Trois ans après le deuxième sacre du Chili, un an avant une édition argentino-colombienne, la dernière Copa América en année impaire se pose au Brésil et invite l’Asie. Avec pour bien des sélections plus de questions que de certitudes.

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Sans certitudes, l’Argentine rêve de titre

Par Nicolas de la Rua

Construit sur les cendres du dernier Mondial, ce groupe, régénéré par Lionel Scaloni, se rend au Brésil après trois phases indispensables suite au fiasco russe qui doivent lui permettre de rejoindre au palmarès de la Copa América les légendes, Redondo, Ruggeri, Simeone et Batistuta, tous présents lors du dernier titre argentin en 1993. Tout juste nommé (faute de mieux), Scaloni a donc d’abord cherché à stabiliser sa défense lors des amicaux de septembre et d’octobre dernier avant de se mettre en quête d’un schéma de jeu équilibré lors de la double confrontation face au Mexique en fin d’année alors que les principaux mondialistes étaient toujours absents, le temps qu’ils reprennent confiance. Dernier temps, en mars 2019 : le retour de Messi et donc un travail sur l’animation offensive (le plus gros chantier) qui s’en est suivi d’une défaite 3-1 contre le Venezuela à Madrid pour une petite victoire 1-0 face au Maroc.

Si le protocole de reconstruction semble parfaitement logique, dans les faits, l’Albiceleste n’en reste pas moins groggy. La faute à un Scaloni sans grande idée et aux choix parfois douteux, qui subit un marquage strict de César Luis Menotti mais aussi à cause d’un niveau insuffisant de certains joueurs. Si la volonté du sélectionneur est de jouer avec deux attaquants dans un 4-4-2 à plat avec un doble cinco formé par le duo Paredes - Lo Celso, il a dû se résoudre à renforcer son milieu grâce à un Guido Rodríguez plus travailleur et décaler Gio sur un côté pour faire évoluer son dispositif vers un 4-3-3 suivant la situation. Loin d’avoir un fond de jeu élaboré, Lionel Scaloni a conscience des carences de son groupe (ce qui est déjà mieux que Jorge Sampaoli qui accélérait à mesure que le mur se rapprochait). Il a donc fait le choix de se contenter d’un jeu de transition face aux équipes développant un jeu plus riche (soit probablement les onze autres équipes de la Copa). Ainsi, avant de s’envoler pour le Brésil, le onze titulaire lors du dernier amical face au Nicaragua (victoire nette 5-1 face à un adversaire très faible grâce aux doublés de Messi et Lautaro Martínez et un but de Tucu Pereyra) était : Armani - Saravia, Foyth*, Otamendi, Acuña* - Lo Celso, Guido Rodríguez*, Paredes - Messi, Agüero, Matías Suárez* (*ces joueurs ne devraient pas être titulaires pendant la Copa América). Ce schéma en 4-3-3 s’est régulièrement transformé en 4-4-2 en faisant glisser Lo Celso dans le couloir droit et en plaçant Suárez plus bas sur le côté gauche. Reste que faute de certitudes et d’idée directrice, l’Albiceleste risque bien de retomber dans ses travers en se contentant d’admirer les prouesses de Messi, alors qu’il faut juste jouer avec lui. Malgré ses nombreux défauts, l’Argentine reste l’Argentine et, dans tout le pays comme chez les bookmakers, elle reste l’un des favoris de cette quarante-sixième édition d’une Copa América qui reste le dernier trophée remporté par cette sélection… il y a vingt-six ans.

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Bolivie, pas grand-chose à perdre

Par Thomas Allain

Le pays andin ouvrira la compétition face au Brésil. Pour sa première rencontre la Verde pourra s’appuyer sur sa seconde période face aux Bleus où elle avait réussi à mieux contenir les assauts français. Arrivé au mois de janvier, Eduardo Villegas dirigeait face à la France son quatrième match amical après un nul contre le Nicaragua (2-2) et deux défaites en Corée du Sud et au Japon (1-0). Le technicien bolivien est assisté de son frère Oscar et la fratrie a pour objectif principal de bien figurer aux prochains éliminatoires à la Coupe du Monde qui débuteront en mars 2020. Dans cette optique, Villegas a décidé de se passer de certains joueurs plus expérimentés comme Juan Carlos Arce, excellent avec Bolívar lors du tournoi d’Apertura bolivien ou Carlos Saucedo, meilleur buteur du championnat avec San José. Pour les Boliviens, cette Copa América n’est que la préface d’un livre qui verra son premier chapitre s’écrire lors des prochains éliminatoires. Dans une sélection en reconstruction, la mission de Villegas consistera à associer des joueurs inexpérimentés avec d’autres plus anciens déjà présents lors des éditions précédentes. Après leur match d’ouverture face au Brésil, les Boliviens devront être solides face au Pérou pour espérer s’offrir un exploit face au Venezuela. Finaliste en 1997, la moins bien classée des sélections sud-américaines au classement FIFA n’a réussi à sortir de la phase de groupe qu’une seule fois lors des sept dernières éditions de la Copa América (quart de finaliste en 2015). La qualité individuelle de l’effectif et surtout son manque d’expérience laisse entrevoir une nouvelle déception pour le pays andin, d’autant plus que ce dernier n’a remporté qu’une seule de ses seize dernières rencontres (3-0 face à Myanmar).

