On avait laissé et délaissé le football paraguayen en pleine bataille entre géants. En 2023, il fait donc son grand retour sur LO. Présentation du premier tournoi de l’année et retour sur les premiers matchs.

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Nous avions abandonné le football paraguayen alors que l’Apertura 2021 faisait rage et que deux équipes se tenaient en quelques points. Depuis, les trois principaux géants ont ajouté des étoiles à leur palmarès : Libertad en a décroché deux, les deux Apertura, quand Cerro Porteño et Olimpia ont décroché respectivement le Clausura 2021 et le Clausura 2022, dernier en date. Trois géants qui vont donc encore s’écharper pour aller chercher un nouveau titre lors de l’Apertura, qui prend le nom de Marcelo Pecci, procureur assassiné en Colombie en mai dernier et, comme l’était son père, ancien membre de l’administration de Guaraní, dans un championnat qui semble placé cette année sous le signe de l’offensive.

La chasse au buteur

Car il est un fait assez particulier au Paraguay : si vous aimez croiser des buteurs iconiques, qu’ils soient à répercussion locale ou mondiale, vous serez servis. On pense évidemment en premier lieu au duo légendaire de Libertad, Óscar Cardozo – Roque Santa Cruz, quatre-vingt-et-un ans à eux deux, et qui continue encore à faire trembler les filets (quatre-vingt-deux buts en cent quatre-vingt-quatre matchs pour le premier depuis son retour en 2017 et troisième meilleur buteur du dernier tournoi, quatre-vingt-neuf buts en deux-cent-vingt-trois matchs pour le second). Le Guma n’a d’ailleurs pas cédé à la ruée vers les buteurs durant ce mercato d’été après l’important transfert de sa pépite, Julio Enciso, vers la Premier League. Pour les autres en revanche, la chasse a été totalement folle.

Le Cerro Porteño comptait déjà sur Marcelo Moreno, il rapatrie Diego Churín, dont le précédent passage entre 2017 et 2020 avait été plutôt positif (meilleur buteur du Clausura 2017) et vise désormais à lui associer la machine Fernando Fernández qui veut enfin montrer qu’il peut briller ailleurs que sous les couleurs de Guaraní (vingt-cinq buts encore quarante-huit matchs en 2022 et un titre de meilleur buteur du dernier Apertura). Un Aborigen qui ne reste pas muet puisque le club, désormais dirigé par un ancien buteur de légende (deuxième meilleur buteur de l’histoire du championnat paraguayen et toujours deuxième meilleur buteur de l’histoire de la Copa Sudamericana), Hernán Rodrigo López, ramène au pays une ancienne connaissance de la Ligue 1, Federico Santander pour un troisième cycle au club après une nouvelle escapade européenne. Il lui adjoint Facundo Barceló, qui espère reproduire son passage réussi à Emelec il y a quelques saisons. De son côté, l’autre géant, père de Guaraní et Decano du football paraguayen, Olimpia attire dans ses filets Facundo Bruera, deuxième meilleur buteur du dernier Apertura et qui sort d’une année 2022 avec une moyenne proche des un but tous les deux matchs.

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La chasse aux buteurs ne s’arrête pas là. Elle s’accompagne aussi de magnifiques histoires. C’est le cas d’un autre ancien pensionnaire de Ligue 1. Le 9 septembre dernier, Lucas Barrios annonçait sa retraite. Un soir d’un dîner avec deux anciens partenaires de sélection, Jonathan Santana et Paulo Da Silva tout change : « Au départ, c’était une blague, puis au fil des jours, l’affaire est devenue sérieuse. Je suis rentré à Buenos Aires, j’ai discuté avec ma famille et j’ai pris ma décision ». Sa décision, accomplir un rêve, jouer en première division paraguayenne. C’est ainsi que l’ancien retraité va découvrir l’élite à trente-huit ans avec le promu Sportivo Trinidense, champion de l’Intermedia (la D2 paraguayenne) et donc de retour après six ans d’absence. « Il me manquait cela, c’était comme une épine au pied de n’avoir pas réussi à le faire, je l’avais dit lors de plusieurs interviews. Mais désormais, je suis là. Tu regardes derrière toi, tu es fier de ton parcours, j’ai gagné la Libertadores mais je n’avais jamais joué au pays, cela me manquait » a ainsi déclaré l’ancien meilleur buteur mondial.

La retraite, Édgar Benítez ne l’avait pas annoncée, mais l’international et quart de finaliste de la Coupe du Monde 2010 ne jouait plus depuis son départ de l’Alianza Lima en milieu d’année dernière. Il revient sur le terrain, du côté de General Caballero de Juan León Mallorquín, petite ville de trente mille habitants, et disputera la deuxième Copa Sudamericana de l’histoire du club.

