Trois pays, trois stades, trois ambiances. Du Brésil à l’Argentine en passant par le Paraguay, ce dimanche sera celui d’une folle soirée rythmée par trois matchs entre historiques, trois matchs qui dépassent le simple cadre du football. Présentation.

Si les championnats présentent un avancement bien différent, la saison ne fait que commencer en Argentine, elle se termine au Brésil, ce dimanche soir sera celui où le temps va s’arrêter et les titres se jouer. Trois chocs entre légendes nationales, trois ambiances surchauffées, trois matchs hors du commun. Présentation de la soirée.

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Le leader reçoit son dauphin. Difficile de faire plus direct comme match décisif pour le titre. Englué dans une spirale des plus négative, le Corinthians joue gros face au champion sortant revenu de nulle part et qui a perdu une belle occasion de revenir à trois points lors de la 31e journée en devant se contenter du partage des points avec Cruzeiro. Les deux équipes sont désormais séparée de cinq points, une victoire du Timão l’enverrait vers le titre.

Le point en championnat

La graine

Le Corinthians voit le jour en 1910 de l’idée d’ouvriers dans un contexte où le football est avant tout une affaire d’élites au pays. Il devient ainsi le club du peuple qui veut lutter sportivement contre les clubs huppés de la ville comme proclamé alors « O Corinthians vai ser o time do povo e o povo é quem vai fazer o time » (Le Corinthians sera l’équipe du peuple et le peuple fera l’équipe), tradition qu’il perpétuera tout au long de son histoire jusqu’à la Démocratie Corinthienne, lutte ouverte contre la dictature. En 1914, quatre immigrés italiens fondent la Società Sportiva Palestra Itália qui deviendra Palmeiras en 1942. La rivalité nait véritablement à partir du troisième duel entre les deux équipes, en mars 1918 lorsque les joueurs de Palestra Itália provoquent ceux du Corinthians en leur lançant un os de taureau. Le match suivant se solde sur un résultat nul, le Corinthians décide alors de conserver cet os comme trophée. Le choc est lancé, il devient O Derby de la plume de Tommaso Mazzoni dans les années 30 et reste aujourd’hui l’un des plus grands du pays. À l’approche du centenaire d’O Derby, le journal Fohla de São Paulo publie une enquête qui révèle que 35% des paulistes considèrent ce choc comme le plus grand de la ville.

Le premier : Palestra Itália 3 – 0 Corinthians, 6 mai 1917

L’époque des grandes rivalités n’est pas encore venue. Les deux équipes avaient mis leurs désaccords de côté afin de trouver une solution au conflit opposant les clubs à l'organisation du football São Paulo de l'époque. Le championnat d'état de la décennie 1910 avait vécu une première crise organisationnelle avec la scission en deux entités organisatrices : la LPF (Liga Paulista du Foot-Ball) et l'APEA (Associação Paulista de Esportes Atléticos). Cette scission prend fin en 1917, année où Corinthians et Palestra Itália vont s’affronter. L’histoire retiendra du match son premier héros, un gamin de 18 ans nommé Caetano qui s’offre un triplé et scelle la victoire des verts.

Le dernier : Palmeiras 0 – 2 Corinthians

Tombé en Equateur lors de son huitième de finale aller, battu face à Cruzeiro, Palmeiras subit la loi d’un Corinthians alors leader invincible (la première défaite du Timão arrivera un mois plus tard au terme de la 21e journée). Jádson en première période, Guilherme Arana en deuxième, le Corinthians s’impose 2-0 à l’Allianz Parque, le titre semble déjà joué au Brésil, Palmeiras semblant condamné à céder son titre et s’accrocher pour garder une place dans le G6.

Éléments statistiques

Centenaire, O Derby a animé toutes les compétitions disputées par les deux géants. Au terme des 354 matches ayant opposé les deux équipes, l’avantage est pour Palmeiras qui mène d’une courte tête (125 victoires à 122, pour 107 matchs nuls).

Aller plus loin

Janvier 1930 : Tucumán unit Palmeiras et Corinthians : quand les deux ennemis ne firent plus qu’un

Paulista 1977 : Le Corinthians met fin à 23 ans de disette : Quand une victoire lors d’un Derby marque le point de départ d’une malédiction

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Le Clausura paraguayen entre dans sa dernière ligne droite et ils sont trois à lutter pour le titre. Fort de son match de retard, le Cerro Porteño dispose d’un joker mais la poursuite menée par le duo Guaraní – Olimpia est lancée. En cas de victoire ce dimanche, le Decano prendrait provisoirement la tête du championnat mais relancerait aussi l’Aborigen dans cette course. Vous avez dit tournant ?

Le point en championnat

La graine

La rivalité entre Cerro Porteño et Olimpia réside dans l’identité même des deux clubs. Premier club créé au Paraguay par le père du football local, William Patts, Olimpia est l’un des fondateurs du championnat national et représente le football réservé aux élites. Fondé en 1912, le Cerro Porteño, vient directement s’opposer à ce football de castes, choisissant alors l’union comme le représentent ses couleurs, le rouge et le bleu, couleurs des deux partis politiques qui se disputaient au pays, le Partido Colorado (rouge) et le Partido Liberal (bleu)). Rapidement, le Cerro Porteño devient le club du peuple qui viendra lutter contre le club de l’élite Olimpia. La rivalité sportive ne met pas bien longtemps à être exacerbée. Champion dès sa première année de création, le Cerro Porteño vient ainsi lutter pour le titre avec Olimpia dès 1914. Le duel, centenaire, va alors jalonner l’histoire du football paraguayen. Avec 89 titres à eux deux, Olimpia et Cerro Porteño dominent le paysage local, les blanc et noir ayant, à la différence de leur rival rouge et bleu, plusieurs titres continentaux. Ce choc, l’un des plus anciens du continent est le rendez-vous incontournable au pays.