Au niveau de l’effectif, dans les buts on pourra retrouver Carlos Lampe, joueur le plus âgé du groupe (en partance pour Lanús, 32 ans). Sa doublure Rubén Cordano (Blooming, 20 ans) avait livré un match irréprochable face à la Corée du Sud et le troisième gardien, Javier Rojas, a obtenu les faveurs du sélectionneur grâce à des prestations convaincantes avec le Nacional Potosí lors de l’Apertura bolivien. Derrière, les expérimentés Diego et Marvin Bejarano seront titulaires sur les côtés. En difficulté depuis son retour en sélection, le capitaine Marvin Bejarano sera en concurrence avec l’excellent latéral gauche Roberto Fernández (Blooming, 19 ans). Saúl Torres (Nacional Potosí) sera de la doublure de Diego. Dans l’axe, Luis Haquin (Puebla FC, 21 ans) et Adrian Jusino (Bolívar, 26 ans) seront associés. Leurs deux remplaçants Cuéllar (Oriente Petrolero) et le jeune Carrasco (Blooming) auront peu de temps de jeu à se partager, l’idée de Villegas étant d’emmener la charnière Haquin-Jusino jusqu’à la fin des éliminatoires en novembre 2021. Les deux centraux ont très peu joué dans leurs clubs respectifs mais leurs prestations lors de la tournée amicale de la Verde en Asie en mars dernier ont rassuré le technicien national. À la récupération, Leonel Justiniano (Bolívar) sera associé à Samuel Galindo (Always Ready) ou Fernando Saucedo (Wilstermann). Eduardo Villegas avait décidé de s’appuyer sur Galindo face aux Bleus. Finalement, après une première période ratée, l’entrée de Saucedo avait permis d’apporter plus de sérénité dans la récupération et surtout dans la projection. Dans son 4-2-3-1, le technicien bolivien n’a pas encore choisi les deux joueurs qui accompagneront Alejandro Chumacero (Puebla FC) au milieu de terrain. Le polyvalent Erwin Saavedra (23 ans) part avec un avantage après son exceptionnel première partie de saison avec son club de Bolívar. La dernière place se jouera entre Paul Arano (24 ans, Blooming), les deux coéquipiers du Strongest Raul Castro et Diego Wayar ou surtout le prometteur ailier Leonardo Vaca (23 ans, Blooming) qui est capable de redescendre au milieu de terrain pour faciliter les rapides sorties de balles. Sacrifié en pointe, Marcelo Martins (Shijiazhuang, D2 chinoise) cherchera à se rapprocher du record du Joaquin Botero, meilleur buteur de l’histoire de la Verde. Villegas pourra aussi s’appuyer sur Leonardo Vaca en cas de repositionnement à deux attaquants face au Pérou et au Venezuela. Les deux autres cartes offensives que sont Álvarez (Wilstermann) et Ramiro Vaca (The Strongest) ne devraient pas avoir beaucoup de temps de jeu.

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Brésil : favori par défaut

Par Marcelin Chamoin

Le Brésil peut être considéré comme le favori de cette Copa América grâce à un groupe de qualité et l’avantage de jouer à domicile, la Seleção ayant remporté à chaque fois la Copa América lorsqu’elle jouait à la maison (1919, 1922, 1949, 1989). Pourtant, le Brésil est loin de convaincre depuis l’élimination précoce lors de la Coupe du Monde 2018, battu par la Belgique en quarts de finale. Les deux matchs de préparation avant la Copa América n’ont pas permis de balayer les doutes. Au stade Mané Garrincha, le Brésil a disposé du Qatar sur le score de 2-0, sans vraiment convaincre. Pire, Neymar a dû quitter ses partenaires après seulement un quart d’heure de jeu, victime d’une déchirure des ligaments de la cheville droite, une blessure qui l’oblige à déclarer forfait pour le tournoi. Le second match de préparation, devant seulement 16 521 spectateurs au Beira-Rio – preuve d’un certain désintérêt du public brésilien pour la Seleção, a vu la large victoire du Brésil face au Honduras, rapidement réduit à dix. Le Brésil s’impose 7-0, tous ses joueurs offensifs ont marqué, Thiago Silva également, mais la faible opposition ne permet pas de tirer des enseignements de cette rencontre.

Le Brésil possède cependant l’un des plus beaux effectifs de la compétition, à commencer par la défense, avec deux des meilleurs gardiens du monde. Alisson sera le titulaire, avec comme remplaçants Ederson et Cássio. Forfait sur blessure lors de la Coupe du Monde 2018, Dani Alves retrouve sa place de titulaire sur le côté droit et le brassard de capitaine, avant même la blessure de Neymar. De l’autre côté de la défense, Marcelo étant resté à la maison, Alex Sandro sera le remplaçant de Filipe Luís. Enfin, dans l’axe, si Marquinhos sera titulaire et Eder Militão le quatrième homme, Tite n’a pas encore défini qui accompagnera le défenseur parisien dans l’axe entre Miranda et Thiago Silva, les deux ayant chacun joué un match de préparation. La défense est l’un des points forts de la formation brésilienne avec seulement deux buts encaissés en dix matchs depuis la Coupe du Monde, avec il est vrai, des adversaires parfois bien inférieurs au Brésil.

Au milieu de terrain, Casemiro reste le taulier, aux côtés d’Arthur, qui pourrait cependant rater le match d’ouverture en raison d’un coup reçu au genou lors du match contre le Honduras. En cas de forfait, Allan devrait prendre sa place. Le milieu de terrain est complété par Philippe Coutinho, en grande forme contre le Honduras, et qui permet au 4-3-3 de Tite de se transformer en 4-2-4. Décevant cette saison avec le Barça, Coutinho devra se transformer en leader du Brésil, d’autant plus avec le forfait de Neymar. Auteur d’un penalty réussi et de deux frappes sur le poteau contre le Honduras, Coutinho est attendu au tournant par le public brésilien. Ce rôle de milieu-attaquant pourrait également être occupé par Lucas Paquetá, aperçu contre le Qatar alors que Fernandinho a joué la seconde période contre le Honduras.

L’attaque brésilienne est orpheline de Neymar, remplacé par Willian alors que la presse et les supporters attendaient plutôt Vinícius Jr ou Lucas Moura. C’est cependant David Neres, auteur de son premier but avec la Seleção contre le Honduras, qui sera titulaire sur le flanc gauche de l’attaque. Gabriel Jesus, décevant lors de la Coupe du Monde 2018 (0 but en 5 matchs), mais auteur de six buts sur les sept derniers matchs, devrait être le remplaçant de Roberto Firmino à la pointe de l’attaque, alors que Richarlison jouera sur le côté droit. Everton, grâce à sa polyvalence, aura une carte à jouer en sortie de banc. L’absence de Neymar peut se transformer en un avantage, le Brésil ayant parfois été trop dépendant du joueur parisien. Chaque attaquant aura son importance et on devrait voir un mouvement permanent en attaque, sans pointe fixe et avec de nombreuses permutations sur les différents postes.

