Il y a eu du spectacle et des scénarios haletants à travers tout le continent lors de cette avant-dernière journée. De quoi augurer d’une dernière journée de feu mardi. En attendant, quelques confirmations quand même et une très belle surprise.

Revivifié par sa victoire en Inde, l’Afghanistan sait qu’il a une carte à jouer dans ce groupe où les poursuivants du Qatar rivalisent de médiocrité. Face à ce même Qatar qui les avait éparpillés façon puzzle 8-1 au match aller, les hommes de Westwood vont effectuer une solide performance pour arracher un précieux 0-0 qu’il s’agira de faire fructifier au Koweït et espérer ainsi rejoindre un troisième tour encore inenvisageable il y a quelques mois. Pour les dernières sorties de la légende Chhetri sous la liquette indienne, les Blue Tigers avaient à cœur de mettre un grand coup sur la tête de leurs poursuivants koweïtiens et prendre de l’avance dans la course à la deuxième place. Mais les deux équipes n’ont pas su se départager, par manque d’efficacité, de talent, voire probablement des deux. L’Inde a marqué deux buts en cinq matchs et devra espérer que le Koweït et l’Afghanistan se neutralisent mardi pour atteindre le troisième tour.

Nouvelle manita pour le Japon, rien à signaler, dans l’humidité birmane. Un doublé pour Keito Nakamura, un pour Koki Ogawa et une praline de Ritsu Doan pour clore le tout. Les Japonais continuent leur parcours tranquille et parfait en attendant le tour suivant. Ce qui est bien avec la Corée du Nord, c’est qu’on peut toujours s’attendre à des surprises. Ainsi, out of nowhere, ceux-ci avaient décidé de déclarer forfait pour la réception du Japon. Si les relations avec le voisin sont toujours un peu particulières et pouvaient expliquer ce revirement de situation, ils vont simplement décider de disputer leurs derniers matchs à domicile loin de leur base, à Vientiane au Laos. Une décision incompréhensible tant le déplacement à Pyongyang est un véritable traquenard dont peu reviennent indemnes. Bien entendu, impossible d’accéder au live, ce qui n’empêche pas les Nord-Coréens d’arracher un énorme succès grâce au but du revenant Jong Il-gwan dans le temps additionnel. Un point derrière la Syrie, la Corée du Nord reçoit un Myanmar éclaté 6-1 au match aller, tandis que les Aigles de Qasioun se déplacent au Japon et pourront regretter amèrement ce match nul surprise en terres birmanes en mars.

En déplacement à Singapour, la Corée du Sud n'avait besoin que d'un match nul pour assurer sa place au troisième tour. Malgré les remous que traverse la Korea Football Association, la mission était largement à la portée des Guerriers Taeguk. Pour sa première sur le banc, Kim Do-hoon n'a pas révolutionné l'équipe offrant simplement une première sélection à Hwang In-jae (Daegu) sur le flanc droit de la défense. De retour, Jung Woo-young retrouvait son poste devant la défense. Même si un infime espoir existait pour Singapour de se qualifier, il fallait réaliser un énorme exploit face aux Sud-Coréens. Les très maigres espoirs n'auront duré que dix minutes. Le temps nécessaire à la Corée du Sud de se mettre en place et à Lee Kang-in de réaliser un enchaînement magnifique dans la surface pour donner l'avantage à son pays. Les vannes étaient ouvertes. Joo Min-kyu (pour son premier but international), Son Heung-min par deux fois, de nouveau Lee Kang-in, Bae Jun-ho (première sélection premier but) et Hwang Hee-chan ont envoyé le cuir au fond. Une déroute totale pour Singapour face à des Sud-Coréens appliqués qui décrochent donc officiellement leur billet pour le tour suivant. Mais attention, une nouvelle fois les Guerriers Taeguk ont été en difficulté sur coup de pied arrêté et sur les centres. Face à la Chine, pas encore qualifiée, les Sud-Coréens joueront une place dans le chapeau 1 pour le tirage au sort du troisième tour.

Le calcul était simple pour les Thaïs : ne pas perdre. Gagner serait encore mieux mais une chose à la fois. Distancés de trois points au coup d’envoi, ce sont eux qui prennent les choses en main en première mi-temps. Leurs efforts sont vite récompensés par Sarachat qui smashe un bon centre de Jaided dans les filets. En fin de période, Mueanta a l’occasion de faire le break mais son tir trop croisé s’écrase sur le poteau. Toujours aussi brouillonne, la Chine a l’occasion de revenir dans le match mais Fernandinho voit son penalty s’envoler dans les nuages. La Thaïlande pousse pour inscrire le deuxième but mais manque d’efficacité. Et ce qui devait arriver arriva. Entré en jeu, le Chinois d’origine kazakhe Behraw Abdulwali est à la retombée d’un coup-franc pour remettre les deux équipes à égalité. La Thaïlande a encore une chance : elle doit s’imposer largement contre Singapour à domicile, tout en espérant une défaite de la Chine en Corée du Sud. Étant donné le passif entre les deux nations, il y a fort à parier que les Coréens ne lèveront pas le pied. À voir si les Éléphants de Guerre et leur jeu soyeux seront au tour suivant pour nous en mettre plein les yeux.