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L’incroyable histoire du Sportivo Ameliano

Tel est le football au Paraguay, un recueil d’histoires. Celle du Sportivo Ameliano est l’une des plus folles de ces dernières saisons. Décembre 2021, alors que la saison touche à sa fin, le club, dont le plus grand record est un match à vingt expulsions en 1993 entré dans le Guinness, termine à la quatrième place de la División Intermedia. Une performance pour un club surnommé la V azulada qui connait alors seulement sa deuxième saison en deuxième division en plus de huit décennies d’histoire (le club est fondé en 1936). Cette saison-là, la quatrième place n’est pas anodine. L’élite paraguayenne passant de dix à douze équipes en 2022, le quatrième de D2 se retrouve propulsé en barrage face à une équipe de première division. Le 11 décembre 2021, après avoir triomphé du Sportivo Luqueño à l’aller, Ameliano accroche le nul et se retrouve propulsé dans l’élite pour la première fois de son histoire.

L’Apertura qui suit tourne au calvaire. Le club perd treize de ses vingt-deux matchs, termine à l’avant-dernière place avec comme seul fait de gloire d’avoir scalpé Olimpia lors de la septième journée. On se dit alors que le Clausura sera le dernier tournoi dans l’élite, l’affaire étant si mal embarquée aux promedios (Ameliano se retrouve dernier avec une moyenne de 0.864). Le Clausura débute par une victoire de prestige face à Libertad, mais si le club se montre plus résistant à domicile, les résultats ne permettent pour autant pas d’envisager rapidement le maintien. Humberto García est démis de ses fonctions dès le début de la phase retour. Le club nomme alors Juan Pablo Pumpido, jeune entraîneur argentin qui s’est fait un nom au pays en sauvant Sol de América quelques temps auparavant. La mayonnaise ne prend pas véritablement, le club ne remportant que deux victoires en sept matchs. Il n’en reste alors plus que trois, le seul espoir de survie passe par trois succès. Première objectif atteint face à Sol de América, tout un symbole. Il précède un exploit, la première victoire à l’extérieur, face à Nacional. Tout se joue donc sur l’ultime journée. Mais une semaine auparavant, la bande à Pumpido a réalisé un premier exploit. Quelques jours avant la victoire face à Nacional, Ameliano s’était hissé en finale de la Copa Paraguay (deuxième finale de rang pour l’entraîneur argentin) après un parcours il est vrai largement à sa portée. Et en finale, avait écrit l’histoire, s’imposant aux tirs au but face à ce même Nacional.

Cette victoire offre une nouvelle énergie aux joueurs. Après la double victoire face à Nacional, le club se retrouve à jouer sa survie face à un géant nommé Guaraní. Pour un nouveau miracle. Ameliano est mené 2-0 à la pause, se retrouve en supériorité numérique, égalise en trois minutes dès le début du second acte (52e et 55e), prend les devants à la 87e et scelle son maintien à la 90e envoyant Sol de América en deuxième division (encore un symbole). En deux mois, le club passe de la relégation au maintien, décroche la Copa Paraguay qui l’envoie non seulement en Supercopa paraguayenne mais aussi et surtout en Copa Sudamericana ! Jusqu’où ira la V azulada en 2023 ? Nul ne sait. Mais sa saison a commencé par un nouvel exploit : le 26 janvier dernier le Sportivo Ameliano a décroché la Supercopa en s’imposant 1-0 face à Olimpia !

La valse a déjà commencé

Deux journées et déjà, la grande tradition paraguayenne de valse des entraîneurs a commencé. Premier à quitter son poste, Robert Pereira n’a pas résisté aux deux défaites en deux sorties de Tacuary. Dans la foulée, ou presque, ce lundi, le Cerro Porteño a surpris tout le monde en annonçant la mise à l’écart de Francisco Arce. La raison n’est pas sportive, le Ciclón n’a pas totalement manqué son départ sur le plan des résultats – un nul et une victoire – elle est lié à un désaccord entre l’entraîneur en charge du club et le responsable du recrutement, Rafael Vieira qui avait notamment fourni plusieurs candidats pour combler le départ d’Alexis Duarte de la défense, tous étant refusés par Chiqui dont le cycle de quatre ans se solde donc sur deux titres (bien minimisés par le club dans son communiqué, ce dernier évoquant notamment un titre miraculeux en 2021), lui permettant d’être seul plus titré du club. Après cette annonce, tout le staff d’Arce a présenté sa démission, de même que le secrétaire technique du club, l’analyste vidéo et l’un des membres du corps médical. Ou comment s’offrir une crise interne sans raison sportive d’entrée d’année.

Sur le terrain donc, Libertad est pour l’instant le seul à réussir le six sur six, s’offrant le premier duel entre grands face à Guaraní. Olimpia et Nacional, dont le match a été reporté, pourraient se joindre au leader alors que le Cerro Porteño et General Caballero sont aussi bien partis. À noter que pour son retour au pays, Lucas Barrios a inscrit le premier but de la saison du Sportivo Trinidense lors de la victoire en ouverture face à Tacuary. De son côté, Ameliano a accroché le Cerro Porteño en ouverture après avoir été chaleureusement accueilli par les joueurs adverses et la Nueva Olla à la suite de son triomphe en Supercopa, avant d’accrocher ensuite Guaraní lors de la deuxième journée.

Classement

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Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.