Le Brésil affrontera la Bolivie, le Venezuela et le Pérou au premier tour, de quoi permettre une montée en régime au cours de la compétition. Vainqueur de la Copa América en 2004 et 2007, le Brésil reste sur trois participations décevantes (élimination en quarts de finale contre le Paraguay en 2011 et 2015, élimination au premier tour en 2016). Même sans son meilleur joueur, tout autre résultat qu’un succès lors de la finale au Maracanã sera une déception pour la Seleção.

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L’insoluble équation chilienne

Par Nicolas Cougot

Nous l’avions évoqué à l’issue des amicaux de mars dernier (lire Chili : impossible reconstruction ?), le chantier auquel Reinaldo Rueda fait face depuis sa prise de fonction est immense et après la période des essais, place désormais à celle de l’examen final. Et celui-ci s’annonce des plus compliqués pour le sélectionneur colombien de la Roja.

Premièrement car si le Chili n’avait pas rassuré en mars dernier, son tout dernier face à Haïti a plus inquiété qu’autre chose. Car si la Roja a finalement pris le dessus sur d’excellents Grenadiers, les visiteurs ont surtout pointé les carences défensives du double champion d’Amérique du Sud. Au-delà des erreurs individuelles, l’animation pêche et les espaces laissés au milieu qui mettent en danger une défense trop souvent livrée à elle-même ont été parfaitement exploités par des visiteurs qui auraient pu tuer le match en contre s’ils avaient su se montrer plus judicieux dans certains choix. Mais au-delà du souci sur le terrain, la principale source de questionnement lorsqu’il s’agit d’abord le Chili de Rueda est qu’il est très difficile d’en définir les contours. Encore face à Haïti le sélectionneur s’est offert une nouvelle revue d’effectif avec plusieurs changements à la pause. Mais encore une fois, on n’arrive pas véritablement à définir qui débutera réellement dans la mission de défense d’une double couronne continentale.

Pire, ce sont des revenants qui ont sauvé les meubles. Même s’il a beaucoup gâché, notamment en première période, Chapita Fuenzalida a clairement montré qu’il était le meilleur joueur chilien du moment. Récompensé par le but de la victoire, l’ailier de la Católica a certes probablement été le meilleur élément de la Roja face aux Grenadiers, il est surtout venu rappeler à Rueda que sa non convocation jusqu’ici était une erreur et pourrait remettre en question les choix à faire à l’heure de poser son onze de départ. Même constat pour Edu Vargas. L’un des écartés de la génération dorée est l’un des rares à revenir (la bise à Claudio Bravo) et a montré qu’il était et restait indispensable devant. Turboman a été de tous les bons coups, sur les côtés, dans l’axe, et a égalisé, se rapprochant davantage de Marcelo Salas au classement des buteurs en rouge. Reste à trouver qui lui associer. Nico Castillo est en plein doute après un semestre délicat à l’América, ne rassurant pas. Avec l’incertitude qui pèse quant à l’état physique d’Alexis Sánchez, la question du 9 demeure et le Chili n’a plus de temps. Reste donc quelques valeurs sûres chez les anciens, le duo Aránguiz-Vidal est toujours capable de générer et d’initier du danger, même si el Rey s’est montré quelque peu perdu sur le terrain face à Haïti, la légende Gary Medel, même s’il s’est montré un peu à court de rythme, devrait apporter quelques garanties derrière au sein d’une défense qui questionne grandement et dont on a encore du mal à cerner les contours, affirmation valable donc pour plusieurs lignes.

C’est donc un Chili armé de bien peu de certitudes qui débarque au Brésil. Et comme si cela ne suffisait pas, la Roja se retrouve dans un groupe très piégeux avec le Japon, l’Équateur et surtout l’Uruguay. Reinaldo Rueda a annoncé prioriser « le résultat au beau jeu », ça tombe bien pour lui, il ne sera jugé que sur cela et pourrait ne pas résister à un échec.

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Colombie, objectif dernier carré ?

Par Pierre Gerbeaud

Quatre matches avec à la clé trois victoires et une défaite. Voilà pour le bilan de Carlos Queiroz depuis sa prise de fonction. Pas mal. Surtout qu'au-delà des résultats le jeu a été au rendez-vous sur cette préparation pour la Copa América. On va passer rapidement sur le match contre Panamá. Pour son retour dans la capitale, la fédération colombienne avait décidé de mettre des billets à des prix exorbitants. Résultat un stade à moitié vide. Et si le prix en a dissuadé plus d'un, l'adversaire n'incitait pas non plus au craquage de PEL. Contre une faible équipe de Panamá, la Colombie a rapidement fait la différence. Trois buts en première période, Tesillo, Muriel et Falcao pour les buteurs, et une deuxième période plus tranquille. Pour le reste John Lucumí et Álvaro Montero ont pu connaître leur première sélection. Face à cet adversaire, difficile de sortir des enseignements. Tactiquement le sélectionneur portugais en a profité pour faire des essais avec notamment un 4-3-3 très offensif avec Barrios devant la défense et Cardona et Cuadrado dans le rôle de milieu relayeur. Et sur les côtés deux joueurs qui n'ont pas été formés à ce poste, Luis Muriel et Róger Martínez. Même schéma à Lima pour le deuxième et dernier match avant de prendre la direction du Brésil. Mais cette fois, Mateus Uribe à la place d’Edwin Cardona. Contre un adversaire d'un autre calibre la Colombie a souffert puis frappé pour valider son temps fort. Avec dans le rôle du buteur un Mateus Uribe qui s'est même offert un doublé à l'heure de jeu. Duván Zapata a terminé le travail pour assurer une large victoire contre l'équipe inca. Mais le score est flatteur parce que cette Colombie a souffert, notamment à l'entame de chaque période et parce que le Pérou a joué à dix la dernière demi-heure.

