Il aura fallu attendre vingt-huit trop longues années pour qu’enfin la joie revienne illuminer les visages argentins un soir de finale. Au terme d’un match totalement maîtrisé, l’Argentine décroche la Copa América, au Brésil, au Maracanã.

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À l’heure de pénétrer sur la pelouse du Maracanã, l’Argentine n’avait absolument aucun chiffre en sa faveur. Trois victoires en douze matchs disputés dans ce stade mythique, la dernière en 1998, un Brésil qui n’avait jamais perdu la moindre Copa América qu’il avait organisé et une seule victoire albiceleste sur les dix-neuf derniers affrontements avec la Seleção en terres brésiliennes. Mais l’avantage avec les statistiques, c’est qu’elles ne servent qu’à être démenties. Et l’Argentine l’a fait avec maîtrise.

Avant la rencontre, le peuple argentin s’en remettait à son D10S, lui demandant d’illuminer la route de ses albicelestes et ainsi vaincre cette terrible malédiction. Au coup d’envoi, les questions grandissaient en voyant les compositions : car si le Brésil faisait dans le grand classique, sans aucune surprise dans son onze, côté Argentine, on assistait retour de Cuti Romero dans l’axe, à celui de Gonzalo Montiel et ses trois matchs et demi aligné à droite, Marcos Acuña était préféré à gauche et surtout Ángel Di María aligné devant alors que son travail de repli reste moins important que celui d’un Nico González. Et pourtant, rien ne s’est passé comme prévu. Oublié le vertige habituel de l’Argentine, si un pressing se mettait en place, pas de débauche d’énergie sans compter et un match qui tourne au round d’observation où chacun se surveille et se frappe. Un vrai clásico en somme. Et très vite aussi, la maîtrise argentine qui se met en place. Le milieu de terrain a clairement identifié le meilleur moyen de réduire le Brésil au silence : il suffit de couper la liaison Lucas Paquetá – Neymar. Cela fonctionne à merveille, le Brésil n’arrive pas à menacer Dibu Martínez, Scaloni répond aux plans de Tite, « nous ne neutralisons pas, nous réduisons les opportunités adverses ». Et l’Argentine saisit la moindre opportunité. Une merveille de long ballon de Rodrigo de Paul, une mauvaise appréciation de Renan Lodi et Ángel Di María file ajuster Ederson comme il avait ajusté Ambruse Vanzekin il y a dix-sept ans un soir de titre – le seul de sa génération – aux Jeux Olympiques. L’Argentine vire en tête, le Brésil reste impuissant.

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On attend alors de voir quelle(s) solution(s) Tite va bien pouvoir trouver au retour des vestiaires. Il choisit de dépeupler son milieu, sortant un Fred invisible pour faire entrer Roberto Firmino. Sans succès. Avec un Rodrigo De Paul qui a décidé de faire de la finale la sienne, l’Argentine maîtrise totalement, gère les temps forts et les temps faibles, gère un Neymar qui tente ce qu’il peut mais se trouve bien seul et si l’entrée de Gabi génère quelques dangers, Emi Martínez veille, impérial dans ses cages. Rien ne peut arriver à cette Argentine, les changements de Scaloni sont les bons au bon moment, comme si l’illumination avait touché chaque membre de la délégation. Une dernière immense occasion, un bonbon de De Paul, une tentative de dribble magnifique de Messi est annihilée par une pelouse à l’état douteux, nous privant du bouquet final, du moment que tout un peuple attendait. Mais qu’importe, l’Argentine contrôle totalement le temps additionnel, le Brésil ne se crée aucune occasion lors de celui-ci et doit se résigner, comme le comprend assez rapidement son leader Casemiro, à voir le titre lui échapper. Jamais le Brésil n’avait perdu une Copa América chez lui. Il était arrivé en grandissime favori dans une compétition à l’organisation très controversé. Ses joueurs s’était encore plus éloigné de leur public durant celle-ci. L’échec est immense, les fissures importantes. De nombreuses certitudes pourraient bien s’être envolées. Plus au sud, l’exploit est immense. L’Argentine s’est trouvée une équipe, trouvé un équilibre et à une semaine de l’anniversaire du Maracanazo, en a imposé un nouveau au peuple auriverde en même temps qu’elle a mis fin à vingt-huit trop longues années de mutisme. L’année de la première Copa sans Diego. Fichue mystique.

 

Crédits photos : imago images/PanoramiC

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.