Le premier : Olimpia ?–? Cerro Porteño, 21 septembre 1913

Le premier Súperclásicos aurait dû avoir lieu un mois plus tôt mais Olimpia ne s’était pas présenté. Il faut donc attendre le 21 septembre 1913 pour qu’enfin les deux futurs géants paraguayens s’affrontent pour la première fois. Preuve que rien n’est normal dans ce duel, même le premier résultat est soumis à débat. Soldé pour un 2-2 pour certains, par une victoire 3-1 du Cerro Porteño pour d’autres, la seule chose qu’il faudra retenir et qu’il mit alors aux prises le champion sortant, Olimpia, à son successeur, le Cerro Porteño.

Le dernier : Cerro Porteño 1 – 1 Olimpia

Au Defensores del Chaco, aucun des deux géants n’est parvenu à s’imposer. Après un premier acte équilibré qui a vu cependant Olimpia ouvrir le score sur un penalty de Walter González, le Cerro a dominé le deuxième acte et aurait mérité bien plus qu’un partage des points. Olimpia restait alors sur le podium quand le Cerro était relégué en deuxième partie de tableau.

Éléments statistiques

En championnat, le Cerro Porteño vire en tête. En 296 Súperclásicos, les Azulgranas ont décroché 105 victoires contre 101 pour Olimpia (90 matchs nuls). Si on regarde toutes compétitions confondues, le bilan se retourne, Olimpia mène alors 149 à 147, 125 matchs nuls venant s’ajouter au bilan. Le Cerro reste sur une série négative, sur les six derniers affrontements, il n’en a remporté qu’un, concédant trois défaites et deux nuls.

Pour aller plus loin

L’histoire d’un nom (26) : Club Cerro Porteño : tout ce qu’il faut savoir sur le Cerro Porteño.

Racines ancestrales et nouvelle génération dorée : à la découverte du Paraguay : Des origines à nos jours, l’histoire du football paraguayen.

Copa América Centenario : 1979, la folle année du Paraguay : Quand Olimpia décroche la première Libertadores de l’histoire du Paraguay et alimente la sélection lors de sa deuxième et dernière victoire en Copa América.

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Pas le temps de digérer une élimination aussi riche en désillusion pour River. À peine les rêves de Libertadores envolés, le Millo accueille un Boca leader invincible et qui réalise le meilleur départ de son histoire. L’enjeu n’est pas qu’une affaire de suprématie locale. Rejeté à neuf points de son meilleur ennemi, River joue déjà gros s’il veut faire partie des candidats au titre.

Le point en championnat

La graine

Le plus grand pour la plupart des amoureux du football argentin, à l’exception des habitants de Rosario. A l’origine, Boca – River, c’est une lutte de quartier, les deux clubs étant originaires du quartier de La Boca (avant que River ne migre vers le district de Núñez en 1925). Il va ensuite devenir symbole de la lutte des classes appliquée au football entre le club des migrants italiens (les Xeneizes de BocaXeneizes signifiant génois – de Gênes en Italie) et le club des classes riches (Les Millonarios de River – surnom provenant de la campagne de recrutement dépensière des années 30) avant de laisser place à une lutte plus traditionnelle opposant les deux clubs les plus titrés du pays, et ne cesser de marquer l’histoire du football Argentin. Au point d’être aujourd’hui considéré comme le plus grand derby du monde par les médias internationaux. Celui qu’il n’est plus utile de présenter.

Le premier : Boca Juniors 1 – 2 River, 24 août 1913

Le premier Superclásico s’est disputé en 1908 et fut remporté par Boca (victoire 3-1), mais ne revêt qu’une valeur de match amical. Le premier Superclásico officiel de l’histoire se tient en 1913 et sera déjà légendaire, marqué par des débordements, des histoires d’arbitre.

Le dernier : Boca Juniors 1 – 3 River Plate

Leader du championnat, Boca peut écarter son grand rival de la course au titre. La Bombonera surchauffée sera le théâtre d’un vrai duel de géants qui avaient décidé de jouer. River dominait le premier acte, menant 2-0 avant de voir Boca, un temps assommé, revenir dans le match. Les Xeneizes dominaient la deuxième période sans parvenir à égaliser, River pliait mais ne rompait pas, Sebastián Driussi allait tuer le match dans les derniers instants, River revenait à quatre points de Boca avec un match de retard, le championnat était alors un temps relancé.

Éléments statistiques

Si River et Boca se sont rencontrés dans toutes les compétitions du continent, en Primera División, leurs affrontements ont eu lieu à 207 reprises et le bilan penche en faveur de Boca avec 76 victoires contre 64 nuls et 68 victoires de River. Toutes compétitions confondues, Boca mène 132 victoires à 119, 113 s’étant terminée sur un résultat nul.

Pour aller plus loin

Aux origines du Superclásico : l’histoire du premier River – Boca

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.