Un communiqué de la fédération chilienne et la rencontre amicale prévue entre Chili et Pérou la semaine prochaine est annulée.

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Jusqu’ici, tout se déroulait comme si de rien n’était. Alors que les joueurs étaient regroupés pour préparer le prochain match amical de la Roja prévu mardi prochain, un communiqué publié ce mercredi soir sur le site de la fédération chilienne est venu annoncer l’annulation de la partie et la libération de l’ensemble des joueurs qui rentrent donc dans leurs clubs respectifs.

La raison est donnée par le sélectionneur Reinaldo Rueda en conférence de presse, véritablement surpris, « les joueurs sont arrivés avec une grande volonté, ils se sont ensuite réunis et ont pris cette décision en raison du climat social, pour tout ce que traverse le pays, celle de ne pas jouer face au Pérou, considérant qu’ainsi ils montreraient ainsi leur solidarité. C’est très respectable. Chacun vit des moments différents avec sa famille, ils ont passé quelques heures avec eux, ont vu ce que vit le pays, je crois que cela a fait changer leur position initiale [NDLR : qui était de jouer] », avant ensuite d'ajouter « en tant qu’étranger je suis neutre en regard à toute considération politique. Je ne peux que regretter ce que nous perdons. Je suis très attristé par tout ce qui s’est passé ». Rueda avait déjà connu une telle situation critique. En 2009, alors qu’il dirigeait le Honduras, le coup d’état contre le président Manuel Zelaya avait frappé le pays, période qu’il a évoquée : « ce n’est pas facile de se mettre à la place des autres. Par exemple, je viens de vous dire que je suis étranger et donc neutre, mais dans le cas du Honduras, j’ai vécu un coup d’étant avec un président qui est parti, un pays divisé avec des officiels et des joueurs qui l’étaient également. La situation a duré six mois puis s’est normalisée avec l’arrivée d’un nouveau président. Ce sont des situations sociales complexes, il est facile de dire une chose ou l’autre. La sélection est le symbole national, mais il y a aussi les questions de solidarité avec les familles et les voisins des joueurs. Il n’est pas facile de prendre parti ».

La décision d’annuler le match a également été annoncée par les joueurs sur leurs réseaux sociaux, tous partageant le même message.

 
 
 
 
 
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a toda, la opinión pública, especialmente a los hinchas. Como equipo hemos tomado la decisión de no jugar el partido amistoso pactado con Perú, en atención al momento social que vive nuestro país. Somos jugadores de futbol, pero ante todo personas y ciudadanos. Sabemos que representamos a un país completo y hoy Chile tiene otras prioridades mucho más importante que el juego del próximo martes. Hay un partido más importante que es el de la igualdad, el de cambiar muchas cosas para que todos los chilenos vivan en un país más justo. Apoyamos las manifestaciones, pero sin violencia y sin heridos, tanto del lado de los manifestantes, como de las fuerzas de orden. Chile necesita paz, pero tampoco que se olviden las demandas que originaron este movimiento. #fuerzachile #elpueblounidojamasseravencido❤️

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« Comme équipe, nous avons pris la décision de ne pas disputer la rencontre amicale prévue face au Pérou en réponse au mouvement social que traverse notre pays. Nous sommes joueurs de football, mais avant tout des personnes et des citoyens. Nous savons que nous représentons un pays entier et aujourd’hui, le Chili a d’autres priorités bien plus importantes que le match de mardi prochain. Il y a un match bien plus important, celui de l’égalité, celui de changer de nombreuses choses pour que tous les Chiliens vivent dans un pays juste.

Nous soutenons les manifestations, mais sans violence ni blessés, tant du côté des manifestants que des forces de l’ordre. Le Chili a besoin de retrouver la paix, mais ne doit pas non plus oublier les demandes à l’origine de ce mouvement ».

La décision des joueurs de ne pas disputer le match provoque évidemment bien des réactions. Même de la part de Rueda qui a glissé un énigmatique « si je viens pour travailler dans le football et qu’il n’y a pas de football, je me dois de partir », laissant ainsi planer le doute sur sa volonté de poursuivre dans de telles conditions, ajoutant « nous devons affronter ce moment et d’ici mars nous ne savons pas ce qu’il peut se passer. Je me suis sacrifié, je n’ai pas convoqué les joueurs locaux pour que le championnat puisse avancer alors que je pouvais le faire. Je ne les ai pas appelés pour que le championnat avance mais le championnat ne se joue pas. Ils ne jouent ni en sélection, ni en club, je suis perdant, tout le monde est perdant ». Rueda a même reconnu avoir pensé à présenter sa démission « vendredi dernier », alors que les U23, qui préparent le tournoi qualificatif pour les prochains JO, ont vu leur tournée en Espagne annulée, même s’il a tout de même tenu à se montrer rassurant : « je suis venu avec un engagement sérieux, celui de nous qualifier pour Qatar 2022. Je m’engage à celui, je n’abandonnerai pas le projet ».

Du côté de l’ANFP, Sebastián Moreno a également livré sa réaction : « la sélection doit être protégée. Cette décision est née des joueurs eux-mêmes, après leur convocation, une fois rassemblés au Chili, alors qu’ils étaient disponibles pour défendre la sélection. Nous comprenons aujourd’hui que cette décision a été prise dans les vestiaires, entre les joueurs. Cela étant, nous avons décidé de procéder à l’annulation de leur convocation et de les remettre à disposition de leurs clubs. Plus que de surprendre ou pas, ce qui fait mal est le moment où la décision est prise. Il y avait un engagement avec une autre fédération, un engagement pris avec l’encadrement technique, les joueurs, tout cela étant la dernière étape de préparation avant mars, début des éliminatoires ».

Côté Pérou, les médias locaux parlent de « douche froide » et de « consternation » au sein de la fédération, qui a évidemment pris en compte la décision chilienne à travers un communiqué. Juan Carlos Oblitas, directeur sportif de la sélection, s’est montré plus virulent, déclarant « ne rien comprendre » et se tourne désormais vers la recherche d’un plan B. Un plan B d’urgence qui pourrait s’appeler Panamá, dont le match amical prévu ce même jour face à la Bolivie a également été annulé en raison du contexte social.

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.