Les Colombiens n’iront pas aux Jeux Olympiques de Paris 2024 après un tournoi préolympique complètement catastrophique. La Fédération Colombienne de Football a donc pris toutes les mesures pour sacrifier cette génération.
La pire prestation de l’histoire de la Colombie en tournoi préolympique. Quatre matchs, quatre défaites, zéro but marqué et un dernier match symbolique avec une défaite humiliante (avec tout le respect qu’on peut avoir pour cette sélection) contre La Verde bolivienne. C’est évidemment un échec fracassant alors que la sélection cafetera arrivait dans la peau d’un sérieux outsider, même si elle était amputée d’éléments forts comme Jhon Jáder Durán, Kevin Mantilla ou encore son capitaine Gustavo Puerta, et si on peut aussi s’interroger sur Édier Ocampo qui a disputé les amicaux, mais qui n’a pas fait partie de la liste finale.
Si la Colombie arrivait dans la peau d’un outsider, c’est aussi car elle avait réalisé un Sudamericano séduisant avec notamment les trois principaux absents cités comme joueurs majeurs et quelques éléments qui étaient présents au tournoi pour Paris, comme Óscar Cortés, Luis Marquinez, Juan Castilla, Fernando Álvarez ou Johjan Torres. Lors du premier match face à l’Équateur seulement Óscar Cortés et Johjan Torres étaient titulaires. En défense centrale, le sélectionneur a opté pour Cristián Castro Davenish et Brayan Ceballos. Le premier n’avait sans doute pas la tête à 100% focalisée sur ce tournoi, placé en plein mercato, puisqu’il a été officialisé par le club portugais de Rio Ave fin janvier. Au-delà des absents, beaucoup de choix restaient discutables, d’autant que si Cortés n’était pas titulaire indiscutable avec Millonarios avant le Sudamericano, il avait néanmoins disputé les Jeux Sud-américains et avait quelques minutes dans les jambes, au contraire de sa demi-saison à Lens où il n’avait presque pas joué que ce soit en Ligue 1 ou en Europe (il ne faisait pas partie de la liste du club artésien).
Un long cauchemar
Conséquence, dès le premier match, les critiques se sont donc très rapidement abattues sur Héctor Cárdenas, le sélectionneur colombien. En défense centrale l’absence de Fernando Álvarez a été curieuse, mais au milieu, celle de Josen Escobar a aussi fait couler beaucoup d’encre. La grosse promesse de l’América (déjà dans le radar du City Group) était attendue, il n’est entré qu’à la pause et dans une équipe réduite à dix. Trop tard. Devant un joueur a cristallisé toutes les tensions, Daniel Ruiz. En échec total à Santos, il est rentré à Millonarios mais est nettement moins décisif et incisif qu’à ses débuts. Devant, Brahian Palacios et surtout Óscar Perea étaient attendus, mais le match contre l’Équateur a été un véritable cauchemar. Deux jaunes pour Jimer Fory en cinq minutes, un changement tactique qui privait la sélection d’un avant-centre et une stratégie aussi simpliste qu’inefficace : donner la balle aux ailiers en espérant un exploit individuel. Impossible d’espérer quelque chose dans ces conditions et la défense colombienne, qui n’a fait que subir, a complètement craqué en encaissant trois buts dans le dernier quart d’heure. De quoi mettre à mal les ambitions d’entrée de compétition. Mais si le match contre le Brésil a paradoxalement été le meilleur de la Colombie (avec Álvarez et Castilla titulaires), la défaite a mis un terme aux espoirs de disputer le tournoi olympique. C’est donc en tongs que les joueurs de Cárdenas ont terminé ce tournoi.
Après le match contre la Bolivie, il ne faisait aucun doute qu’Héctor Cárdenas allait être démis de ses fonctions. Comme souvent, il était vu comme un génie il y a un an avant de devenir le pire entraineur du monde fin janvier. Si beaucoup de journalistes, y compris des très influents, s’étaient félicités de sa nomination pour cette mission JO au cours de l’été 2023, ils ont parfaitement réussi leur retournement de veste. Si l’on a retrouvé quelques défauts de 2023 dans cette cuvée 2024 – le très faible apport du banc et l’absence de plan B par exemple – on ne peut pas dire que le sélectionneur ait totalement changé son approche. Ce zéro pointé n’est pas le seul dans la besace de Cárdenas puisqu’avec les U17, il avait terminé aussi sans point lors du Sudamericano 2019. Une chose était certaine en tout cas, il avait le soutien de ses joueurs comme on a pu le voir en conférence de presse après la Bolivie quand les joueurs ont accompagné Cárdenas avec un discours « nous sommes les premiers coupables, le coach n’est pas le seul responsable ». Discours assez raillé au passage par tout le monde qui s’est demandé pourquoi les joueurs ne l’avaient pas soutenu sur le terrain en jouant bien. Mais si la FCF lui a indiqué qu’il ne serait plus en charge des espoirs, elle lui a quand même donné une promotion, puisqu’il devrait probablement « devenir formateur au sein de la fédération et du football amateur ».
J’ai décidé de ne rien décider
Et maintenant ? La fédération a rendu un hommage appuyé à l’ancien sélectionneur de l’Équipe de France et sa fameuse phrase en 2006. Si Cárdenas n’est plus à la tête des U20 et U23 personne n’a été nommé à sa place. Statut quo donc en attendant de voir ce que donne le travail de Juan Carlos Ramírez, sélectionneur des U17, et de Jorge Serna, coach des U15 et donc laisser couler jusque 2025, année du prochain Sudamericano. En attendant quid de cette génération ? Elle semble abandonnée à son propre sort. Plus largement, on peut se poser la question de savoir quelles sont aujourd’hui les passerelles entre les Espoirs et les A. Dans cette génération, on a vu Óscar Cortés et Juan David Mosquera aller à l’étage supérieur. Pour le reste Jhon Durán est aussi allé se tester chez les grands, mais son passage chez les Espoirs a été très bref. Yaser Asprilla devrait bientôt frapper à la porte, mais c’est évidemment grâce à ses performances en Angleterre. Dans la lignée, on peut se demander quels sont les liens entre Néstor Lorenzo, l’actuel sélectionneur des A, et Héctor Cárdenas. Pourquoi ce n’est pas un membre du staff de Lorenzo qui a été nommé lorsque la FCF s’est penché sur le nom de celui qui allait diriger la Colombie lors de ce tournoi préolympique ? Même si la décision de Cárdenas était logique pourquoi Luis Amaranto Perea, adjoint du sélectionneur des A, ne l’a pas accompagné dans cette mission ? Autant de questions auxquelles la fédé ne veut pas répondre, quitte à encore sacrifier une nouvelle génération.
Photos : FEDERICO PARRA/AFP via Getty Images