Toutes les fédérations affiliées à la FIFA connaissent le règlement : aucune ingérence juridique et politique ne doit venir perturber leur bon fonctionnement sous peine de suspension. Cette menace a été mise à exécution pour la All India Football Federation (AIFF) avec effet immédiat.

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Comme l'indique le communiqué de la FIFA publié ce mardi, la fédération indienne a été suspendue « pour cause d'influence indue de tiers, ce qui constitue une grave violation des Statuts de la FIFA ».

Pourquoi la AIFF est-elle suspendue ?

Petit retour en arrière pour comprendre la décision de l'organe dirigeant du football mondial. Le 18 mai 2022, la Cour Suprême indienne décide d'évincer Praful Patel, président de l'AIFF depuis 2009, pour ne pas avoir organisé les élections à la présidence de la fédération en décembre 2020. Pour le remplacer, la Cour Suprême a nommé un comité d'administration composé de trois membres et dirigé par Anil R. Dave, ancien juge de la Cour Suprême, accompagné de l'ancien Commissaire Électoral en chef de l'Inde, S.Y. Quraishi et l'ancien gardien international et capitaine de la sélection indienne, Bhaskar Ganguly. La FIFA n'a néanmoins pas pris de sanction immédiatement, laissant le soin à l'Asian Football Confederation (AFC) de mener des discussions avec les autorités indiennes dont les conclusions ont été rendues le 23 juin dernier. Celles-ci indiquaient les prochaines étapes : ratifier les statuts de l'AIFF en accord avec les principes de bonne gouvernance de la FIFA et de l'AFC ainsi que la tenue d'un congrès électoral pour choisir la prochaine direction de l'AIFF.

Le 16 juillet, un projet de constitution de l'AIFF a été soumis à la Cour Suprême et également à la FIFA. Cette dernière, dans une lettre, fait par des ses inquiétudes sur plusieurs sujets comme le rapporte Firstpost, notamment sur le fait de prévoir une représentation à 50% d'anciens joueurs au collège électoral de l'AIFF et au conseil exécutif. Une idée jugée « imprudente » par la FIFA qui préfèrerait abaisser le curseur à 25%. Le fait de voir un membre du Comité exécutif de l'AIFF renoncer à ses fonctions publiques et inversement n'est pas du goût de la FIFA qui voit ici un frein aux élections de l'AIFF et locales. Si le président du comité exécutif est concerné, il pourra être remplacé temporairement jusqu'à une prochaine assemblée générale, sans préciser si le remplaçant doit être déjà en poste. Un procédé qui inquiète la FIFA qui voit ici une menace pour l'importance des représentants élus. Enfin, la FIFA met en avant son désaccord concernant la possibilité pour la Cour Suprême de valider ou non les futures modifications des statuts de l'AIFF. Mais faisant fi des recommandations de la fédération internationale, la Cour Suprême décide d'adopter le projet de constitution de l'AIFF le 3 août. Elle prévoit également que les élections devront se tenir le plus rapidement possible pour que les résultats soient annoncés à la fin du mois. Le 6 août, la FIFA menace une première fois de suspendre l'AIFF. Le 16 août, la menace est mise à exécution.

Quelle conséquence sur le football indien ?

Si cette suspension n'impacte pas le déroulement du football local, à savoir le championnat indien, elle empêche à l'Inde (clubs et sélection) de disputer la moindre rencontre continentale ou internationale. Ainsi, la sélection masculine qui devait disputer des matchs amicaux face à Singapour et au Vietnam en septembre pourrait bien se retrouver sans rencontre à disputer. AKT Mohun Bagan devrait être exclu de l'AFC Cup 2022 alors qu'une demi-finale interzone se profile le 7 septembre. Chez les féminines, Gokulam Kerala devait disputer sa phase de groupe de la Champions League asiatique à compter du 23 août et s'est vu signifier son exclusion alors que les joueuses étaient déjà arrivées en Ouzbékistan. L'autre gros impact de cette décision de la FIFA est la perte de l'organisation de la Coupe du Monde féminine U17 prévue en octobre prochain. Une compétition sur laquelle l'Inde misait énormément pour le développement de son image et du football dans le pays. Même si personne n'oubliera le fiasco de l'organisation de la Coupe d'Asie féminine en plus tôt cette année (abandon de l'Inde, stades vides...).

Pour revenir sur sa décision, la FIFA stipule qu'il est nécessaire « d’établir une commission d’administrateurs afin d’exercer les pouvoirs du comité exécutif de l’AIFF et que l’administration de l’AIFF sera de nouveau pleinement en charge des affaires courantes ». Du côté indien, l'incompréhension règne comme l'indique un communiqué. Anil R. Dave a également déclaré : « Il est regrettable de voir une telle directive de la FIFA à un moment où tous les efforts étaient faits pour remettre le football indien sur la bonne voie. Cela étant dit, nous sommes constamment en pourparlers avec toutes les parties prenantes, y compris la FIFA, pour trouver la bonne solution à cette situation et remettre le ballon sur les rails. Il est vraiment déplorable que durant presque [les] deux dernières années, l'organe, dont le mandat était déjà terminé, a continué à agir de manière absolument antidémocratique et illégale, sans qu'aucune mesure ne soit prise. Mais lorsque l'honorable Cour suprême a rendu une ordonnance pour remettre les choses en ordre afin qu'un organe démocratiquement élu prenne les choses en main et lorsque la CoA et le ministère des Sports ont fait de leur mieux pour mettre en œuvre l'ordonnance de l'honorable Cour suprême, l'ordonnance de suspension a été adoptée par la FIFA ».

Baptiste Mourigal
Baptiste Mourigal
Rédacteur Asie, spécialisé Corée du Sud (K League, KFA) à suivre sur @KleagueFR