Les quadrangulaires commencent ce samedi avec les cuadrangulares, deux poules de quatre dans lesquelles on retrouve les trois gros du championnat.

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La saison régulière et son calendrier absolument infernal s’est achevée en milieu de semaine pour laisser place aux quadrangulaires et son calendrier non moins infernal. Une première phase au cours de laquelle les trois gros, Millonarios, l’Atlético Nacional et l’América, sont passés plus ou moins facilement, mais qui a laissé le grand favori, Junior, sur le carreau dans des circonstances qui interrogent. Échec cuisant aussi pour Santa Fe. Le champion sortant ne sera pas de la partie non plus, tout comme Tolima.

Parlons donc des présents et à tout bien tout honneur, commençons par l’équipe qui a été la meilleure sur cette première phase, Rionegro Águilas Doradas. Cette équipe n’était pas passée loin de jouer la finale lors du dernier semestre, ne trouvant pas la faille lors du dernier match contre Medellín et laissant ainsi son adversaire filer. Leonel Álvarez parti, on se demandait comment cette équipe allait enchainer. La direction a fait le choix, payant, de prendre l’extrême opposé. Pour remplacer une légende du football colombien, la direction a jeté son dévolu sur Lucas González. Son nom ne vous dit rien certainement et c’est normal. À quarante-et-un ans, il vit sa première expérience sur un banc professionnel. Sa formation s’est faite bien loin de la Colombie puisqu’il sort du « FC Barcelone Innovation Hub » et a donc ses diplômes de la fédération espagnole. Plus surprenant, il possède également une « licence en science du sport de la ACU en Australie » et « une licence en préparation physique » également obtenue sur l’île-continent. Très surprenante, son équipe de Rionegro n’a pas volé sa première place. Quasiment deux points de moyenne, co-meilleure attaque, le plus grand nombre de victoires, cette équipe a été la plus impressionnante. Muette à seulement trois reprises sur les vingt matchs, les Águilas ont réussi à étouffer presque tous leurs adversaires faisant de Lucas González le vent de fraicheur du semestre. Sa façon de travailler, de préparer les matchs, son management des hommes a impressionné tout le monde. Beaucoup d’oppositions, insistance sur mettre les joueurs en difficulté le plus possible pour gérer la frustration et les situations complexes, il ne rechigne jamais à s’exprimer et à détailler sa méthode. Rionegro est donc bel et bien le favori de ce groupe A.

Dans ce groupe on retrouve également l’Atlético Nacional. Le club verdolaga n’a jamais tremblé, mais a franchement été assez pénible à voir, on pense notamment aux matchs contre Envigado ou contre La Equidad. Meilleure défense du championnat avec huit rencontres sans concéder de but, c’est donc surtout grâce à sa solidité défensive qu’il s’est qualifié. Par contre, le double vainqueur de la Libertadores devra faire sans la moitié de sa défense puisque les deux latéraux seront indisponibles. Eider Ocampo sera en Argentine pour disputer la Coupe du Monde U20 avec la sélection alors que, victime d’une fracture du cinquième métatarse, Andrés Román va subir une intervention chirurgicale et reviendra au prochain semestre. Offensivement, Dorlan Pabón sera l’arme numéro un. En pointe l’éternel Jefferson Duque devra faire attention à ne pas se blesser en l’absence d’Ángel, lui aussi en sélection, et dans la mesure où Francisco Da Costa est la grosse déception du mercato.

Pour compléter ce groupe on retrouve l’Alianza Petrolera et le Deportivo Pasto. L’Alianza Petrolera est une équipe intraitable ou presque à la maison puisqu’elle a remporté huit de ses dix matchs. Paradoxalement, elle est passée à côté contre une des plus mauvaises équipes de ce semestre, le Deportivo Cali. Revers de la médaille, cette équipe est en grande difficulté loin de ses bases puisqu’elle n’a réussi à s’imposer que contre le très faible Once Caldas. Pas illogique puisque Barrancabermeja est l’une des villes les plus chaudes du pays. Le Deportivo Pasto a arraché son billet à la dernière journée, accrochant la huitième place sur un but contre-son-camp très surprenant dans un match où ils ont obtenu deux pénaltys sifflés par Nicolás Gallo. Cette équipe se base surtout sur un collectif très compliqué à manœuvrer et géré d’une main de maitre par Flabio Torres. Il y a fort à parier que cette équipe pourrait être l’arbitre de ce groupe. À commencer par la première journée et la réception de l’Atlético Nacional.

