La Ligue des Champions d’Océanie reprenait ses droits cette nuit, au Vanuatu, dans un format particulier où chaque pays de la confédération ne peut envoyer qu’un seul candidat.
Dans la nuit de samedi à dimanche, à l’autre bout du monde, la Ligue des Champions d’Océanie lançait sa dix-septième édition sous ce nom avec en tête de pont l’indétrônable Auckland City FC et ses dix titres continentaux. Une édition particulière puisque la confédération d’Océanie a décidé d’un nouveau format de compétition en rupture avec son passé : un seul pays, le Vanuatu, pour accueillir les rencontres sur deux stades, le Soccer City Stadium de Luganville et le VFF Freshwater Stadium de Port-Vila, la capitale du pays, où se déroulera également la finale. Le petit pays de trois cent mille habitants est prêt et impatient : « Il y aura du bruit, Vanuatu est un pays de football, les gens aiment le football. Nous avons demandé aux communautés de soutenir les équipes visiteuses et vous verrez que pendant le tournoi, ce sera une célébration du football en Océanie, comme une mini-Coupe du monde », a déclaré Lambert Maltock, président de la confédération, avec enthousiasme. Lors de la conférence de presse inaugurale, programmée ce samedi, Cam Howieson (Auckland City), a loué la qualité des infrastructures du Vanuatu « d'après mon expérience dans les îles, les installations d'entraînement n'ont jamais été aussi performantes, et le terrain numéro un a l'air d'être de premier ordre ». Une excellente image pour le football océanien.
À l’image de sa lointaine consœur européenne, les clubs des plus petites nations doivent passer par des éliminatoires organisés autour d’un groupe de qualification. Les Samoa américaine, les Îles Cooks, le Samoa et les Tonga, pays les moins développés footballistiquement, se sont ainsi affrontés en février dernier avec les Samoans de Lupe Ole Soaga qui ont tout écrasé : trois victoires, vingt-neuf buts inscrits pour un seul encaissé, celui de Silas Trego avec les Cookiens de Tupapa Maraerenga lors de l’ultime rencontre du groupe, une « finale » opposant deux équipes comptant six points en deux rencontres. Lupe Ole Soaga menait ainsi au score à la pause (1-0) et malgré le fait d’avoir disputé la rencontre en infériorité numérique dès la 37e minute, sous une pluie dantesque, ayant annulée l’autre rencontre du groupe entre Veitongo et Ilaoa and To’omata, les résidents de l’île d’Upolu déroulaient avec un score final de 7 buts à 1. Arrivés hier au Vanuatu, Lope Ole Soaga continuera d’écrire l’histoire du football samoan. Trois ans avant, ils avaient été les premiers issus des éliminatoires à décrocher une victoire (contre les Fidjiens de Ba).
Auckland City et les autres
Pour les autres nations, il a fallu recourir à une phase de barrages nationaux pour déterminer quel serait l’unique représentant du pays en phase finale. La nette domination néo-zélandaise dans la zone continentale est sans partage. À l’échelle des clubs, elle est symbolisée par Auckland City. Titrés pour la dixième fois en 2022 (seulement trois équipes sont parvenus à décrocher un titre depuis 2008/09 – Hekari United en 2010, Team Wellington en 2018 et Hienghène Sport en 2019), les Navy Blue visent évidemment le onzième titre en 2023. Une campagne qui se fera sans Emiliano Tade, l’attaquant argentin, légende du club, joueur avec le plus d’apparition à la Coupe du Monde des Clubs, écarté par une lourde blessure au genou. Auckland City a conservé son titre lors de la deuxième édition de la National League néo-zélandaise, nouvelle appellation et organisation du championnat nationale ayant succédé au New Zealand Football Championship en 2021 et dont Auckland avait remporté les huit dernières éditions. Les Navy Blue sont ainsi passé par la case barrage pour y affronter Wellington Olympic et, après un match aller scellé sur le score de 1-1, Auckland a décroché la qualification au terme d’un incroyable match retour qui a vu le club descendant d’immigrants grecs mener 3-1 jusqu’à la 74e minute, moment où Tade a réduit l’écart pour lancer un incroyable retournement de situation et permettre à Auckland City de s’imposer 5-3.
