Après une saison régulière logiquement pauvre en émotions, la course au titre en petit comité démarre ce dimanche en Tunisie. Six formations (les quatre monstres habituels, plus l’USBG et l’ESM en guise de trouble-fêtes) vont disputer jusqu’en mai un mini-championnat pour désigner le boss de la saison 2016-2017. Qui succèdera à l’Etoile Sportive du Sahel ? Présentation des forces en présence.

CSS : pas de recrutement, sketch sur le banc, pas de problème

Niveau gestion, qualifier la période que vivent actuellement les « Noir et Blanc » de tumultueuse ne serait pas usurpé. A force de traîner des casseroles sur les salaires impayés (Sentamu, Noubissi, ou l’excellent Lema Mabidi parti exercer ses talents au Raja Casablanca) le CSS a fini par subir la colère de la FIFA : Interdiction de recruter au mercato d’hiver et celui de l’été prochain. A cela s’ajoute le très long feuilleton du nouveau coach, qui comporte un épisode cocasse chaque jour.

Après deux mois de rumeurs et d’atermoiements durant lesquels 30 noms différents de techniciens étrangers ont été évoqués, l’argentin Nestor Clausen débarque fin novembre. Mais faute de licence, l’ancien vainqueur de la Copa Libertadores (avec Indepediente) n’a toujours pas pu exercer en Tunisie. Motif ? Pour la DTN, qui ne dispose pas d’équivalence pour ses diplômes argentins,  aucune attestation valable ne prouve que Clausen est un entraîneur qualifié…alors qu’il a coaché (entre autres) en Suisse et en Argentine pendant plusieurs années. Pour la première journée des play-offs, Clausen sera autorisé exceptionnellement à diriger son équipe du banc, mais l’imbroglio administratif demeure.

Au cœur de ce cirque, l’équipe du sérieux et efficace coach intérimaire Anis Jerbi avait fait le boulot. Sans survoler les débats (5 des 9 victoires acquises par un but d’écart, 3 nuls, 2 défaites) le CSS a tout de même fini en tête de la Poule A assez confortablement. Ils ont été dominés sur de longues phases de certains matchs, mais ont valorisé leurs atouts : efficacité sur coups de pied arrêté, un Marzouki en jambes en attaque, et la montée en puissance de Rami Jeridi qui est sans aucun doute le meilleur gardien tunisien à l’heure actuelle. Il est néanmoins difficile de savoir si ces atouts sont suffisants face à une opposition plus solide.

ESS : Bouazza et Velud suffiront-ils pour freiner la chute  ?

Les fins de règne de Faouzi Benzarti sont ainsi faites : Après deux ou trois saisons d’efforts soutenus et ininterrompus de la part d’un groupe restreint de joueurs, les titres tombent. Puis l’usure mentale et physique finit par tout réduire en miettes.

C’est ce qui est arrivé cet hiver à l’ES Sahel, prise dans un engrenage de défaites qui aurait pu lui coûter la qualification en play-offs. Les carences entrevues sont multiples : une défense aux abois, un déficit d’agressivité apparu brutalement, et un manque cruel de munitions offensives, illustrées par la maladresse du brésilien Acosta.

Ces carences sont liées : certains cadres ont enchaîné les matchs sans trêve depuis 2014 (les campagnes africaines se jouant en été) en conséquence de quoi les internationaux Lahmar, Nagguez et Ben Amor sont à présent rotis. Les points forts de l’équipe étant exténués ou remplacés par des éléments peu expérimentés (comme il n y a pas eu de turnover) la cohérence du collectif s’étiole. Ce collectif compensait la faiblesse de certains compartiments-notamment la défense centrale et l’attaque- aujourd’hui le fait que ces faiblesses apparaissent au grand jour est inéluctable.

Pour se relancer, l’ESS devra recruter à ces postes et surtout passer à une façon de jouer pour laquelle l’impact physique des joueurs n’est pas le seul critère. Concernant le dernier point, l’entraîneur français Hubert Velud (qui a débarqué il y a deux mois à la fin de son contrat avec le TP Mazembe) a certainement saisi l’ampleur de la tâche qui l’attend.

L’arrivée de l’ex-international algérien Hameur Bouazza a permis d’injecter un peu de sang frais assez bienvenu. L’ESS est déjà assez pourvue aux postes d’ailier, mais sur ce qu’il a montré jusqu’à présent l’ancien joueur de Watford a encore un niveau nettement supérieur à celui du championnat tunisien. Il ne pourra néanmoins pas tout faire tout seul. Même si Velud arrive à insuffler à nouveau de la confiance à ce groupe, d’autres éléments doivent prendre le relais : les cadres moins sollicités (Brigui et Msakni en tête) et les revanchards qui peuvent sortir un coup d’éclat (Dhaouadi et Bangoura). En cas d’échec, l’été sera chaud du côté de la perle du sahel.

