Dans la légende. La rencontre qui opposait Cruz Azul à l’América marquera à jamais l’histoire du Clásico Joven. Une remontée épique pour l’América et un ridicule qui tuerait presque les supporters de la Maquina. Cette 8e journée d’Aperture 2016 aura aussi vu Necaxa sortir enfin de la zone rouge.

Cruzazulear. Un verbe qui est entré dans le jargon mexicain depuis quelques années, au même titre que zlataner en France. Cruzazulear, un verbe qui signifie « faire une Cruz Azul ». Mais contrairement au verbe créé sur le nom du géant suédois, cruzazulear n’a rien de positif. Pire, cruzazulear rime avec raté.  Cruzazulear, c’est perdre une finale de Liga MX aux tirs aux buts en ayant mené tout le match face à l’ennemi juré. Cruzazulear, c’est se saborder alors qu’on a un match en main. Cruzazulear, c’est réunir toutes les circonstances négatives propices à un échec alors que le succès est proche. Samedi soir, Cruz Azul a une nouvelle fois démontré pourquoi ce verbe existe et est désormais utilisé dans le langage courant lorsque on perd une partie de FIFA, lorsqu’on foire un rencard ou un entretien d’embauche. Dans les plus belles règles de l’art.

Car pour Cruzazulear, il faut avoir montré des signes positifs. Moribonds depuis le début du tournoi - voire même depuis cette fameuse finale perdue aux tirs aux buts en mai 2013 - les joueurs de la Máquina abordent le Clásico joven avec des ambitions à l’Estadio Azul. La tête de Velázquezsur la barre, dès la 5e minute, est là pour le montrer. En face, celle du coach Ignacio Ambriz risque de tomber, car l’América a déjà perdu son Clásico nacional il y a deux semaines, à domicile, face à Guadalajara. Plus intense, la pression de la Maquina va finalement porter ses fruits. Christian el Chacho Giménez envoie une merveille de coup franc dans la lucarne de Moises Muñoz. Dans la foulée, après une percée de Jorge Benitez dans la surface, el Chacho s’offre un doublé. Puis à la 25e minute, Lucas Silva transforme un pénalty. Cruz Azul réalise alors sa meilleure mi-temps depuis bien longtemps. Sur le banc de l’América, Ambriz se prépare déjà à entendre le glas sonner. Mais pour qui ? La défaite semble acquise pour las Aguilas, mais la malédiction de la Máquina plane sur l’estadio Azul.

Irréelle Cruzazuleada

Au retour des vestiaires, Cruz Azul laisse volontiers le ballon à son adversaire. Et sur une action anodine, Aldo Leao marche sur le talon d’Achille de Rubens Sambueza, capitaine azulcrema. Le genre d’action qui nous semble sévère, mais chaque tacle ou action dangereuse est sanctionnée facilement au Mexique. A onze contre dix, l’histoire n’est plus la même. Et sur ce coup franc, Oribe Peralta se jette pour donner de l’espoir à las Águilas. Un premier avertissement pour Cruz Azul. En infériorité numérique, la Maquina subit et Silvio Romero réduit à son tour la marque d’une belle tête smashée. A vingt minutes de la fin, Cruz Azul sent la cruzazuleada arriver. C’est inéluctable. Les joueurs le savent et s’énervent régulièrement contre l’arbitre, réclament ci et là un pénalty, un carton.

« L’Histoire ne peut se répéter ! », martèle le commentateur de Fox Sport. Mais à la 90e minute, après une énième tentative, ce qui devait arriver arriva. Resté aux avants postes, Pablo Aguilar égalise de la tête sur un service magistral du capitaine Sambueza. Les Celestes ont un genou à terre. Deux minutes plus tard, sur un beau service d’Ibarra, Silvio Romero croise sa reprise. Corona, le portier international de Cruz Azul se prend la tête entre les mains, et les joueurs de l’América la perdent. C’est la folie sur le banc azulcrema, le géant de la capitale vient de renverser le match. Cruz Azul, de son côté, réalise sa cruzazuleada la plus incroyable, la plus irréelle. Ambriz était en danger, c’est désormais Tomas Boy qui risque de perdre son poste d’entraîneur de la Maquina. Des mois d’humiliation sont à prévoir pour les supporters celestes. La malédiction a une nouvelle fois frappé et le terme cruzazulear est parti pour durer. Très longtemps.

Photo : ADID JIMENEZ/AFP/Getty Image

Pulido et Delort débutent

Occultées par ce Clásico Joven complètement fou, les autres parties de cette 8e journée offraient aussi plusieurs affiches. Le leader, Tijuana, recevait Monterrey qui peine à trouver sa place dans cet Apertura 2016. Une rencontre qui s’est conclue par un score nul et vierge (0-0). Monterrey occupe pour le moment la huitième place mais ne convainc pas. Le niveau de ses cadres, comme Edwin Cardona, à qui on promettait l’Europe, est bien en deçà des espérances.