Auckland City arrive au Vanuatu dans le Groupe A où Suva (Fidji), Lupe ole Soaga (Samoa), et les Salomon Warriors (îles Salomon) n’attendront que de les freiner. Suva, l’un des plus anciens clubs référencés d’Océanie, créé en 1905 par des Européens, n’a pas d’autre objectif que de faire tomber City : « Nous ne sommes pas là pour faire le nombre dans cette compétition », a martelé Maxwell Thaggart, l’entraîneur de l’équipe. Des propos crédibilisés par l’expérience de son groupe : plusieurs internationaux fidjiens, Marlon Taihoa, star de l’équipe nationale des îles Salomon et ses pendants du Vanuatu, Azaria Soromon et Alex Senial. Les Salomon Warriors, s’ils possèdent l’un des maillots les plus classe du continent, partagent les performances d’Auckland et Suva : une difficile accession à la Ligue des Champions. Koss FC n’a en effet pas laissé les Warriors filer en douce facilement au Vanuatu (1-1, 2-1). Pensionnaires de la S-League, ils pourront compter sur Norman Winford, formé au club, un attaquant rapide et doué d’une belle finition, afin d’atteindre la demi-finale qui est l’objectif du club cette année comme l’a affirmé Franco Ne’e, le coach de cette formation.
La francophonie dans l’apprentissage et la progression
Tahiti et la Nouvelle-Calédonie partagent deux ambitieux qui vont lancer le Groupe B. L’AS Pirae de Tahiti, représentant de l’OFC à la Coupe du Monde des Clubs en 2021, et riche d’une finale en Ligue des Champions contre Auckland City (perdue 3-1) en 2006, s’avance au Vanuatu « confiant » comme le précise Raimoana Benett, nouveau coach depuis décembre 2022. Face à des formations qu’il « connaît » il s’attend à devoir « faire preuve d’athlétisme contre des formations qui enverront des longs ballons vers l’avant pour marquer au plus vite ». L’AS Pirae a été qualifié grâce à une large victoire cumulée de neuf buts contre trois face à l’AS Dragon. Le son de cloche est différent pour les Néo-Calédoniens de l’AS Tiga Sport découvrant la compétition. Pourtant champion en 2020 la pandémie liée à la COVID-19 rompait toute tentative de célébrer leur première venue en Ligue des Champions un an plus tard, la compétition ayant été annulée. Sortant Hienghène Sport (5-1 au cumulé) lors du barrage national, les rouge et blanc engagent un groupe sans aucune expérience au Vanuatu alors Léo Lopez (entraîneur) espère juste qu’ils apprécieront d’apprendre et de progresser face aux clubs avec lequel ils seront opposés durant la compétition.
Comme Tiga, Ifira Blackbird Football Club ou IBBFC va célébrer devant son public une première en Ligue des Champions avec le souhait d’être compétent. « Nous avons l’avantage d’accueillir, nous jouerons les matchs et apprendrons » a ainsi déclaré Jean Robert Yelou. IBBFC reste la seule équipe à ne pas avoir encaissé le moindre but lors de la campagne de qualification en ayant rien laissé à SiaRaga FC (4-0 cumulé). Néanmoins les Vanuatais, sans objectif précis en Ligue des Champions, ont voyagé jusqu’en Australie pour préparer la compétition au Gold Coast Performance Centre dans l’État du Queensland. Une opération bénéfique car six joueurs ont été invités à suivre d’autres entraînements avec des formations du second échelon national australien. Au milieu de ces néophytes de la compétition, Hekari United FC de Papouasie-Nouvelle-Guinée, fait figure d’ogre. Un palmarès sans commune mesure et une mainmise sans pareille sur le territoire national en défi constant avec Lae City l’autre gros du championnat de National Soccer League. Représentant de Port Moresby, la capitale du pays à l’oiseau de paradis sur son drapeau, ils sont un des rares clubs à pouvoir se glorifier d’un titre dans cette compétition (2010). La légende du club ayant été acquise avec des joueurs venus de plusieurs pays, Hekari arrive avec une formation 100% locale. Une volonté noble, mais sportivement plus difficile à mettre au niveau lorsque se profile la Ligue des Champions qu’ils n’ont plus disputé depuis cinq ans. Erickson Komeng souhaite néanmoins faire revivre les images de 2010 à ses joueurs dans l’objectif de les motiver à passer la phase de groupe. Ati Kepo, leur attaquant de vingt-six ans, buteur lors du barrage d’accession à deux reprises, sera une arme non-négligeable à prendre en compte. Plusieurs matchs de préparations ont été nécessaire dans les Îles Salomon avant d’arriver au Vanuatu où Ifira Blackbird sera le premier adversaire.