À l'heure de commencer la Copa América, Carlos Queiroz devrait donc garder le 4-3-3 testé lors des deux matches de préparation. En défense centrale, l'excellent match de Mina contre le Pérou devrait lui assurer une place de titulaire aux côtés de Dávinson Sánchez, comme Tesillo à gauche qui a montré qu'il avait énormément progressé à un poste où il avait été testé en sélection il y a deux ans. Même chose pour Stefan Medina mais ça ne sera pas suffisant pour déloger Santi Arias. Au milieu, Barrios et Uribe semblent partir avec une longueur d'avance. Pour la dernière place plusieurs choix. James dans le cœur du jeu ce qui pousserait Cuadrado là où il est le plus à l'aise, le côté droit. L'inverse est aussi une possibilité. Cardona qui a montré des choses intéressantes pour son retour avec la sélection pourrait aussi être le troisième homme au milieu ce qui pousserait Muriel (ou Cuadrado) sur le banc. Devant évidemment Falcao sera titulaire et avec le brassard de capitaine.

Demi-finaliste lors de la Copa Centenario il y a trois ans, la Colombie ira donc au Brésil avec l'objectif de faire au moins aussi bien. Et elle a tout pour y parvenir, le groupe a assez peu évolué depuis la fin de l'ère Pékerman donc il n'est pas illogique de voir une équipe qui a des certitudes dans le jeu avec des joueurs qui se trouvent. La seule incertitude est le niveau physique de James, souvent blessé avec le Bayern, il n'a pas (encore) un match complet dans les jambes. 

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L’Équateur attend sa jeunesse dorée

Par Nicolas Cougot

Oublier ou reconstruire ? À l’heure de se présenter au Brésil, l’Équateur se retrouve devant ce dilemme et il semble qu’Hernán Darío Gómez a choisi un entre-deux. Après une Copa América chilienne ratée (élimination au premier tour), une Copa Centenario plus encourageante (élimination en quarts face aux USA après être sorti du groupe devant le Brésil), la phase de qualification mondiale a d’abord suscité un grand espoir avant de se terminer en naufrage (onze fois dans le top 3 sur les douze premières journées avant de terminer par six défaites consécutives et finir ainsi hors de la zone de qualification). Mais plutôt que de céder à la déprime, la Tri s’est remise à prendre espoir, encore une fois. Pour cela, elle a d’abord compté sur le retour d’el Bolillo Gómez, l’homme qui l’avait envoyé en Coupe du Monde pour la première fois en 2002, elle compte désormais sur sa nouvelle jeunesse dorée, celle formée sur les bancs des clubs locaux tels que les Independiente del Valle, pour retrouver les projecteurs mondiaux. Une génération porteuses d’espoir d’une reconstruction possible et rapide. Cependant, cet espoir ne porte pas véritablement sur la Copa América brésilienne. La faute à des pibes engagés dans une Coupe du Monde U20 historique (et un parcours tout aussi historique), même si on va croiser quelques « jeunes » qui vont avoir fort à jouer en vue de Qatar 2022 (des joueurs tels que Ayrton Preciado (24 ans, Santos Laguna), Carlos Gruezo (24 ans, Dallas), Jhegson Méndez (22 ans, Orlando), ou encore Jefferson Intriago (24 ans, LDU)).

L’absence de grand espoir, il est aussi dû à certains choix et une approche qui semble surtout miser sur la prudence plutôt que l’ambition offensive. Fidel Martínez (10 buts en 13 matchs en championnat, Braian Cuco Angulo (29 buts en 41 matchs de championnat), Miller Bolaños (valeur sûre de l’attaque de la Tri), aucun de ces trois attaquant ne sera du voyage. Pas plus que les excellents frères Julio, capables de perforer des défenses et qui représentent également l’avenir, ni des générateurs de danger que peuvent être des Cristián Noboa, Jefferson Montero, Juan Cazares ou Fernando Gaibor. Bolillo mise sur du solide donc et n’emmène avec lui que trois attaquants : Ángel Mena, qui a cartonné en Liga MX, Enner Valencia qui signe un bon semestre et Carlos Garcés, buteur prolifique avec Delfín.

La Tri a toujours été une équipe qui aime utiliser les couloirs pour générer le danger. Avec l’absence de ces nombreux profils, il semble que l’on s’oriente vers une équipe qui préfère laisser le ballon à l’adversaire pour mieux le contrer. Cela a parfaitement fonctionné face au Pérou en novembre dernier, ce fut en revanche bien plus compliqué face à Panamá ou au Honduras, quand il s’agissait d’être détenteur du ballon et donc du jeu. Malheureusement, cela requiert une discipline et une solidité défensive de haut niveau, ce qui ne fut pas vraiment le cas lors du dernier amical face au Mexique qui a été des plus difficiles pour l’arrière garde de la Tri. Bolillo n’a donc désormais plus le temps d’expérimenter, et si l’on a encore un peu de mal à définir le onze équatorien, on devrait s’orienter vers le 4-1-4-1, schéma le plus rencontré lors des amicaux avec un axe défensif en haute altitude et un trio central au milieu destiné à gratter et assurer une transition rapide.

Ajouté aux interrogations, le climat particulier qui entoure la sélection. Car quelques mois après la nomination d’Hernán Darío Gómez, Francisco Egas a été nommé nouveau président de la fédération équatorienne. Et l’on sait qu’en Amérique du Sud, un sélectionneur est souvent lié au président qui le nomme. Ainsi, alors que l’Équateur arrive au Brésil avec plus de questions que de certitudes, rien ne dit non plus que le projet Qatar 2022 soit assuré pour Hernán Darío Gómez. Reste que dans un groupe au sein duquel le double champion en titre est encore plus dans le doute et l’invité japonais arrive avec une équipe expérimentale, la Tri a tout de même une belle carte à jouer. Histoire aussi d’entretenir l’espoir.

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L’incertitude paraguayenne

Par Nicolas Cougot

S’il est une sélection dont il est bien difficile de dessiner les contours, les aspirations et les projets, c’est bien la sélection du Paraguay. Après une Copa Centenario chaotique (dernière du groupe) et une campagne de qualification au cours de laquelle ladite qualification a été un temps de l’ordre du mathématiquement possible, mais surtout marquée par une irrégularité qui a vu les Guaraníes capables de s’imposer au Chili ou en Colombie mais de sombrer à domicile face au Pérou ou au Venezuela, la suite n’a pas été des plus calmes.

