Nacional remporte le clásico et le seul suspense restant concerne le Clausura grâce à un très bon River Plate. Il n’y a pas eu de surprise et Peñarol va devoir se battre jusqu’au bout pour les accessits.

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On le sentait venir et en même temps les clásicos ne sont pas des matchs comme les autres. Alors, on se disait que le scénario pouvait laisser la place à la surprise, à la folie, voire même à la violence. Il y a de cela quelques années, une pluie de cartons rouges se seraient abattues sur le Gran Parque Central. Finalement, est-ce le VAR, est-ce la supériorité évidente d’une équipe sur l’autre ? Il n’y a rien eu de tout cela et Nacional, la meilleure équipe, le favori, l’a emporté logiquement sur le score de 3-1. Un score qui comme tous les scores ne donne qu’une indication du match qui a été vu par tout l’Uruguay : dans le jeu, Peñarol n’a pas existé.

Le Gran Parque Central était plein comme un œuf pour recevoir le grand adversaire de toujours avec trois tribunes pleines comme on l’a rarement vu en Uruguay et une troisième, la Scarone, recevant quelques deux mille supporters de Peñarol. Nacional, sans surprise, joue avec Luis Suárez et Franco Fagúndez devant. Côté Peñarol, peu de surprise également, un seul attaquant mais un milieu axial composé de Gargano et Milesi, Cristóforo passant sur le banc. Un temps, dans la semaine, il avait été question de faire jouer les trois ensembles. Cela n’aurait pas été de trop car le milieu de Nacional a confisqué la balle et la gestion du jeu en première mi-temps, ne laissant que des miettes de ballon long à son adversaire. Felipe Carballo a été virevoltant, et c’est presque un miracle si l’on arrivait à la mi-temps avec un score nul et vierge… jusqu’à ce que Laborda marque de la tête sur corner à la 45e. Peñarol revenait des vestiaires avec un tout petit peu plus d’ambition mais se faisait punir logiquement par le petit jeune Luis Suárez qui marquait un but magnifique sur une touche. Il laissait le ballon rebondir devant lui avant de le reprendre de demi-volée pleine lucarne de Dawson. Magnifique but, Suárez pouvait ensuite se moquer de l’ancien président de Peñarol Barrera en allant s’asseoir sur le banc mimant d’être remplaçant alors que ce dernier avait déclaré que Suárez ferait le remplaçant idéal de Núñez en sélection. Peñarol continuait malgré tout d’essayer et réduisait l’écart par Kevin Mendez (encore une fois le meilleur côté Peñarol) à l’heure de jeu, sur une belle action collective devant la surface. Mais à peine dix minutes plus tard, Camilo Candido redonnait la marge nécessaire à Nacional pour vivre une fin de match confortable, rendue encore plus confortable par un arrêt magnifique de Rochet sur l’une des dernières incursions de Peñarol.

Au final, le match donne l’impression d’avoir été contrôlé par Nacional. La peur de se faire prendre en contre a sans doute un peu bridée l’élan de l’équipe de Repetto. Mais quand on compare le match des deux équipes, une évidence s’impose : la supériorité absolue, sur ce match et sur cette année, de Nacional. C’est le cas notamment à des postes clefs : les latéraux (mauvais match encore d’Aguirregaray et de Ramos, bon match du Pumita Rodríguez), de l’axe au milieu, de l’attaque… Côté Peñarol, la mayonnaise Ramos avec les sept-huit recrues n’a pas prise. L’équipe va devoir se battre maintenant pour la place d’Uruguay 2 en Libertadores, mission quasi-impossible. Les places de 3 et 4 ne servant à rien, on souhaite presque à Peñarol une cinquième place pour s’offrir, qui sait, comme en 2021, un beau parcours en Sudamericana. Côté Nacional, l’arrivée de Suárez a été un fait éminemment positif mais a aussi inquiété un peu : et si le Pistolero ne s’intégrait pas dans le dispositif ? Et si ce rouage, aussi magnifique soit-il, grippait la machine ? Finalement, rien de tout cela, le joueur est très positif dans toute son action sur le front de l’attaque, et il a remplacé en mieux le Puma Gigliotti. Finalement, sa préparation en Uruguay se passe à merveille. Et si vous ne me croyez pas, demandez aux spectateurs du Gran Parque Central.

Point négatif de la rencontre, des incidents ont encore émaillés le match forçant à faire une pause de dix minutes en deuxième mi-temps. Les supporters des deux équipes se sont envoyés des pierres, les supporters de Peñarol ont trouvé leur tribune couverte d’huile de moteur, avant de déployer pendant le match une poule gonflable du même type que celle de 2008, mais de bien moins bonne qualité. Les toilettes ont été détruites, Nacional a dû couper l’arrivée d’eau dans la tribune… Bref, devant l’impossibilité de trouver une solution, et pour éviter des frais et des blessures, le consensus général est de réserver ce type de match aux supporters du club recevant. C’est triste, mais ni la prévention ni la répression ne fonctionnent.

Pour le reste, River continue en tête du classement du Clausura avec une sixième victoire en six matchs. L’équipe de Díaz commence à ressembler à un vrai candidat au tournoi et sera une épine dans le pied de Nacional qui aimerait se simplifier la vie en gagnant le Clausura mais qui a déjà perdu un match, le premier contre Maldonado. River s’est imposé logiquement 5-1 contre Cerrito avec un très bon Borbas mais aussi un bon Maxi Pereira (Peñarol cherche un latéral droit mais a viré Pereira il y a moins d’un an…) mais aussi Chory Castro, Urretaviscaya, Montiel… Defensor a battu Wanderers (1-0), Liverpool a encore perdu des points lors du nul contre Danubio. En bas, Albion bat Torque et met la pression sur son adversaire mais aussi Cerro Largo, qui n’a plus d’avance pour le maintien.

Résultats et classement

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Photo : PABLO PORCIUNCULA/AFP via Getty Images

Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba