En 1997, Ronaldo fête ses vingt-et-un ans et affiche à la fin de l’année un bilan statistique en sélection de vingt-quatre buts en trente-quatre matchs depuis ses débuts en 1994, s’imposant comme l’un des plus grands prodiges du football brésilien.
Ronaldo porte pour la première fois un maillot jaune de la Seleção en janvier 1993 pour la préparation au championnat sud-américain U17. Ronaldo est alors joueur du São Cristóvão, petit club de Rio de Janeiro, mais où travaille Jairzinho, vainqueur de la Coupe du Monde 1970 aux côtés de Pelé. Jairzinho recommande le jeune attaquant à son ancien coéquipier du Botafogo, Humberto Redes, désormais entraîneur de la Seleção U17. Humberto assiste à un match du São Cristóvão à domicile, où sur son premier ballon, Ronaldo dribble tous les joueurs qui se trouvent devant lui avant de frapper sur le poteau. Il en faut à peine plus pour Humberto, qui quitte rapidement le stade, mais qui convoque Ronaldo au prochain rassemblement à Teresópolis. À l’entraînement, Ronaldo se montre très impliqué et il valide son billet pour la Colombie, prenant pour la première fois de sa vie l’avion. Le premier match du championnat sud-américain du Brésil a lieu face au Chili. La Seleção s’impose 3-2, Ronaldo marque trois buts. Si le Brésil échoue finalement à se qualifier pour la Coupe du Monde de la catégorie, Ronaldo termine meilleur buteur du tournoi avec huit buts en sept matchs, curieusement le même bilan statistique que lors de la Coupe du Monde 2002, près de dix ans plus tard.
De São Cristóvão à la Seleção en dix mois
Ses performances au championnat sud-américain 1993 lui permettent de signer dans un grand club brésilien, et c’est finalement Cruzeiro qui récupère le joyau. Ronaldo apparaît bientôt trop fort pour les joueurs de son âge et frappe à la porte de l’équipe première de Cruzeiro en même temps qu’il enchaîne les tournois avec la Seleção U17 : Saint-Marin, Saint-Brieuc, Richmond et même un match au Maracanã en ouverture d’un Vasco – Fluminense. Ronaldo débute en équipe première de Cruzeiro contre Caldense, quatre-vingt-trois jours après son arrivée au club, et marque son premier but professionnel face à Bahia, dans le Brasileirão. Le match retour face à Bahia reste dans l’histoire, Cruzeiro s’impose 6-0 avec cinq buts de Ronaldo, qui a fêté ses dix-sept ans quelques semaines plus tôt ! Sur le dernier but, Ronaldo profite d’un ballon relâché innocemment par l’expérimenté gardien uruguayen Rodolfo Rodríguez pour devenir le premier joueur de Cruzeiro à marquer un quintuplé dans le Brasileirão. « Ce but au Mineirão contre Rodolfo Rodríguez a été très marquant. Un joueur banal n’a pas cette perception, cette rapidité de réflexion pour prendre le ballon au gardien et marquer » expliquait Carlos Alberto Parreira à Milton Leite pour le livre Os 11 maiores centroavantes do futebol brasileiro. Carlos Alberto Parreira, sélectionneur du Brésil à cette époque, convoque la nouvelle promesse du football brésilien, auteur de vingt-et-un buts en vingt-trois matchs en professionnel, pour deux matchs amicaux face à l’Allemagne et au Mexique. En moins d’un an, Ronaldo passe de São Cristóvão à la Seleção.
Ronaldo ne joue pas lors des deux matchs amicaux de la fin de l’année 1993 et débute en Seleção en 1994 contre l’Argentine, comme un certain Pelé en 1957. À dix-sept ans, Ronaldo dispute ses premières minutes sous le maillot auriverde en remplaçant le double buteur du jour, Bebeto. Contre l’Islande, le 4 mai 1994, Ronaldo est cette fois titulaire, profitant de l’absence de Romário et Bebeto, qui ne sont pas libérés par le Barça et La Corogne. Le prodige de Cruzeiro ouvre le score d’une frappe du gauche, avant de provoquer un penalty, transformé par Zinho.