Il y a ainsi eu l’incroyable coup que fut la signature de Juan Carlos Osorio au poste de sélectionneur au lendemain d’un parcours mondial des plus intéressant avec le Tri mexicain. Il y a eu ensuite la gestion toute paraguayenne de l’entraîneur que tout un continent désirait : campagne de presse anti-Osorio et superbe savonnage de planche. Conséquence, on a abouti sur une conférence de presse surréaliste à trois mois du début de la Copa América qui a mis fin à une relation qui a surtout semblé virtuelle. Alors Eduardo Berizzo est arrivé peu de temps avant les amicaux de mars et une nouvelle reconstruction a débuté. Une période floue qui tombe alors que le pays s’apprête à commémorer le quarantième anniversaire du dernier titre dans l’épreuve.

Pourtant, Toto Berizzo possède un CV intéressant, disciple du Bielsismo, un passage réussi à O’Higgins, des résultats pas si mauvais en Espagne, et s’il n’a aucune expérience à la tête d’une sélection, avec le Paraguay, il dispose d’un vivier extrêmement talentueux à chaque ligne. Si dans les buts, le Paraguay cherche encore l’héritier de José Luis Chilavert ou de Justo Villar, Antony Silva et Roberto Gatito Fernández (fils de, vainqueur de la Copa América il y a quarante ans) restant d’excellents gardiens bien que n’étant pas encore au niveau des deux légendes, Berizzo dispose d’une bonne matière première qui doit d’abord être remise en confiance puis ensuite animée. Derrière, trois joueurs vont probablement jouer le rôle de taulier : Junior Alonso, passé par le LOSC et deux pilliers dans leurs clubs, Gustavo Gómez à Palmeiras, Bruno Valdez à l’América. De quoi voyager. Puis restent les talents offensifs, nombreux, de ceux qui commencent à éclore comme Miguel Almirón, Matías Rojas, Cecilio Domínguez, ou ceux dont on aimerait qu’ils éclosent véritablement comme Óscar Romero, Derlis González ou l’exemple parfait, Juan Iturbe. S’il est difficile de se faire véritablement un avis sur ce que devrait être le Paraguay de Toto, les amicaux ont montré quelques idées : fidèle à Bielsa, Berizzo impose une notion de vertige. Pressing à haute intensité, volonté d’aller harceler l’adversaire à chaque moment et de récupérer le ballon le plus haut possible pour exploser. Cela va impliquer des latéraux capables de faire rapidement le piston, on pense ainsi voir Iván Piris ou Santiago Arzamendia dans ce rôle (et pourquoi pas Bruno Valdez) et un milieu véloce et dynamique, profil dont Berizzo dispose à outrance. Reste ensuite en encadrer le tout par un neuf, un vrai, un pur et en ce sens, la légende mondiale Óscar Cardozo est le modèle idéal. Dans son ombre et qui pourrait pourquoi pas gratter du temps de jeu, se trouve le toujours plus jeune qu’il n’y parait Federico Santader.

Reste donc à trouver l’animation, à mettre en place sa philosophie de jeu. La méthode Berizzo demande du temps et il faudra considérer la Copa América comme une première phase de test grandeur nature, même si quarante ans après l’histoire aurait été belle. Mais avec une seule victoire depuis octobre 2017, lors du dernier amical face au Guatemala, et alors que ses clubs phares brillent en Libertadores mais ne comptent que sept joueurs dans cette liste, et surtout un groupe composé de l’Argentine, de la Colombie et du danger potentiel qu’est l’inconnu Qatar (inconnu pour les Sud-américains), il ne faudrait pas être non plus trop ambitieux pour un Paraguay qui débute une énième nouvelle ère.

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Le Pérou ne pourra pas se cacher

Par Romain Lambert

Nous avions laissé la Blanquirroja le 26 juin 2018 et ce dernier match de Coupe du Monde remporté face à l'Australie, insuffisant pour se qualifier pour les huitièmes de finale. Depuis, le Pérou a disputé dix matchs amicaux (trois victoires, un nul et six défaites), ce qui a permis au sélectionneur Ricardo Gareca de choisir minutieusement ses vingt-trois guerreros pour s'envoler pour le Brésil. Il amènera avec lui un groupe qui se connait déjà par cœur puisque dix-sept d'entre eux ont disputé le dernier mondial et onze étaient déjà présents lors de la Copa América Centenario en 2016. Surtout, le buteur historique et capitaine de la sélection, Paolo Guerrero, sera bien présent et en forme (neuf buts sur ses treize derniers matchs avec l'Internacional).

Lors de sa participation à la Coupe du Monde 2018 en Russie, le Pérou faisait office de petit poucet sans grande expérience dans cette compétition avec seulement quatre participations (1930,1970, 1978, 1982) et son objectif était moindre (se qualifier pour les huitièmes de finale) avec une élimination dès la phase de poule facilement pardonnée. En Copa América, le Pérou ne pourra pas se cacher. Vainqueur à deux reprises de la compétition (1939 et 1975), la Blanquirroja compte aussi dans son histoire récente deux belles troisièmes places (2011 et 2015). Lors de la dernière édition de 2016, la fameuse Copa América Centenario, le Pérou élimine à la surprise générale le Brésil en phase de poule mais perd aux tirs au but face à la Colombie en quarts de finale. Les attentes seront grandes pour cette édition brésilienne où les hommes de Gareca sont tombés dans un groupe plutôt accessible avec notamment le Venezuela et la Bolivie. Attention toutefois à ne pas prendre ces deux nations de haut car le troisième adversaire sera beaucoup plus coriace et surtout il sera chez lui. Le Pérou ira défier le Brésil lors du troisième et dernier match de poules. La clé pour se qualifier pour les quarts de finale résidera donc dans une victoire impérative lors des deux premiers matchs contre le Venezuela pour l'entrée en lice puis contre la Bolivie pour arriver sans maux de tête face à Tite et sa bande.

