S’il ne faut résumer l’année 2015 bolivienne en un mot, agité serait le plus approprié. Des géants qui se font bousculer en championnat à la sélection qui joue aux montagnes russes avec les émotions de ses fans en passant par le chaos en coulisses, elle l’aura en effet été. Bilan de l’année.

Sélection : l’art de tout gâcher

Dans toute son histoire, la Verde bolivienne n’a véritablement brillée qu’à deux reprises en Copa América : en 1963 lors de son seul titre et en 1997 lorsqu’elle termina finaliste. Dans les deux cas, un point commun, elle organisait l’évènement. En dehors de ces performances, son meilleur résultat avait 20 ans cette année, lors de l’édition uruguayenne de 1995, la Verde de Marco Etcheverry et Julio César Baldivieso s’inclinait en quart de finale face à l’Uruguay de Francescoli, pays hôte et futur vainqueur. C’est dire le niveau de la performance réalisée par la bande à Soria lors de l’édition 2015. Certes la Bolivie a explosé face au pays hôte dans un Nacional en fusion (lire Le Prince est roi sur ses terres), mais en accrochant le Mexique et surtout en s’offrant l’Equateur, la Verde a réussi sa Copa América, atteignant ainsi un quart de finale que personne n’attendait. Malheureusement pour le peuple vert et blanc, ce quart de finale sera sans lendemain car le pire était à venir.

Tout a commencé avec la démission de Soria pour de sombres histoires de primes, laissant un groupe seul face à son destin. Au même moment, le président de la fédération était rattrapé par des affaires de corruption et, placé derrière les barreaux, allait ensuite assister au scandale du FIFAGate qui allait bien évidemment avoir des répercussions en Bolivie. Conséquence, la sélection s’est retrouvée sans chef à sa fédération puis sans sélectionneur, a nommé dans l’urgence Baldivieso à quelques jours d’un carton pris face à l’Argentine, vu certaines stars quitter le navire (comme Marcelo Martins) et laisser ainsi une Verde en chantier. Le début de campagne de Coupe du Monde l’aura démontré. Dépassée par l’Uruguay et l’Equateur, le Bolivie a mis trois matchs pour se réveiller, bien aidée il est vrai par la faiblesse du Venezuela. Reste que ce succès a quelques peu dynamisé la bande à Baldivieso qui peut trouver en la défaite au Paraguay quelques motifs d’espoir. Reste que le chemin parait bien long.

Coupes continentales : schisme de mi-saison

L’effet été 2015 a rejailli sur les clubs. Car l’année continentale des boliviens, comme celle de son championnat – nous allons y revenir – peut clairement être divisée en deux temps. Un premier, jusqu’à juin, dans la lignée de l’année précédente, celle qui avait vu Bolívar se hisser en demi-finale de la Libertadores, The Strongest allant en huitièmes, avec San José qui se sera payé le luxe de faire tomber le futur vainqueur River (seul Cruzeiro parviendra à en faire de même), The Strongest ratant la marche en huitièmes de finale sur son dernier match alors qu’Universitario, pourtant à la peine en championnat, parvenait à s’y hisser pour finalement tomber pour un tout petit but face au futur finaliste Tigres (lire Tigres sur le fil). Mais donc, comme pour la sélection, la seconde partie d’année sera celle du chaos, aucun club bolivien ne réussissant à franchir le premier tour de la Sudamericana.

Championnat : la chute des géants

Deux temps donc et deux tournois bien différents en Bolivie. Car la temporada 2014/2015 s’est terminée comme elle avait commencée, sur un duel entre géants locaux, Bolívar s’offrant Apertura et Clausura devant d’autres habitués comme The Strongest (lireBolivie – Clausura 2015 : Bolívar comme une évidence). L’après Copa América aura été bien différent. Car après avoir sauvé sa place dans l’élite locale au prix d’une victoire lors d’un desempate face à l’Atlético Bermejo et un retournement de situation épique, Sport Boys est venu tout bousculer en ne changeant l’homme aux commandes. Le petit club de Warnes, qui avait été surtout connu pour avoir offert un contrat pro à Evo Morales mais aussi, l’année précédente pour avoir été le premier club de seconde division bolivienne à avoir nommé une femme au poste d’entraîneur, a en effet trouvé en Carlos Leeb plus qu’un sauveur sinon un messie. Et voici comment, profitant de l’irrégularité des autres géants, le tout petit club situé non loin de Santa Cruz de la Sierra est parvenu à décrocher un exceptionnel titre de champion, le premier de son histoire (lire Bolivie – Apertura 2015 : Sport Boys dans l’histoire !). De là à y voir l’émergence d’une nouvelle Bolivie…

Les joueurs

S’il ne fait aucun doute que Juanmi Callejón reste le meilleur joueur évoluant au pays, au point que la Bolivie n’en finit plus de vouloir le voir obtenir la nationalité bolivienne, l’Apertura aura permis de voir plusieurs autres joueurs briller, notamment du côté de Sport Boys. A commencer par le portier Carlos Lampe à qui le changement d’air a fait un bien fou, l’ancien de San Jose a ainsi conduit la meilleure défense du tournoi, se montrant le plus régulier à son poste. En défense, on aura aimé l’Apertura réalisé par Gabriel Díaz, l’un des hommes clés du beau tournoi de l’autre surprise, le promu Ciclón, avec notamment Nelvin Soliz. On aura aussi aimé le beau tournoi de Walter Veizaga avec The Strongest et celui d’Erwin Saavedra avec le dauphin Bolívar. Devant enfin, si Martin Palavicini n’en finit plus d’empiler les buts en Bolivie, inscrivant 19 buts lors des 21 journées de l’Apertura, le duo Duk – Ovejero aura été des plus performants avec le champion et mérite également les éloges.

2016, la grande inconnue

Après une telle année d’instabilité, la grande question est désormais de savoir sur quelles bases débutera 2016. Si on imagine aisément les Bolívar et autres The Strongest ne pas se laisser faire, on attendra beaucoup de l’Oriente Petrolero version Xabier Azkargorta. Mais l’équilibre demeure instable. A l’image de Blooming qui ne paye plus ses joueurs, la crise économique est dure au pays et pourrait bien menacer la saison. Côté sélection, l’incertitude pèse aussi. Les prochains rendez-vous s’annoncent déjà décisif quant à l’avenir des rêves de qualification, la prochaine Copa América pouvant aussi servir à Baldivieso à assoir enfin sa position toujours contestée par quelques anciens au pays.

Les buts du champion Sport Boys

 
Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.