Transformés depuis l’arrivée de Jaroslav Silhavy, les Omanais s’étaient offert deux victoires coup sur coup contre la Malaisie pour bien lancer leur aventure commune. Pour ce déplacement facile à Taïwan, il suffisait de finir le travail pour éventuellement se qualifier suivant les autres résultats du soir. Ce fut chose faite facilement grâce à un triplé d’Al-Mushaifri qui place Oman aux commandes du groupe avec douze points. La petite finale contre les Kirghizs mardi aura pour but de confirmer leur remontée en puissance. Pour Taïwan, le chemin de croix dans l’anonymat continue.

Sur une belle dynamique depuis l’arrivée de Tarkovic et sa politique de réjuvénation, le Kirghizistan apprend tous les jours et semble se rapprocher chaque fois un peu plus du haut niveau asiatique. Face à une Malaisie vieille, malade et sans idées, on se dit que les Kirghiz peuvent frapper un grand coup en s’imposant dans un match à six points pour valider leur passage au tour suivant. Raté. Malgré l’ouverture du score méritée par Gulzygit Alikulov, les Malaisiens sont revenus dans le match sur un contre-son-camp de Valery Kishin sur un coup-franc. Sonnés par ce coup du sort, les hommes de Tarkovic ne parviennent pas à s’imposer et laissent surtout à la Malaisie l’opportunité de leur passer devant. Si la Malaisie cartonne Taïwan et que les Kirghizs perdent à Oman, ce pourrait être les Harimau qui s’inviteront au prochain épisode !

Déjà qualifiés, les Iraniens avaient à cœur de soigner leurs stats et de s’offrir la première place du groupe dans ce duel à distance avec les Ouzbeks. Face à eux, une formation de Hong Kong en mode porc-épic qui leur avait donné un mal à retordre lors de la dernière Coupe d’Asie. Il y eut un peu plus de buts cette fois-ci avec un triplé de Taremi (dont deux penalties) et un but d’Azmoun, auxquels ont répondu Ma Hei Wai et le jeune Anthony Pinto, dix-huit ans et sociétaire de Bolton Wanderers. Dans le derby des steppes, la première mi-temps fut plaisante et disputée. À l’ouverture du score d’Alikulov pour les Ouzbeks, les Turkmènes répondaient sur un beau mouvement conclu par Tirkisov. Mais la supériorité ouzbek se matérialisait rapidement, puisque quatre minutes plus tard, un superbe une-deux entre Shomurodov et Urunov voyait le second glisser astucieusement le ballon dans les filets turkmènes. Les offensives se poursuivaient et c’est bien Nasrullaev qui clôturait le score à la 70e minute. Place à la finale du groupe à Téhéran maintenant !

L’une des grosses affiches de cette journée. L’Indonésie, avec son équipe new-look, avait l’occasion de valider sa place au tour suivant et de montrer au monde qu’elle pouvait aussi faire tomber les gros bras. Las. Un Irak bien organisé et intelligent n’a pas trop forcé pour venir à bout des Garuda malgré le soutien des 60 000 spectateurs. Devant sur un penalty d’Aymen Hussein consécutif à une main de Hubner, ils voyaient ensuite Jordi Amat expulsé en position de dernier défenseur. La messe était dite, gestion et contre-attaque devenaient la règle. Aymen loupait même un deuxième penalty, mais Ali Jasim mettait fin au suspense sur une grossière erreur d’Ernando Ari. Tout se jouera lors de la réception des Philippines mardi, une rencontre à priori plus facile mais qu’il ne faudra pas prendre à la légère.

