015 pour la 30e édition qui se tiendra au Maroc. Si vous souhaitez revivre l'édition 2013, cliquez ici.

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.