Cinq jours plus tard, Ronaldo devient le troisième mineur à être convoqué pour une Coupe du Monde avec le Brésil après Pelé en 1958 et Edu en 1966. Les comparaisons avec Pelé sont inévitables, Ronaldo présentant même un meilleur bilan statistique que Pelé avant de débuter la Coupe du Monde avec quarante-neuf buts en cinquante matchs pour Ronaldo, contre quarante-et-un buts pour Pelé également en cinquante matchs à la même période. Le jeune Ronaldo assiste à toute la Coupe du Monde sur le banc, n’entrant pas en jeu même lors du troisième match de la phase de groupes où le Brésil est déjà qualifié, malgré les demandes des supporters et de certaines personnalités au Brésil. « En Coupe du Monde, il n’y a pas l’espace pour faire un test. Quand on est arrivés, il n’a pas eu le niveau qu’on espérait. Il avait l’air émerveillé, d’être aux côtés de Romário, Bebeto. Il voulait prendre des photos, demander des autographes » expliquait Carlos Alberto Parreira. Pour ESPN, Ronaldo revenait sur ce tournoi qui lui ouvre les portes de l’Europe et du PSV : « Je ne savais même pas ce que je faisais là, j’étais une autre personne. Mais je voulais jouer. J’ai beaucoup appris là-bas, ça a été parfait. Je regardais tout le monde, Romário, Zinho. Leonardo était très attentionné, il y avait les coups de gueule de Dunga, ça a été important pour ma carrière ».
Le début de l’ère Zagallo
Ronaldo retrouve la Seleção à la fin de l’année 1994 et un match amical contre la Yougoslavie. Sorti en milieu de seconde période, Ronaldo est critiqué par le nouveau sélectionneur, Mário Zagallo : « Il m’a déçu. S’il ne s’améliore pas et s’il répète les erreurs d’aujourd’hui, il peut être remplaçant ou même ne pas disputer la Copa América. Ronaldo n’a pas respecté mes demandes, il a peu participé au jeu. Au lieu de revenir défendre, il est resté devant, attendant le ballon. Il pense qu’il est qui ? Romário peut jouer comme cela parce qu’il met des buts ». En 1995, Ronaldo marque un but à Wembley lors de la Copa Umbro, dribblant le gardien anglais Tim Flowers, mais il est remplaçant à la Copa América, devant se contenter de cinq petites minutes contre l’Équateur tout au long du tournoi où le Brésil atteint la finale. En fin d’année, Ronaldo est titulaire pour la deuxième fois seulement sous Zagallo, qui affiche déjà dix-sept matchs à la tête de la Seleção depuis son retour. Sous les yeux du président de l’Inter Milan, Massimo Moratti, le futur Fenômeno marque deux jolis buts lors de la première période avant d’être sorti à la mi-temps par précaution, les défenseurs uruguayens n’ayant que la violence comme option pour tenter d’arrêter le numéro 9 brésilien. « Le match a eu deux histoires, avec et sans Ronaldo. Il a montré de la personnalité et de la confiance, et quand il est sorti, personne n’a pu répéter ses exploits dans la surface » rend hommage Zagallo.
En 1996, Ronaldo connaît pour la première fois de sa carrière une blessure au genou et est forfait pour les matchs avec la sélection brésilienne. À l’été, il est convoqué avec la sélection olympique, qui rêve d’une première médaille d’or après les défaites en finale en 1984 et 1988. Ronaldo négocie au même moment son transfert vers le Barça, les médecins du club se rendant même à Miami où s’entraîne la sélection olympique pour la visite médicale. Zagallo est agacé et ne titularise pas Ronaldo pour le premier match, contre le Japon, perdu à la surprise générale. Ronaldo est ensuite titulaire, il ouvre le score contre la Hongrie et marque le seul but du match face au Nigeria. En quarts de finale, Ronaldo claque un doublé face au Ghana, permettant au Brésil de retrouver au tour suivant le Nigeria. Ronaldo ne marque pas et sort à la 75e minute alors que le Brésil mène 3-1. Le Nigeria égalise à la dernière minute, Kanu marque le but en or, et le Brésil devra se contenter d’une médaille de bronze. Lors du match pour la troisième place, Ronaldo ouvre le score face au Portugal, battu 5-0, avec notamment un triplé de Bebeto, qui termine meilleur buteur en compagnie d’Hernán Crespo avec six buts, un de plus que Ronaldo.