Match de première pour le coach sud-coréen du Vietnam, Kim Sang-sik, qui aura à cœur de faire aussi bien, voire mieux que son illustre prédécesseur Park Hang-seo. Face à lui, une équipe philippine avec de nombreux renforts, mais une culture foot plutôt embryonnaire. Si la première mi-temps est soporifique, la seconde nous offrait une pelletée d’émotions. Concrétisant un petit temps fort, Patrick Reichelt ouvrait le score pour les Azkals un peu à la surprise générale. Un coup de bambou qui avait le mérite de réveiller les Vietnamiens. Trois minutes après l’ouverture du score, Nguyễn Tiến Linh remettait les deux équipes à égalité sur une belle passe de Nguyễn Văn Toàn. Et bientôt devant avec une belle tête sur un centre de Phan Tuấn Tài. Mais, re-surprise quand la volée surpuissante de Kevin Ingreso trouait les filets vietnamiens à la 89e. On se disait que c’est une bien mauvaise première pour le coach sud-coréen. Jusqu’à la 6e minute du temps additionnel qui voyait Phan Tuấn Tài reprendre un tir repoussé par Neil Etheridge et le smasher dans le goal philippin. Le Vietnam a de la ressource et peut encore rêver de troisième tour. Pour cela, il faudra s’imposer chez un Irak démobilisé et espérer un faux-pas de l’Indonésie à domicile face aux Philippines. Peu probable mais les dieux du foot sont taquins.

Rien à signaler pour l’Arabie saoudite, facile vainqueur d’un faible Pakistan sur un doublé d’Al-Buraikan et un pion du jeune Al-Juwayr. Pendant ce temps se disputait LA finale de cette journée. Pour ces retrouvailles depuis la Coupe d’Asie, l’équation était simple. Si le Tadjikistan parvenait à tenir le nul à Amman, il ne lui faudrait que finir le boulot face au Pakistan lors de la prochaine rencontre, tandis que la Jordanie devait se déplacer en Arabie saoudite. Mais les hommes d’Ammouta avaient à cœur de montrer qu’ils restaient supérieurs aux Tadjiks. L’expérience a parlé et les Jordaniens plantent trois fois en seconde mi-temps par Olwan, Al-Naimat et Sadeh pour définitivement écarter les Lions du Pamir. L’avenir semble glorieux pour le Tadjikistan, à condition d’apprendre de ces défaites. Nul doute qu’on les reverra à la prochaine Coupe d’Asie. En attendant, c’est la Jordanie qui accompagnera les Saoudiens au troisième tour.

Face à un Népal sans espoir, les Émirats ont étrenné leur classe biberon pour un succès avec la manière. Quatre buts marqués, un doublé pour Harib Suhail et deux pour Saleh et Abbas. La relève est peut-être là pour les Émiratis ! L’occasion de tourner bientôt la page des dinosaures locaux. Malgré un infime espoir, le Yémen peut avoir des regrets. En loupant son penalty à la 45e minute, Al-Matari a brisé l’élan qui aurait pu voir les Yéménites finir deuxièmes sur un gros concours de circonstances. Finalement, les deux équipes se sont neutralisées et Bahreïn peut souffler dans sa médiocrité. Peu de chances de les voir en Coupe du Monde, même s’ils risquent d’embêter quelques équipes à gauche à droite.

La domination australienne dans son groupe se poursuit avec une cinquième victoire, sur le Bangladesh à Dhaka. Ajdin Hrustic a ouvert le score en première mi-temps grâce à une frappe lointaine déviée puis Kusini Yengi a repris de la tête un superbe centre de Jordy Bos pour porter le score à 2-0 pour l'Australie à la 61e minute, ce qui a permis de revenir au pays avec la victoire et un clean sheet. L'ailier de dix-huit ans Nestory Irankunda, nouveau joueur du Bayern, est devenu le 643e Socceroo de l’histoire en faisant ses débuts, Joe Gauci a débuté dans les buts à la place de Mathew Ryan, blessé, tandis qu'Arnold a déployé Kusini Yengi et Mitch Duke en attaque pour le deuxième match consécutif. L'Australie a fait ce qu'il fallait pour rester invaincue avec cinq victoires et cinq clean sheets en cinq matchs.

Enfin, ils l’ont fait ! Dans le chaos et l’horreur auquel on affuble la Palestine ces derniers temps, l’équipe des Fida’i a rendu honneur et bonheur à son peuple le temps d’un instant. En tenant le match nul face au Liban, les Palestiniens se sont qualifiés pour la première fois de leur histoire au troisième tour de qualification pour la Coupe du Monde. Rien ne dit qu’ils seront de la partie en 2026, mais l’exploit est immense compte tenu de la situation actuelle dramatique. Reste à espérer que leur progression ne soit pas altérée et qu’ils puissent continuer à donner du baume au cœur à leur peuple martyr. Pour le Liban, pas de miracles, l’obscurité sur son football a déjà commencé.

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Avec Antoine Blanchet-Quérin (Australie) et Baptiste Mourigal (Corée du Sud)

Boris Ghanem
Boris Ghanem
Chroniques d'un ballon rond au Moyen-Orient, de Beyrouth à Baghdad, de Manama à Sanaa, football sous 40 degrés à l'ombre d'un palmier.