Si le Groupe A semble destiné à Rionegro ou à l’Atlético Nacional, le Groupe B est clairement le plus ouvert. Deuxième au classement, Millonarios a pris l’habitude de craquer à l’entame des quadrangulaires, même si, dans la continuité de ce que fait Gamero depuis son arrivée, cette équipe est une des plus agréables à voir jouer, y compris en Sudamericana où elle a largement disposé de Peñarol et de Defensa y Justicia. Problème de taille cependant, Millonarios aborde les quadrangulaire sans quelques joueurs clés : le cas d’Óscar Cortés a fait couler beaucoup d’encre et si le club et le joueur semblaient d’accord pour aller chercher le titre, les statuts nationaux ont réglé l’histoire, Daniel Cataño, sera lui aussi absent au moins pour la première journée et le staff a sa part de responsabilité. À la maison contre La Equidad dans un match où le club n’avait pas grand-chose à perdre et à trois jours du début des quadrangulaires, Gamero a aligné son équipe-type et a donc perdu son meneur de jeu sur blessure pour une dizaine de jours. Même sort et conséquences moins graves pour Juan Carlos Pereira qui manquera lui aussi le début des quadrangulaires. Pour remplacer Cortés le club a décidé d’intégrer au groupe professionnel le jeune Beckham David Castro. Très intéressant avec les U20, il arrive avec une grosse pression. Logiquement favori du groupe par rapport à la continuité et à son effectif, Millonarios devra aussi jongler entre deux compétitions puisqu’entre les deux premières journées de son groupe, il recevra Peñarol en Sudamericana pour s’approcher encore un peu plus d’une qualification.

Même problématique de double compétition pour le Deportivo Independiente Medellín. Le DIM qui recevra Millonarios ce samedi, est engagé en Libertadores. Hasard du calendrier, il recevra Nacional mardi. Les similitudes s’arrêtent là, puisque le club a lui décidé de mettre un terme à son projet entamé avec David González. Un choix surprenant puisque le DIM n’était pas à la ramasse en championnat et était troisième de son groupe en Libertadores où il pouvait difficilement faire mieux. Sebastián Botero et Francisco Najera (ancien de l’Atlético Nacional) assureront l’intérim. Si les débuts se sont bien passés avec deux victoires et un nul, les quadrangulaires seront une autre paire de manches. Le DIM va aussi livrer une autre bataille, juridique, puisque son président a été suspendu quatre mois de toutes fonctions et d’une amende d’un peu moins de 10 000 € pour avoir critiqué les arbitres après le match contre Pasto. Au vu des images difficile de lui donner tort et on cherche encore à comprendre comment les arbitres ont pu refuser un but totalement valable au DIM.

Le troisième larron pourrait donc être celui qui remporte la mise. L’América n’a pas eu de problème pour se qualifier, notamment en raison de son armada offensive. Si le club est co-meilleure attaque, il peut surtout s’appuyer sur une diversité offensive. Avec cet América le danger vient de partout. Tous les joueurs du secteur offensif ont été décisifs, que ce soit en but et en passe décisive. Cette équipe est donc capable de marquer n’importe où et n’importe quand. Mais à l’autre bout du terrain, c’est loin d’être aussi flamboyant. Défensivement, la Mecha est très friable (deuxième moins bonne défense du groupe des qualifiés). La faute notamment à un gardien, Diego Novoa, qui est loin d’être impérial. Ses sorties aériennes font frissonner les supporters et il est déjà acté que le club ira chercher un autre gardien pour le deuxième semestre. Vous l’aurez compris l’América est la véritable incertitude de ce groupe. Deux matchs symbolisent d’ailleurs ce qu’est capable de faire cette équipe, deux matchs qui se sont suivis en trois jours avec une défaite 4-3 au Campín face à Millonarios où, après avoir ouvert le score l’América a été menée 4-1 et, trois jours plus tard, l’América a littéralement écrasé le voisin avec une large victoire 5-2.

Dernière équipe de groupe, le surprenant promu Boyacá Chicó. Le chef d’œuvre de la DIMAYOR, le grand n’importe quoi du semestre. Le club de Tunja n’a gagné qu’un seul match sur les dix dernières journées, mais avait réussi à se mettre à l’abri bien avant. Quand on dit bien avant on se réfère au début de saison canon bien aidé par un calendrier qui lui a offert cinq matchs à la maison sur les six premières journées. Du jamais vu. Surtout que c’est certainement le déplacement le plus compliqué pour tout le monde (sauf peut-être les clubs de Bogotá) puisqu’en plus des 2800 mètres d’altitude, il faut ajouter le terrain en mauvais état et les deux heures de bus depuis Bogotá puisqu’il n’y a pas d’aéroport. Mais ce serait la qualification ne se résumé pas seulement à une histoire de calendrier. Elle récompense surtout le fait que la direction a eu la bonne idée de garder le staff et la grande majorité de l’effectif de la saison dernière. Reste que s’appuyant sur la moins bonne dynamique dans le groupe des qualifiés, Boyacá Chicó a néanmoins tout d’une victime expiatoire.

Pierre Gerbeaud
Pierre Gerbeaud
Rédacteur Colombie pour Lucarne Opposée