Le onze de Ricardo Gareca ne sera pas une surprise sauf blessure de dernière minute ou ajustement tactique. Le technicien argentin reconduira son 4-2-3-1 très offensif que l'on a pu observer lors de la Coupe du Monde l'été dernier. Paolo Guerrero, en pointe de l'attaque, sera l'atout majeur de cette équipe. Avec onze buts en quatre Copa América, il est le meilleur buteur de la compétition encore en activité. Le capitaine de 35 ans dispute sans doute sa dernière compétition internationale avec la sélection. Son remplaçant naturel devrait être Raúl Ruidíaz qui flambe en MLS avec les Seattle Sounders, mais qui peine souvent avec la sélection. Ricardo Gareca lui préfère parfois Jefferson Farfán selon la physionomie du match. Farfán a l'avantage de pouvoir décrocher pour se placer en 10 ou même permuter avec l'ailier droit. Ricardo Gareca aime avoir un 8, (à ne pas confondre avec un 10 classique) que l'on appelle « enganche » en Amérique latine qui désigne le milieu axial qui va lier toute l'équipe notamment en phase offensive. Christian Cueva rempli ce rôle à merveille car il a été façonné par el Tigre pour remplir cette fonction précise. Malheureusement, Gareca est toujours à la recherche de son successeur. En cours de match, il est souvent remplacé par Farfán qui prendra alors des fonctions de 10 classique. Sur l'aile gauche, Edison Flores a été la révélation lors des qualifications pour le dernier mondial et il est inamovible pour ce poste. Cueva, qui occupait ce poste avant d'être repositionné, peut cependant dépanner, voire Carillo qui permute souvent en cours de match. André Carillo est le pendant droit de Flores et aime se balader sur tout le front de l'attaque. Ses accélérations et ses coups de rein sont dévastateurs. Andy Polo évolue dans un registre similaire et fait office de remplaçant de luxe lancé lorsque les défenses adverses sont épuisées. Renato Tapia et Yoshimar Yotún sont devenus indissociables. Ce sont les destructeurs et organisateurs de l'équipe. Tapia en sentinelle devant la défense ratisse tous les ballons. Yotún organise le jeu depuis sa moitié de terrain pour se projeter vite vers l'avant jusqu'à parfois décocher une lourde frappe qui fait souvent mouche. Difficile de trouver mieux à leur poste si ce n'est l'excellent Pedro Aquino qui revient de blessure et qui est malheureusement trop juste pour cette compétition. Christofer Gonzáles est pressenti pour remplacer Yotún même si Gareca utilise souvent Edison Flores à ce poste lors de son absence.  Le jeune Jesus Pretell, révélation U20, est très intéressant dans un rôle de milieu défensif avec son club Sporting Cristal mais sa présence reste un pari de Gareca qui aime pouvoir compter sur des jeunes issus du tournoi local comme l'ont été Ruidíaz et Flores il y a deux ans avec la réussite que l'on connait.

En défense centrale, une nouvelle ère débute. Avec les absences de Christian Ramos (30 ans, Melgar) et Alberto Rodríguez (35 ans, Universitario). Anderson Santamaria est devenu la révélation à ce poste après ses bonnes prestations en sélection comme en Liga MX. L'autre titulaire en puissance est Miguel Araujo, plus discret avec son club Talleres, qu'il a rejoint en début d'année, mais en sélection il apporte pleine satisfaction. Derrière on se bouscule entre Alex Callens et Luis Abram même si ce dernier est plutôt pressenti pour remplacer Miguel Trauco au poste de latéral gauche. En revanche tout pourrait être chamboulé avec le retour de Carlos Zambrano après deux ans d'absence. Le joueur du FC Bâle était un cadre de la sélection avant qu'il ne se fasse écarter par Gareca pour indiscipline. Ses bonnes performances en club et son amour pour le maillot ont fait changer d'avis le sélectionneur. Il n'existe malheureusement aucune concurrence aux latéraux Advincula et Trauco qui sont tous les deux façonnés pour le système ultra offensif de cette Blanquirroja. Leur profil de joueurs rapides, dribbleurs et centreurs convient parfaitement en phase offensive mais observe quelques lacunes défensives notamment sur Trauco beaucoup moins physique qu'Advincula, son pendant à droite. Aldo Corzo à un profil similaire à Advincula ce qui peut permettre un remplacement en cours de match sans perdre en qualité et en équilibre. En revanche, Miguel Trauco n'a pas de remplaçant naturel et ce sera sans doute Luis Abram qui devra s'y coller mais dans un registre plus défensif.

Contre le Costa Rica, le 5 juin 2019, Pedro Gallese a fêté sa cinquantième sélection dans les cages de la Blanquirroja. Sauf blessure, il sera le titulaire indiscutable. Carlos Cáceda, le numéro 2, n'a jamais été en mesure de l’inquiéter même si le gardien actuel de Melgar a souvent fait des sorties rassurantes avec la sélection. Comme troisième gardien, Gareca mise cette fois-ci sur la jeunesse en embarquant le jeune portier du Sporting Cristal, Patricio Álvarez.

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L’Uruguay pour la seizième

Par Jérôme Lecigne 

La Celeste ayant déjà remporté quinze fois l’épreuve depuis 1916, elle est toujours un peu outsider, quoi qu’il arrive. Le poids des statistiques. C’est encore plus le cas cette année où l’effectif est le même que celui qui a terminé à la cinquième place de la dernière Coupe du Monde en Russie, meilleure équipe en dehors du continent européen, défaite contre le futur champion du monde. Depuis son voyage au pays de Dostoïevski, l’Uruguay a effectué quelques matchs amicaux, avec une tournée calamiteuse à la rentrée en septembre (défaite contre le Japon et la Corée du Sud), puis une montée en puissance avec un match globalement réussi malgré la défaite contre le Brésil à Londres en novembre, puis des matchs plus faciles de préparation lors de la China Cup en mars puis le 7 juin contre Panamá à Montevideo. Ce dernier match constituait le point d’orgue de la préparation faite en Uruguay ces dernières semaines, au sein du complexe Celeste, du nom du Clairefontaine local. Comme à son habitude, l’Uruguay a profité de sa préparation pour jouer un match amical dans son stade, devant son public, avec un prix des places très abordables. Ce match a été l’occasion de voir briller l’équipe, jeunes et anciens, avec un but de Maxi Gómez titularisé pour la première fois en pointe, et un autre magnifique de Luis Suárez, entré en fin de match, sur coup-franc. Luis semble s’être bien remis de sa blessure avec Barcelone, il arrive en pleine forme.