Quelle puissance de feu tunisoise sera la mieux gérée ?

Un coup d’œil à l’effectif de l’Espérance de Tunis suffit pour trembler. A condition de trouver la bonne recette, le onze-type des Sang Et Or est capable de coller quatre pions à n’importe quelle équipe en Tunisie et à certainement 85% des équipes en Afrique. Qui plus est en constatant que Ferjani Sassi n’a rien perdu du délice de ses touches de balle, que Khenissi perfectionne ses talents de finisseur, et que dans son couloir Iheb Mbarki produit des prestations de plus en plus intéressantes.

Deux bémols cependant : la défense qui n’apporte pas toutes les garanties de solidité, et l’embarras du choix qui mène à de mauvais choix. A quelques reprises, l’abondance de biens aux 3 postes offensifs derrière Khenissi a nui. Les rendements inconstants de quelques éléments (Zaabia, Bguir, Moncer entre autres) a fait s’enrayer la machine sur certaines rencontres. Le retour de blessure de Fakhreddine Ben Youssef est une cartouche supplémentaire mais aggrave le casse-tête pour Faouzi Benzarti. Celui qui a mené l’EST à sa première C1 va devoir trouver la bonne animation dans le jeu, et optimiser l’utilisation de l’artillerie lourde qu’il a à sa disposition.

Côte clubiste, ça fait longtemps que l’instabilité est devenue un art de vivre. Peu importe combien de joueurs partent ou arrivent, le CA fait front et avance tout droit, que ce soit vers la gloire ou vers le fiasco. Cet hiver, trois bons éléments sont partis : deux pour se construire un avenir européen (Srarfi à Nice, Haddedi à Dijon) et Oueslati prêté en Arabie Saoudite avec au passage une belle zizanie semée et des insultes contre le président du club Slim Riahi après que celui-ci l’ait incité à accepter le prêt…Volet arrivées, on suivra en particulier les premiers pas du zimbabwéen Matthew Rusike, appelé à être plus convaincant que le « flop » béninois Jacques Bessan en attaque, et l’ex flamboyant numéro 10 de la sélection nationale Oussama Darragi, qui s’est refait une santé à Bizerte.

Profilée pour jouer en contre dans le passé, le Club Africain propose un peu plus de variété notamment sur attaque placée, avec de l’explosivité et un usage efficace des couloirs. La vivacité retrouvée de Saber Khalifa et celle permanente de l’algérien Chenihi font beaucoup de bien et pour peu que les défenses adverses soient un peu lourdes ou marquées physiquement, ce CA peut tirer son épingle du jeu….

Ben Guerdène et Metlaoui ne vont pas faire que de la figuration

La dernière fois que le titre s’est joué sur des play-offs, la poule finale n’était composée que de quatre équipes. Sans surprise, les quatre favoris traditionnels étaient là. Cette année, deux trublions s’invitent à la fête : l’US Ben Guerdène, qui marche sur l’eau depuis 2016 et a même accédé au dernier carré en coupe, et l’ES Métlaoui qui confirme sa superbe 4ème place de la saison dernière.

Les recettes des deux clubs sont les mêmes : grosse intensité à domicile ou ils prennent beaucoup de points, une main tendue à des revanchards qui ont plus ou moins raté leur chance dans des gros clubs (Mida pour l’USBG, Gharsellaoui et Salhi côté ESM) et des vieux briscards de la LP1 qui bonifient le collectif par leur vécu (par exemple le défenseur Amine Abbès, ou encore les attaquants de Métlaoui Mezni et Ayari, 35 ans tous les deux et de longues années à batailler dans des clubs qui jouent le maintien).

A défaut d’accrocher une place sur le podium, ces deux équipes risquent de contrarier énormément les prétendants au titre et brouiller les cartes jusqu’au bout. On gardera un œil attentif aux performances du petit Chamseddine Samti (USBG) qui a brillé en U17 avec la Tunisie et tient avec ces play-offs une belle occasion de s’affirmer et de se faire remarquer.

Pronostic de la rédaction

1-EST

2-CA

3-ESS

4-CSS

5-USBG

6-ESM

Farouk Abdou
Farouk Abdou
Actuellement à E-management, passé par Echosciences Grenoble, Le Dauphiné Libéré, Sport Translations et Tunisie foot, Africain volant pour Lucarne Opposee