Celui des Tigres, en revanche, est bien présent, et les joueurs de l’UANL sont bel et bien lancés dans cet Apertura 2016. Une victoire facilitée par un début de match canon avec des buts de Pizarro et Aquino et une équipe de Morelia réduite à dix (0-2). Près de 5 000 supporteurs felinos avaient fait le déplacement de plus de mille kilomètres pour peupler les travées de l’Estadio Morelos. Coïncidence heureuse pour un petit nouveau qui a foulé ses premiers pas avec le maillot auriazul. En effet, Andy Delort est entré à la 75e minute et a pu jouer une vingtaine de minutes avec Dédé Gignac, auteur du raté le plus incroyable du week-end. L’ancien Tourangeau devra se battre pour obtenir une place de titulaire, car ni Sosa ni Zelarayan ne semblent vouloir passer plus de temps sur le banc.

Outre les Tigres, les Chivas avaient aussi occupé la scène médiatique fin août avec un transfert onéreux. Acheté près de 16 millions d’euros, l’ancien des Tigres Alan Pulido a pu fouler la pelouse de l’Estadio Chivas alors que son équipe avait fait le boulot en première période, grâce à des buts géniaux de Carlo Cisneros et Isaac Brizuela (2-0). Matias Almeyda permet depuis quelques semaines aux Chivas de retrouver un projet de jeu perdu depuis longtemps. Sa philosophie et sa tactique appliquée aux jeunes joueurs du centre de formation de Guadalajara pourraient permettre au Troupeau sacré, qui occupe la quatrième place, de bien figurer en Liguilla.

Chivas possède à Mexico un équivalent en termes de politique sportive actuelle. L’UNAM a engagé Francisco Palencia pour diriger l’équipe. Et comme Matias Almeyda, ses idées plaisent aussi. Paco Palencia s’appuie, à l’image de son homologue argentin, sur un centre de formation performant. Après un début de tournoi claudiquant, voilà les Pumas qui occupent la troisième place après leur probante victoire sur Querétaro (4-1) ponctuée par des réalisations de jeunes des Fuerzas basicas, et ce, malgré l’ouverture du score de Neri Cardozo. Surtout, les Felinos ont un potentiel offensif important. El Niño se permet même de laisser Eduardo Herrara, international mexicain et parfois capitaine universitario, sur le banc.

Necaxa sort de la zone rouge

Intéressant depuis le début du tournoi, imprécis et naïf lors de plusieurs rencontres, Necaxa n’a remporté son premier match que lors de la journée précédente. Et ce week-end, les Rayos ont récidivé en remontant un score défavorable face à Santos (2-1). Conséquence, leur pourcentage augmente rapidement et Necaxa n’est plus dernier au porcentual. Santos de son côté peu remercier Agustin Marchesin, car l’addition aurait pu être plus salée. Et la mayonnaise n’a pas encore pris avec l’arrivée du Chepo de la Torre en tant que coach.

Au contraire, Toluca, après des débuts catastrophiques, revient bien et se retrouve en embuscade pour choper une place en Liguilla. Les Diablos Rojos s’appuient sur la bonne forme de leur attaquant Fernando Uribe. Car après avoir scoré face à Morelia il y a deux semaines, le Colombien a ouvert le score d’une belle tête piquée pour une victoire obtenue à Puebla (0-2). Les Camoteros, eux, redescendent au classement après de bons débuts. Les déboires avec la justice de leur meilleur joueur Christian el Hobbit Bermudez, accusé de ne pas avoir payé la pension à ses enfants, y est pour quelque chose, tant le petit nain est important dans la création du jeu.

Comme Toluca, León revient bien et enregistre une nouvelle victoire, plus probante celle-ci. La Fiera a véritablement étouffé l’Atlas et la décision s’est faite en première période, notamment grâce à l’international Elias Hernandez, auteur d’une passe décisive et d’un but. Dans une bonne dynamique, León peut encore espérer accrocher une place en Liguilla. Les Rojinegros, eux, enchaînent prestations décevantes et reste englué en milieu de tableau, même si la Liguilla n’est pas loin.

Enfin, Pachuca perd du terrain en tête du classement, après une nouvelle défaite à Veracruz. Les Tuzos n’ont plus le même tranchant qu’au cœur de l’été, et les Jeux olympiques ont probablement usé physiquement mais surtout moralement ses cadres. Le seul but de la rencontre est à mettre au crédit de Julio César Furch, un beau coup de tête (1-0). Une victoire précieuse pour los Tiburones en vue du maintien. A mi-chemin dans cet Apertura 2016, la lutte sera acharnée pour la qualification en Liguilla. Car les équipes se tiennent en peu de points.

Les buts de la 8e journée

 

 

Résultats 

Classement

Photo une : PEDRO PARDO/AFP/Getty Images

Diego-Tonatiuh Calmard
Diego-Tonatiuh Calmard
Etudiant journaliste franco-mexicain.Je ne suis qu’un mendiant de bon football (Eduardo Galeano).