Le duo Ro-Ro illumine l’année 1997
Avec son arrivée au Barça, Ronaldo passe dans une nouvelle dimension, notamment après le 12 octobre 1996, où il marque un but d’anthologie face à Compostelle. Ronaldo enflamme la presse du monde entier et s’impose comme l’un des meilleurs joueurs du monde, si ce n’est le meilleur. « J’ai toujours dit qu’il portait trop le ballon. Mais, après avoir vu ce but contre Compostelle, qu’est-ce que je peux dire ? J’ai l’air bête » s’incline Zagallo. L’année 1997 commence pour la Seleção le 26 février avec un match amical face à la Pologne, deux semaines après le Carnaval auquel Ronaldo assiste à Rio de Janeiro, entraînant les critiques des médias espagnols. Le match face à la Pologne marque le retour de Romário en Seleção, lui qui n’avait plus joué en jaune depuis la finale de la Coupe du Monde 1994 ! Pour la première fois, le duo Ronaldo – Romário est aligné sur un terrain de football. Avant le match, les deux génies du football brésilien échangent quelques jongles au milieu du terrain, prémisse du spectacle à venir. Ronaldo marque deux buts, à chaque fois sur une passe décisive de Romário, le Brésil s’impose facilement 4-2. Lors du match suivant, la Seleção bat le Chili 4-0, Ronaldo et Romário signent chacun un doublé. La dupla Ro-Ro est née.
Pour le premier match du Brésil à la Copa América 1997, organisée en Bolivie, le Costa Rica ne tient que vingt minutes. La Seleção s’impose 5-0 contre le Costa Rica avec un doublé de Ronaldo et un but de Romário. Le Brésil se qualifie facilement pour les quarts de finale, où le Paraguay de Chilavert est éliminé, Ronaldo marquant les deux buts de la rencontre. Contre le Pérou, Denílson ouvre le score dès la première minute de jeu. Romário marque deux buts avant de sortir sur blessure alors que les trois changements ont déjà été faits, mais le Pérou ne parvient toujours pas à contenir le Brésil et encaisse un terrible 7-0. La finale face au pays hôte, la Bolivie, se joue donc sans Romário, remplacé par Edmundo qui ouvre le score en fin de première période. La Bolivie égalise, et à dix minutes du coup de sifflet final, Ronaldo redonne l’avantage au Brésil d’une frappe croisée pied gauche en lucarne. Dans le temps additionnel, Zé Roberto assure au Brésil une nouvelle Copa América, la première de l’histoire de la Seleção remportée à l’extérieur, au stade Hernando Siles, à plus de 3 500 mètres d’altitude. Avec cinq buts, Ronaldo termine à une unité du meilleur buteur du tournoi, le Mexicain Luis Hernández.
En fin d’année 1997, le Brésil dispute la Coupe des confédérations, la première organisée par la FIFA. Au premier tour, Ronaldo est muet lors des trois matchs, mais peut compter sur les trois buts de Romário pour permettre au Brésil de terminer en tête de son groupe. En demi-finale, le Brésil bat la République Tchèque 2-0, Romário ouvre le score, Ronaldo clôt la marque. La finale appartient à nouveau la dupla Ro-Ro, qui fait pleuvoir les buts sur le stade international du Roi-Fahd. Le Brésil atomise l’Australie 6-0, Ronaldo et Romário signent un triplé chacun ! En seize matchs avec la Seleção en 1997, le duo Ro-Ro remporte deux trophées et quatorze matchs pour deux matchs nuls et aucune défaite. Romário marque dix-neuf buts, Ronaldo en ajoute treize, soit deux buts par match en moyenne ! À deux reprises seulement le duo reste muet, face à la France en amical dans un match resté célèbre pour le coup franc surpuissant de Roberto Carlos, et contre la Colombie en phase de poules de la Copa América alors que le Brésil était déjà qualifié.
Deux jours après la finale de la Coupe des confédérations, Ronaldo devient le plus jeune lauréat du Ballon d’Or, avec 222 points, très loin devant les 68 points du deuxième au classement, Predrag Mijatović. Avec son fabuleux duo offensif et d’autres joueurs comme Denílson, Dunga, Roberto Carlos ou Cafu, le Brésil se présente à la Coupe du Monde 1998 comme le grand favori à sa propre succession, mais ce sera une toute autre histoire…