Ce dernier match amical a surtout été l’occasion de donner du temps de jeu aux jeunes en attaque, et aussi de faire quelques essais tactiques, car l’effectif est très stable par rapport à la dernière Coupe du Monde. Parmi les changements, on notera quelques départs dû à l’âge, même s’il n’y a pas de retraite internationale en Uruguay, certains commençaient à se faire vieux comme le latéral le plus capé Maxi Pereira, mais aussi Cristian Rodríguez ou Carlos Sánchez. Guillermo Varela s’est perdu en chemin entre problèmes d’agent et blessures, alors que Jonathan Urretaviscaya ou Gastón Silva n’ont tout simplement pas convaincu. Parmi les nouveautés dans la liste en comparaison à la russe, il y a quelques retours comme Nicolás Lodeiro ou Jonathan Rodríguez, mais aussi des joueurs ayant connu leur première sélection au printemps comme Giovanni González ou Marcelo Sarrachi. Il n’en reste pas moins que ces changements se font à la marge, car le onze titulaire, lui, a peu ou pas bougé.

Poste par poste, on devrait retrouver comme gardien titulaire Fernando Muslera. Le joueur de Galatasaray reste indéboulonnable depuis 2009 et ce fameux match qualificatif pour l’Afrique du Sud en Équateur. Avec 107 sélections, à seulement 32 ans (pour un gardien), Nando devrait continuer pour quelques années, perpétuant la tradition des gardiens uruguayens gardant pendant longtemps la clef des cages. Derrière, les remplaçants sont Martín Campaña et Martín Silva. En défense, la triplette magique va être réalignée avec une charnière Josema Gímenez et Diego Godín (capitaine) dans l’axe. Les deux se connaissent par cœur, jouant ensemble en club. Ils représentent le changement générationnel en Uruguay avec un Diego Godin âgé de 33 ans dont on ne sait pas si le physique permettra de tenir encore trois ans, et un José María qui n’a « que » 24 ans, presque dix ans plus jeune. Si sa carrière le laisse s’épanouir, ce sera lui, le futur capitaine, dans la lignée de Lugano et donc de Godín. Sur le côté droit, on retrouvera encore un pilier en la personne de Martín Caceres. Côté gauche, Diego Laxalt a toujours été très bon en sélection malgré des hauts et des bas concernant sa carrière en club. C’est lui qui sera sans doute reconduit pour cette compétition, avec la pression de petits jeunes derrières, comme Marcelo Saracchi. Les autres remplaçants étant Sebastián Coates dans l’axe et Giovanni González côté droit. Le milieu est un petit peu plus en chantier. On pensait depuis un certain match de Coupe du Monde dominé facilement trois à zéro contre la Russie, que Lucas Torreira, Matías Vecino, Rodrigo Bentancur et Nahitan Nández étaient désormais partis pour durer. Sauf que dans ce schéma, comme on l’a vu contre la France à deux reprises, il manque de la folie, de la création, ce petit truc en plus qui fait que les deux de devant se retrouvent approvisionnés. Alors le Maestro a essayé plusieurs possibilités, incluant notamment Giorgian de Arrascaeta côté gauche, pour écarter sur les côtés, Nicolás Lodeiro ou Federico Valverde, pour rajouter de la qualité de passe et de la percussion. Dans ce cas, les victimes seraient Lucas Torreira ou Matías Vecino. En attaque, on retrouvera évidemment les deux cracks de la sélection, Edinson Cavani et Luis Suárez. Les deux auront du mal à aller jusqu’au Qatar, mais peuvent tout à fait encore faire mal à de nombreuses défenses par leur qualité de jeu et leur incroyable sens du but. Derrière, la nouvelle génération arrive avec Gaston Pereiro, Jonathan Rodríguez ou Maxi Gómez. Avec toujours évidemment Christian Stuani.

Dans cet effectif, quelques joueurs seulement, mais les plus importants, s’acheminent vers la fin de leur carrière, Godín, Caceres, Suárez et Cavani. Même s’ils pourront toujours être là pour la prochaine Copa América l’année prochaine, ils auront pour sûr à cœur de montrer de belles choses et de confirmer leur excellente Coupe du Monde par un trophée en bonne et due forme. Surtout face aux amis et voisins du nord. Le groupe parait à la portée de l’équipe avec un Chili et un Équateur en chantier, et un Japon expérimental. Le premier grand rendez-vous sera face au Chili, le duel s’étant tendu depuis un certain match et un certain doigt en 2015.

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Venezuela, la plus belle côte

Par Nicolas Cougot

Quart de finaliste en 2016, avec une génération de U20 qui arrive auréolée d’une finale de Coupe du Monde de la catégorie, un sélectionneur qui chapeaute l’ensemble des sélections et assure une continuité suivant à la lettre le modèle Óscar Tabárez et des talents qui s’exportent désormais à l’international, si vous aviez une petite pièce à miser sur un outsider potentiel, le profil parfait serait le Venezuela.

Le schéma de Dudamel est connu de tous. Un 4-1-4-1 en phase défensive qui cherche à fermer au milieu en le densifiant et un bloc compact, souvent moins de trente mètres séparant ligne arrière de l’attaquant de pointe. Ce système est huilé, il a permis notamment de contrôler l’Argentine lors du dernier amical et ne cesse de faire ses preuves. S’il laisse parfois des espaces sur les côtés (car la densité est surtout mise au cœur du jeu) et manque parfois de justesse en phase de transition, ce système bascule immédiatement vers un 4-3-3 en phase offensive. Tout est parfaitement assimilé par les joueurs qui ne cessent d’accumuler les matchs amicaux pour le parfaire. Avec des résultats globalement satisfaisants : en 2019, le Venezuela a scalpé l’Argentine et les États-Unis, est tombé face au redoutable Mexique de Tata Martino et a été accroché sur le fil par l’Équateur. Et surtout plus que du jeu, il a acquis la foi en un projet nommé Qatar 2022. La Copa América 2019 n’est donc qu’une étape, mais une étape importante. Elle va servir d’une part à poursuivre le travail, à cumuler les matchs de très haut niveau en vue des éliminatoires de mars 2020, mais surtout elle va aussi servir à valider ce qui a été accompli jusqu’ici. Dudamel connait à merveille son groupe et la fédération lui a adjoint un homme d’expérience en la personne de Pacho Maturana. Le duo a tout pour continuer de faire avancer une des sélections de l’avenir sur le continent.

Mais pour que tout cela fonctionne, il ne faut pas que des idées, il faut aussi et surtout des hommes. Et le Venezuela en a. Dudamel connait sa colonne vertébrale : l’immense Wuilker Faríñez, 21 ans et probablement futur meilleur gardien du continent (si ce n’est pas déjà le cas), Yordan Osorio et Roberto Rosales en défense, le premier dans l’axe, le second dans son couloir, Tomás Rincón en capitaine guide au milieu, et Salomón Rondón en buteur de légende devant. Autour de ce squelette, gravitent des hommes comme Jhon Chancellor, Luis Mago ou Mikel Villanueva en défense, tous disposant de grandes qualités dans le jeu aérien, un maître à jouer reculé comme Yangel Herrera, essentiel dans le jeu de transition et des milieux de couloir rapides tels que Darwin Machís, Jhon Murillo ou Yefferson Soteldo, repêché de dernière minute, et des capacités à se montrer létal devant comme le symbolise le joker de luxe de la sélection un certain Josef Martínez.

C’est donc une Vinotinto pleine de promesses et qui a tout de l’empêcheur de tourner en rond qui se rend au Brésil. Si l’objectif n’est pas à première vue d’aller décrocher le titre, le Venezuela est un sérieux candidat à la qualification dans un groupe où il devra surtout se focaliser sur le Pérou, son adversaire direct et opposant du match d’ouverture et d’une Bolivie sur laquelle il semble supérieur. Une mission qui semble loin d’être impossible d’autant que le système mis en place par Rafael Dudamel a tout pour venir gâcher également la fête des Brésiliens.

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Japon et Qatar veulent apprendre

Par Nicolas Cougot

Vingt-ans plus tard, le Japon est de retour en Amérique du Sud. Si l’édition 1999 avait servi de baroud d’honneur à la génération Coupe du Monde 1998 (lire Lucarne Opposée magazine n°7), celle de 2019 n’a qu’un seul intérêt pour Hajime Moriyasu, préparer les Jeux Olympiques de Tokyo. Alors il faudra oublier d’envisager croiser une sélection huitième de finaliste mondial et finaliste de la dernière Coupe d’Asie. Au lieu de cela, les Samurai Blue qui se présentent au Brésil seront en majorité des novices. Sur les vingt-trois sélectionnés, seuls sept comptent au moins une sélection, le reste n’ayant jamais disputé la moindre minute sous les couleurs nippones. Le pire dans tout cela est que Moriyasu n’a même pas utilisé les deux derniers matchs amicaux pour faire débuter ses jeunes et surtout donner une idée de ce à quoi le Japon ressemblerait, la victoire acquise face au Salvador n’ayant vu que quatre joueurs du voyage au Brésil disputer la rencontre. Parmi eux, celui que tout le monde attend, Takefusa Kubo. Le « Messi » japonais avait été surnommé ainsi notamment après que le FC Barcelone l’avait recruté à dix ans avant (enfin !) de se faire rattraper la FIFA pour un transfert de mineurs. De retour au Japon où il a commencé à confirmer avec notamment le FC Tokyo, Kubo est désormais majeur et son arrivée au Real Madrid en fait qu’il sera l’une des attractions de la compétition. Au sein de cette sélection aussi expérimentale qu’inexpérimentée, on s’intéressera aussi au jeune défenseur de Takehiro Tomiyasu (l’un des rares à compter déjà quelques selections avant la Copa) mais aussi à Koji Miyoshi (Yokohama F. Marinos), Yuta Nakayama (PEC Zwolle) ou encore Ko Itakura (Groningen).  Pour encadrer tout ce groupe, trois joueurs plus expérimentés : Eiji Kawashima (Strasbourg), Shinji Okasaki (Leicester) et Gaku Shibasaki (Getafe). Reste désormais à savoir si l’histoire sera belle ou si l’affaire ne tournera pas rapidement au cauchemar. Car avec un groupe composé de l’Uruguay, du Chili, et de l’Équateur, le Japon n’aura pas le temps de trop experimenter.

Longtemps aussi inconnu qu’entouré des mythes souvent associés à la méconnaissance, le, Qatar s’est fait un nom en janvier dernier. La bande dirigée par Félix Sánchez avait fixé comme ambition d’apprendre en 2019, mais celle-ci a été modifiée et surtout accélérée par une énorme performance en Coupe d’Asie qui a vu les Bassam Al-Rawi, Akram Afif, et surtout Ali Almoez s’offrir la couronne asiatique. De quoi faire changer les regards sur le futur hôte de la Coupe du Monde qui arrive ainsi au Brésil avec bien plus d’arguments et de certitudes que le géant japonais. Les hommes de l’Espagnol seront donc présents pour la première fois en Amérique du Sud pour poursuivre leur apprentissage accéléré, s’appuieront toujours sur les recettes de l’ancien coach de l’Aspire Academy (lire Coupe d’Asie 2019 : Félix Sánchez, l’homme qui fait grandir le Qatar), leur capacité à défendre et rapidement se porter à l’attaque en contre sera mise à rude épreuve mais le test s’annonce excitant, d’autant que le petit inconnu n’est plus considéré avec mépris par les membres de la CONMEBOL. Premier arrivé au Brésil, le Qatar se retrouve dans un groupe des plus relevé avec notamment deux géants annoncés que sont Argentine et Colombie et un sud-américain qu’il avait battu il y a 10 ans en amical, le Paraguay.

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.